L'histoire :
C’est les grandes vacances ! Le journaliste Lefranc accompagne son jeune ami Jeanjean à la gare de Saint Malo. Jeanjean part en effet en camp scout, dans un coin de campagne normande proche du littoral. Entre l’édification du camp et le relationnel avec les autres membres du groupe, les premiers jours sont pénibles pour l’adolescent, qui souffre de l’éloignement avec son oncle et son ami. Les histoires morbides de ses compagnons l’amènent à se remémorer de pénibles souvenirs : la mort de ses parents dans un accident de voiture, dont il se sent responsable. Pendant ce temps, la vie pour Lefranc n’est guère plus gaie : il est mobilisé pour partir à la guerre d’Algérie ! Il en profite pour deviser du mal-fondé des exactions commises au nom de ce conflit, en compagnie de son général de tutelle. En Normandie, un jeu de piste amène Jeanjean et ses compagnons à trouver et reconstituer un squelette humain (un mérovingien ?)… puis à découvrir l’entrée d’un bunker, à proximité d’une plage du débarquement. Et tandis que Jeanjean sympathise avec une insolite bande d’enfants en guenilles, son copain François repousse violemment un vagabond qui « le reconnaît »…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
En 2006, avec Le maître de l’atome, Michel Jacquemart avait rendu quelques lettres de noblesse à la série Lefranc, imaginant une suite logique à la Grande menace. Le même Jacquemart s’en était « pas trop mal sorti » avec le tome 20, Noël noir, piégeant le héros journaliste au fond d’une mine. Cette fois-ci, le scénariste livre un vrai, un beau, un pur nanar ! Visiblement, au départ, l’auteur a eu envie d’expliciter les raisons pour lesquelles Jeanjean est orphelin… Cet éclairage ne s’imposait guère après 21 albums, mais bon, admettons, ce n’est pas encore le plus grave. Car l’intrigue s’emberlificote littéralement dans un ésotérisme pur jus, du pire effet. Les fantômes se mélangent aux souvenirs, les rebondissements grand-guignolesques côtoient les intuitions commodes et les surprises morbides… Une digression inappropriée envoie même le héros à la guerre d’Algérie, le temps de palabres moralisateurs. Bref, hormis les relents des guerres qui se font vaguement écho, ce tome 22 manque de fil conducteur cohérent. C’est vraiment du grand n’importe quoi. Au comble du ridicule, Lefranc (qui brille surtout par ses absences) frise la mort à deux reprises, dans de violents accidents (un crash d’avion dans le désert, puis 8 pages plus loin, sa voiture se crashe de nouveau, du haut d’une falaise normande) et il ressuscite à chaque fois sans une égratignure ! Les aficionados et collectionneurs de la série se raccrocheront au dessin besogneux d’Alain Maury – et oui, encore un nouveau dessinateur ! Sa ligne claire statique se place respectueusement dans la charte graphique définie jadis par feu Jacques Martin. Le comité éditorial qui gère la succession du maître ne pourrait-il songer à confier ne serait-ce qu’un épisode à un scénariste « moderne », c’est à dire capable de rythmer une intrigue qui ne soit pas ampoulée et de respecter l’univers désuet ?