L'histoire :
Au printemps 1958, au sud de l’île de Cuba, la Pilar, le yacht d’Ernest Hemingway mouille à quelques encablures de l’île de Cayos de Mordazo. L’écrivain et le capitaine du bateau scrutent la surface des eaux turquoise, avec une agitation certaine. Bientôt, le plongeur Victuro Lopez Acosta remonte avec un bonne nouvelle : il a trouvé une cité engloutie à une trentaine de mètres de profondeur et n’a pas manqué de la photographier sous tous les angles, ce qui ravit Hemingway. Pour autant, en ces temps de tensions sur l’Archipel cubain, il vaut mieux ne pas s’attarder et quitter la zone au plus vite. Cinq mois plus tard, à la Brasserie Lipp du boulevard St Germain à Paris, l’éditeur Marcel Duhamel a invité Lefranc à déjeuner. Ce dernier pressent que ce n’est pas une de leur rencontre habituelle. Son instinct de journaliste ne l’a pas trompé, puisqu’il reçoit des mains de son ami une invitation d’Ernest Hemingway qui lui propose de venir le rejoindre à Cuba. L’éditeur fait remarquer au jeune homme qu’outre l’interview d’un prix Nobel de littérature, qui mérite déjà le voyage, ce sera aussi l’occasion de faire un point sur la poussée de Castro et du Che qui fait vaciller le dictateur Batista. Au même moment, dans le Tenessee, Thomas Barnes, physicien nucléaire, ancien responsable du projet Manhattan, rejoint son confortable domicile. Il s’étonne qu’Esther et Sally, sa femme et sa fille, ne viennent pas l’accueillir. Quand il entre dans le salon, il fait une effroyable découverte : Baltik son chien, gît dans une mare de sang…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
25ème tome de la série initiée par feu Jacques Martin, Cuba libre emmène Lefranc sur l’archipel qui sera bientôt sous le contrôle de Fidel Castro, l’action se déroulant dans l’année qui précède le renversement de Batista par les révolutionnaires cubains. Régric maîtrise depuis plusieurs albums la charte « martinesque », les amateurs apprécieront. Roger Seiter, de son côté, élabore une histoire qui oscille entre réalisme et invraisemblance. L’aventure est rythmée par l’enchainement des évènements qui se déroulent à plusieurs endroits en même temps; et les célèbres personnages qu’elle implique ajoutent de l’intérêt au récit. À un moment essentiel de l’Histoire de la région, les intérêts stratégico-économiques de la CIA, de la Mafia et des cubains se confrontent dans l’urgence, rendant la situation explosive… enfin pas tout à fait, grâce à Lefranc bien sûr ! C’est un peu convenu, mais c’est plaisant à suivre. Les planches chargées par les nombreuses bulles, les couleurs à la fois douces et profondes, ce trait singulier presque intact malgré les changements de mains, sont tout à fait dans le ton des albums du créateur. En revanche, il apparait de plus en plus évident que Lefranc glisse vers l’espionnage au détriment du journalisme, qui tient une place plutôt anecdotique dans cet album. La fin précipitée des velléités terroristes interpelle ; l’heureux dénouement pour les Barnes était de mise ; reste la statuette qui ouvre peut-être la perspective d’une suite à l’histoire. Sans quoi, il reste comme un goût d’inachevé à une aventure qui aurait mérité d’avoir plus d’espace pour se dérouler. L’ambiance visuelle vraiment réussie, avec notamment de jolies scènes sous-marines, équilibre cependant l’ensemble, offrant au lecteur un agréable moment, même si les albums passés semblent loin et qu’Axel Borg commence à manquer…