L'histoire :
Pablo Picasso est un jeune immigré espagnol. Un cul terreux qui a fui la misère et le dogme religieux qui étouffent son pays natal, pour débarquer à Montmartre. Il y vit la vie de d'artiste ou de bohème, ce qui revient à peu près au même en ce début de XXème siècle. Il s'amourache de Fernande Olivier, une provinciale qu'un mauvais mariage a conduit à la capitale. Mais après leur première nuit d'amour, un accès d'autorité l'éloigne temporairement d'elle. Pour combler son absence, il s'entoure de nombreux camarades et de substances permettant l'évasion. Parmi ses amis, Max Jacob s'échine à vendre ses tableaux et à l'introduire dans les milieux d'amateurs d'art, dont l'avantage principal est de réunir des personnalités très fortunées. Mais si Max est amoureux de Pablo, l'artiste va bientôt rencontrer un personnage avec lequel il se liera d'une grande amitié : Guillaume Apollinaire...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Si le premier tome nous avait plu, celui-ci est un enchantement, à l'image du portrait en pleine page de Fernande, qui ouvre ce second volume. On continue ainsi à suivre le sillon que se creuse peu à peu le jeune Pablo. Il n'a pas encore 25 ans, mais son entourage le considère déjà comme un génie. L'immersion au sein de la faune artistique de ces années 1900 se poursuit, et on navigue souvent en eaux troubles. Entre peintres déjà installés et bouffis de prétention, entre artistes ambitieux quelque fois dépourvus de talent et de morale, Picasso peine à s'extraire de la misère populaire, mais il semble ne jamais souffrir de sa condition sociale. Comme dans le tome précédent, Paris reste le théatre étrange et fabuleux de son parcours, bien souvent alcoolisé et jalonné par la découverte de l'opium... Certaines scènes relèvent ainsi de l'onirisme, d'autres sont plus réalistes, comme celle du cirque. Elles permettent à Clément Oubrerie de revisiter les quartiers de Montmartre et de la Gare Saint-Lazare, entre autres. On peut noter à cet égard une forme d'évolution dans le dessin, très particulier, mais qui a le métite d'être original et surtout de véhiculer les émotions, renforcé en cela par des couleurs très réussies de Sandra Desmazières. Pour conclure, on finit cette suite en s'interrogeant sur l'exactitude ou la véracité des faits. Mais peu importe si, finalement, quelques libertés sont peut-être prises, car seule compte la beauté de ce récit. Et ce critère, à nos yeux, l'emporte bel et bien sur tous les autres...