L'histoire :
Londres, en 1977. La famille royale britannique est sur le point de fêter son jubilé d’argent avec faste, alors que le pays s’enfonce chaque jour un peu plus dans une crise sociale et économique sans précédent. Sur les docs, un junkie se fait agresser. Il a du retard dans le paiement de ses doses d’héro. Il s’en sort avec quelques contusions et les cheveux coupés en vrac, au couteau. Le capitaine de la brigade fluviale, lui, est sur le qui-vive : les Sex pistols, le groupe Punk dirigé par Johnny Rotten (des dégénérés !), a choisi le jour du jubilé pour cracher sa haine du système, en faisant un concert évènement à bord d’un bateau qui voguera sur la Tamise. Le gros des troupes de Scotland Yard est donc mobilisé sur le fleuve pour contenir tout débordement, avec pour consigne de ne surtout pas faire de provoc. C’est dans ce contexte à haute tension qu’une poignée de narcotrafiquants, sous la houlette de Nonce Calenzini, un mafieux corse, prépare une grosse transaction à bord d’un paquebot amarré à quai. Or l’un des jeunes caïds, Paul Fulci, a monnayé son amnistie avec la police française, contre sa traîtrise au moment du deal…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Les partenaires de Travis, Fred Duval et Christophe Quet, se retrouvent pour un des one-shot de la collection Le Casse, dans un registre donc bien différent de leur habituel univers de SF. Pour contexte, ils choisissent l’Angleterre socialement ravagée de la fin des seventies, la période punks et Sex pistols (que Duval connaît bien, pour l’avoir déjà mis en scène dans un futur proche, à travers Code McCallum). Sur un dessin semi-réaliste de Quet, dynamique, contrasté, impeccable, l’intrigue se concentre sur un deal de narcotrafiquants qui va nécessairement bifurquer de son programme initial (c’est le concept de la série). Le récit adopte la forme du polar mafieux aux p'tits oignons et à hautes tensions, option French connection, le parfum de contestation sociale en sus. Mais la mise en scène des auteurs va au-delà de cet exercice de genre, en proposant une jouissive routine pour leur séquençage. En effet, à l’exception de la toute première, chaque planche est introduite par une case verticale reprenant un élément clé qu’elle contient. Chaque séquence dure ainsi le temps d'une planche (voire deux) et constitue une pièce d’un puzzle narratif à recomposer. Le lecteur est donc amené à faire des allers et retours entre le présent et les flashbacks, à déduire ce qui se trame, et ce petit jeu se révèle assez efficace question suspens et somme toute limpide (malgré les apparences). Cerise sur le gâteau : on n’apprend la finalité de ce Casse que dans la toute dernière case, culottée et bluffante. Well done !