L'histoire :
A la forme du carnet de voyage traditionnel, juxtaposant textes et illustrations, s’alternent ici des pages de bande dessinée plus traditionnelles. Le volume s’ouvre sur une visite au Japon en 2004, lors d’une « mission » organisée par l’alliance française (déjà lue en partie dans un album collectif sur le Japon, chez Casterman). Cette partie est centrée sur la vie japonaise vue par des exilés, dont le coloriste de Donjon, Walter, ainsi que sur les rencontres avec des auteurs de manga. Suit le compte-rendu d’une tournée de signatures et de conférences aux Etats-Unis en 2006, de New York à Miami et du Rockefeller Center aux studios Pixar. L’occasion aussi d’une réflexion approfondie sur le tragique, la judéité et l’hypothétique antisémitisme français. Le recueil s’achève sur des images, plus disparates et moins nombreuses, d’un voyage au Maroc en 2001.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Joann Sfar préfère les personnages au récit, les relations humaines aux décors. Ses carnets, même de voyages, parlent donc surtout de lui, et les pays visités servent d’abord de chambre d’échos à ses propres préoccupations. Les délicieuses mais paradoxales pages consacrées à la lecture du Comte de Monte Christo dans une chambre d’hôtel à New-York en sont la parfaite illustration. D’ailleurs, lorsqu’il emprunte à d’autres les commentaires (ex : la vision du pays, dans la partie japonaise), on s’approche de l’anecdotique, d’une certaine insignifiance. Le très riche voyage en Amérique compense sans difficulté cette faiblesse initiale, en particulier lors d’une magistrale transition, où Sfar s’interroge sur sa propre représentation, comme en écho à ces pages cruciales qui ouvrent le deuxième tome de Maus. Graphiquement, pas grand-chose à voir avec Spiegelman, en revanche. Les carnets sont désormais en couleur, et l’élégance lâche du trait de Sfar peut s’épanouir pleinement, flânant sans rupture de l’oubliable au magnifique.