L'histoire :
Dans la décharge jouxtant un bidonville de Mexico, un gamin retrouve les corps sans tête de deux femmes. Un classique, pour les flics, dans cette mégapole rongée par la criminalité. La décapitation est un mode usuel d’élimination chez les narcotrafiquants. Pablo Tikal, détective privé efficace et opiniâtre, s’intéresse de près à la chose. Vu la technique impeccable pour découper les cous, il cherche du côté des chirurgiens. Et notamment ceux qui ont acheté leurs diplômes pour exercer. Il est alors contacté par Clare Burnell, d’Interpol, une jeune inspectrice beaucoup trop sexy pour être méprisée. D’ordinaire solitaire, Tikal accepte un échange de bons procédés avec Burnell. Il lui dit carrément qu’il a identifié le tueur et lui explique le mobile. Selon lui, c’est Jaime Sandos, un chirurgien pédiatrique qui se venge des familles qui l’ont poursuivi en justice pour avoir tué leurs enfants sur le billard. Les patronymes des victimes correspondent. L’info délivrée, il demande en retour que Burnell la confronte aux bases de données des milliers d’établissements de santé de la ville. En ressort un nom et un lieu. Tikal s’y rend immédiatement, en solo. Visiblement, il a un compte personnel à régler avec Sandos…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Ne confondez pas : cette nouvelle série Agence Interpol est différente d’ Interpol, débutée sans suite il y a deux ans chez le même éditeur (Dupuis). Peut-être, d’ailleurs, le tome 1 d’Interpol sera-t-il refondu par la suite au sein d’Agence Interpol, étant donné que le principe est ici d’empiler des histoires indépendantes – inspirées de faits réels – se déroulant dans des coins du monde diversifiés, avec des protagonistes nouveaux à chaque fois. Pas le temps de s’attacher, donc, et ça tombe bien : les deux enquêteurs de La muerta exhalent peu d’empathie. Un privé blasé et une agent d’Interpol sexy s’allient ici pour trouver l’assassin qui décapite des dizaines de femmes dans les bas-fonds de Mexico. Le contexte est sordide à souhait et sans doute assez proche de l’actualité (lisez Juarez, dans le même registre). Certaines séquences prouvent que Philippe Thirault s’est bien documenté pour nous immerger au plus près d’une certaine réalité. Certes, le scénariste a une légère propension à faire surgir des narcotrafiquants de n’importe où, à tout moment, qui mitraillent alentours comme des tarés, à la manière d’un Tarantino en mal de furie gratuite. Quitte à doubler l’effectif de cadavres dans une morgue (la 1ère case de la p.33 !). Sanglante, donc, l’enquête se montre également cuite à point, c’est-à-dire plus entortillée que ne le voudraient les apparences, minutieuse de la part du duo de héros et ponctuée d’un cynisme tranchant dans les répliques et les voix-off. Thirault s’appuie aussi sur les talents graphiques fortement encrés de Lionel Marty, avec lequel il a déjà réalisé le Rêve de Jérusalem. Guère dépaysé par la profusion d’hémoglobine, Marty se confronte donc sérieusement à un registre contemporain en axant plus sa mise en scène sur les personnages que sur les décors.