L'histoire :
Une femme amène son adolescent en consultation médicale. Blasé, le spécialiste lui explique qu’il a l’habitude avec ces êtres flasques et récalcitrants, qu’il faut attendre que jeunesse se passe, et que le mieux, c’est de le mettre en bocal et de patienter jusqu’à la fin des boutons.
Au terme d’une FIV (fécondation in vitro), une femme enceinte passe une échographie. Le médecin lui annonce, embarrassé, qu’il s’agit de deux enfants et d’un labrador. Devant l’incrédulité de la patiente, il ajuste ses lunettes devant son écran et s’aperçoit qu’il a confondu la visualisation de l’échographie avec son économiseur d’écran…
A l’apéro, un couple de jeunes parents en vient à parler de l’accouchement et notamment de la perte des eaux de madame, apparemment mémorable. Tout fiérots, ils se mettent en tête de passer le film de ce moment magique à leur invité. Mais ils confondent tout d’abord avec le débouchage de leur fosse sceptique, puis avec le film d’horreur Texas killer 3, puis avec le vidage du poulet à l’anniversaire du fiston…
Un amnésique chronique écoute, au réveil, le message laissé sur magnéto par son épouse, la veille. Il apprend qu’il est marié, qu’il a un fils de 3 ans, que ce dernier a été malade cette nuit, qu’il a beaucoup pleuré, que sa femme l’a conduit à l’hosto, qu’elle y est encore… Déjà épuisé par ces nouvelles, il préfère se recoucher. C’est à ce moment que sa femme ajoute qu’il faut se méfier, car le petit a vomi partout dans le lit.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Après avoir cassé du médium dans Crise de foi, Clarke revient seul (pour la première fois) aux commandes du dessin et des scénarii de ce quatrième opus d’historiettes, afin d’y conspuer, ridiculiser, annihiler dans l’œuf toute idée de parentalité. Une nouvelle fois, l’auteur n’y va pas de main morte, écornant âge par âge les contraintes de l’éducation d’un enfant. Car oui, un poupon ça braille, ça vomit, ça requiert un quasi-plein-temps ; puis un enfant ça fait des bêtises, ça n’évolue pas forcément de manière idyllique, ça réclame sans cesse une attention particulière ; puis un ado, c’est très con, plein de boutons purulents, tout mou et tout pénible. Le problème n’est pas tant l’humour qui, cette fois, perce tout de même avec un sadisme assez génial (Tanguy, l’amnésique chronique de la p.39 ; l’appendicite p.45). Mais à force d’insister sur l’horreur absolue d’être parent, en empruntant des biais les plus extrêmes/choquants possibles (tuer son enfant est souvent une solution), ça en devient pathologique, lourd, suffisant, haineux… et surtout particulièrement méprisant à l’encontre des lecteurs parents. Certes, tous les protagonistes ont cette fois des lunettes, histoire de justifier le titre (oui, mais bon, et alors ?). Profitablement, l’auteur réintroduit également progressivement les personnages récurrents des deux premiers tomes : amnésiques chroniques, blouses médicales et il y a même un Jenkins-Médard (les savants fous qui se haïssent). Graphiquement, Clarke use de plus en plus de la technique de duplication partielle ou totale de cases (les amnésiques chroniques, qui écoutent immobiles et religieusement leurs enregistrements, sont très pratiques dans le registre !). Vu qu’il n’y a déjà quasiment pas de décors à ces situations, l’atout de cet album ne réside donc pas non plus dans le dessin…