L'histoire :
Un type se réveille un matin et découvre un écriteau : « Allume le dictaphone sur la table de nuit ». Il entend alors sa propre voix lui annoncer qu’il est un amnésique chronique : il doit réapprendre chaque matin qui il est et ce qu’il doit faire pour s’en souvenir le lendemain (dont enregistrer ce message). Cependant, avant la fin du message, une seconde voix vient parasiter la transmission d’informations cruciales…
Penchés en blouses vertes sur un corps inanimé, trois médecins légistes débutent une autopsie. Mais à peine ont-ils ouvert la cage thoracique que l’un d’entre eux fait remarquer avec effroi que le cœur du cadavre palpite encore ! Trop tard : les bistouris légaux ont causé trop de dégât, le « cadavre » meurt. C’est le moment que choisit une infirmière pour leur indiquer qu’ils se sont trompés d’étage (cochonnerie d’ascenseur). Deux médecins s’apprêtent à entrer par une autre porte, pour retirer un furoncle…
Dans un canot pneumatique, un couple et un grand-père s’apprêtent à tirer à la courte-paille celui qui sera bouffé par les deux autres, afin d’assurer leur subsistance…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Drôle de série qui commence par le tome n°5, n’est-il pas ? N’essuyez pas vos verres, ne changez pas de lentilles, tout est normal, nous sommes chez Clarke. A contrario du grand frère Gaston (qui lui, longtemps, ne compta pas de tome R5), Le monde est flou est bel et bien un 5e recueil de gags en vrac, doucettement cyniques et déjà connus, republiés en une nouvelle série non moins fourre-tout : Histoires à lunettes. Jadis, ils furent en effet publiés en Humour libre sous l’appellation Durant les travaux, l’exposition continue (futurs tomes 1, 2 et 3), puis en one-shot chez Expresso, avec le Miracle de la vie (futur tome 4). A l’origine, ces petits délires cyniques sont nés de la volonté de Midam (papa de Kid Paddle) et Clarke, de jouer d’un humour minimaliste et néanmoins acide, de type Gary Larson. Seul aux commandes depuis le Miracle de la vie, Clarke poursuit donc la chose avec plus ou moins de bonheur. En marge de leurs chutes grinçantes, les ressorts comiques sont en effet souvent déjà-vus, voire parfois téléphonés. Clarke trouve cependant une forme plaisante de comique de répétition, en insistant sur les 4-5 mêmes situations diversement déclinées (un running-gag, ça s’appelle) : l’amnésique, l’anthropophagie nécessaire, les explorateurs, les scientifiques apprentis sorciers… Car en dépit de ce nouveau titre, les chutes ne découlent pas toutes de troubles de la vue, mais constitue essentiellement un des thèmes récursifs. Confortablement ancré dans la pure veine de l’école franco-belge, le dessin est hyper classique, mais il est un modèle du genre : maîtrisé, bien rodé, fluide et efficace. A noter que Clarke tire un certain avantage graphique de ces situations comiques, en usant et abusant des copiés-collés de tout ou partie de cases identiques. A signaler enfin, un cahier final, une sorte de dossier de presse auto-parodique délirant (et dispensable), revient largement sur la genèse, la finalité et les coulisses de la création de ces gags. A voir (sic)…