L'histoire :
Avril 1968. Annette et sa sœur cadette profitent de quelques jours de vacances dans les Cévennes, chez leurs parents. Bientôt, il faudra regagner Paris, le chemin de la Fac et le petit studio qu’elles partagent depuis peu. En rentrant chez elle pour diner, la querelle qui les oppose à leur mère pour une sortie nocturne est interrompue par un bruit sourd à l’étage : leur père vient de se donner la mort en se passant la corde autour du cou. Ce geste leur semble incompréhensible et leur père ne leur laisse aucune explication. Après les obsèques, les 2 sœurs regagnent la capitale qui vit au rythme des grèves et occupations étudiantes depuis peu. Un soir, par hasard, Annette découvre dans la poche d’une canadienne ayant appartenu à son père, un reçu d’hôtel indiquant qu’il a effectué un voyage dans la ville récemment. Au dos du document, elle découvre aussi une énigmatique inscription : un patronyme suivi de quelques lettres et d’une numérotation… Alors qu’Hélène participe à l’effervescence étudiante qui semble gagner la ville entière, Annette n’a en tête que ses examens. Pourtant, lorsque leur mère leur rend visite et qu’elle élude chacune des questions qui lui sont posées. Puis lorsqu’Annette rencontre une infirmière qui semble la reconnaitre, elle n’a plus qu’une obsession : fouiller le passé pour découvrir ce qu’on lui cache depuis son enfance…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
L’écharde inaugurait en 2004, une série concept délicieusement concoctée par Frank Giroud, offrant à notre curiosité les soubresauts ravageurs de secrets familiaux. Rien de tel avant de se passer La corde (le tout dernier né de la série) autour du cou, que de faire connaissance avec Annette et Hélène, les 2 récits étant étroitement liés. Construites avec une lenteur méticuleuse, un suspens soigné, les énigmes de ce Secrets se dévoileront avec évidence au rythme d’une dramaturgie qui n’a rien à envier aux meilleurs récits du genre. Entre mai 68 et rafle du « vel’d’hiv », énigme du suicide paternel, flashbacks et confrontations sœur-mère-fille, Annette, l’ainée des deux sœurs, recompose ici l’histoire familiale en balayant d’un revers silences, mensonges et non-dits. Elle apportera ainsi définitivement des réponses aux questions en latence depuis son enfance : une délivrance tout aussi douloureuse que nécessaire, tout aussi lourde de conséquences qu’indispensable. Aiguillonnée par la force des contextes historiques présent et passé, la mise en miroir des liens fraternels actuels et anciens, l’intensité tragique pèse de tout son poids. Au point, peut-être, de nous permettre de mieux comprendre ceux qui préfèrent garder « l’écharde » en priant qu’elle ne s’infecte jamais. Doux et agréablement mis en couleur, le trait de Marianne Duvivier est un apaisant contrepoids. Certes, il y a bien ces ressemblances maladives entre les « différents » visages féminins, mais le charme opère tout de même agréablement. Comme dans toute intégrale qui se respecte, on nous offre ici quelques bonus : incontournables crayonnés, mais aussi, genèse du projet, quelques correspondances entre les 2 artistes et les premières planches du premier jet (complètement différentes).