L'histoire :
Au cœur des steppes d’Asie centrale, la capitale du royaume des Trois Contrées est assiégée. L’armée du maudit Turghul menace la ville basse d’Enul et, en cela, les fondations même de la dynastie du dragon à la toison de feu. Le roi Kamachak décide alors une sortie afin de repousser les conquérants Ilkhans. La bataille s’engage, sans merci. Malheureusement de guerre lasse, il est atteint d’une flèche empoisonnée tirée par son ennemi juré. Au crépuscule de sa vie, le souverain dicte à son scribe ses dernières vérités puis il rend l’âme. Le grand prêtre Balkhan choisit le prince Tengiz, au détriment de ses frères aînés, pour succéder à son père et brandir le kukri. Depuis son plus jeune âge, il a été initié en secret ; seule sa sagesse mettra un terme au cycle de la violence. De fait, ceint du diadème, le prince s’élance hors des murs de la citadelle vers ses frères commandants l’armée finalement victorieuse. A leurs yeux, le choix d’un roi poète ignorant des armes est une insulte. Par respect pour la dépouille encore chaude de feu leur père, ils quittent sans rixe le champ de bataille à la tête des soldats. Tengiz reste seul. Il ne devra compter que sur quelques fidèles. La sagesse vient de remporter une première bataille mais à quel prix, celui d’un roi esseulé et d’une guerre fratricide à venir…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Tengiz, c’est le nom du plus grand gisement pétrolier au monde en exploitation au Kazakhstan. Le « kukri » est un célèbre couteau népalais, arme régimentaire et héraldique des combattants de Gurkha (peuple dont l’origine sainte remonte au VIIIe siècle). Pourquoi ces explications ? Parce qu’une bande dessinée scénarisée par Tarek, si divertissante qu’elle soit, n’est jamais gratuite. L’auteur aime les personnages, réels ou imaginaires, il aime offrir à ses lecteurs plus qu’un loisir : une découverte. Pour sa 4e contribution à l’excellente collection Trilogies, il signe en compagnie de son ami Aurélien Morinière, une fresque historico-fantastique belle et dépaysante. Le cadre : les sommets himalayens. La trame : « Au commencement, il y avait un roi poète et une vaste terre où vivaient en harmonie des peuples différents. Hélas, la paix était une nouvelle fois menacée par des nomades [les éternelles invasions barbares] croyant à une bien funeste prophétie : un descendant de Güldomir le Borgne sera empereur cent et un jours… ». Une énième série d’Héroïc-Fantasy ? Point du tout. En fait, au terme d’un épisode d’exposition complexe car riche et animé (comme le sont nécessairement toutes les périodes de troubles et de révolutions), l’ensemble paraît encore se chercher. Les férus de 9e art penseront au Vent des dieux ; certaines scènes de batailles titanesques rappellent celles des Chroniques de la Lune noire ; enfin, la figure clé du mage capable de magie (blanche ou noire) surpuissante évoque le sage Merlin aux côtés d’Arthur. Bref, le récit singulier réclame toute votre attention. Car les nombreux protagonistes aux noms et faciès exotiques s’entremêlent aisément. Le trait d’Aurélien Morinière fin et esthétique pâtit en revanche d’une colorisation mâtinée « or », même si crépusculaire à souhait. En Orient, la vie forme un cycle, la liberté de l’homme est contrainte par sa destinée. Tout est déjà écrit. Reste à Tengiz à en triompher pour confirmer.