L'histoire :
Walter et Natalia ont quitté l'URSS au début des années 20, pour poursuivre leurs études d'art à Weimar, dans l'Allemagne appauvrie par l'immédiat après-guerre. Vassily Kandinsky est appelé à enseigner dans un nouvel institut, le Bauhaus, destiné à réunir les courants de l'art moderne et les attentes des artisans et constructeurs de biens manufacturés. Un objectif visionnaire au cœur duquel les deux amoureux vont pouvoir poursuivre leurs études et vivre leur idylle. Entre Walter l'américain et Natalia la révolutionnaire, les désaccords politiques sont nombreux, mais leur arrivée sur place va pour un temps déplacer leurs préoccupations. Walter Gropius, le directeur de l'institut, les accueille en leur annonçant leur rôle d'étudiants visionnaires chargés d'une nouvelle construction de l'avenir. Leur premier contact avec le maître artistique Itten les laisse pourtant entrevoir une sorte de gourou dont la vision doctrinaire va bien au-delà de l'art et exerce son influence jusqu'à la cuisine de la cantine... Alors que l'inflation fait rage et que des combats de rue ont lieu entre les militants communistes et les premiers soutiens d'Adolf Hitler, l'école elle-même voit se matérialiser des tensions entre des visions différentes et parfois extrêmes...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Après un premier voyage dans la naissance artistique de l'URSS, les auteurs nous emmènent en Allemagne, au cœur de ce qui fut un des mouvements artistiques les plus marquants du siècle dernier, le Bauhaus. Le scénariste Jack Manini nous plonge avec de nombreux détails et une foule de personnages historiques, dans le quotidien des luttes d'influence qui ont traversé cette institution novatrice. Le contexte historique de la république de Weimar et des premières étapes de la montée du nazisme est présent chaque fois que les personnages entrent en contact avec le quotidien. L'évolution de Walter et Natalia est alors le prétexte à une évocation de l'histoire du début du siècle, sous l'angle des visions artistiques. Les auteurs parviennent à créer un univers cohérent et équilibré autour de deux amoureux improbables et un peu naïfs. Le dessin d'Olivier Mangin, complété par les couleurs riches de Bérangère Marquebreucq, construit un univers dense sans être trop chargé. Les deux artistes se complètent parfaitement, comme dans les jeux de lumière de la baignade dans l'étang de la page 16. Si aucun personnage ne ressort vraiment par une personnalité au dessus du lot, le propos de ce triptyque est de toute évidence sa trame historique. On découvre alors avec plaisir une forme d'envers du décor, dans l'attente d'une montée des tensions dans le tome de clôture qui se déroulera à Berlin, dans les années 30.