L'histoire :
Dans un futur lointain et indéfini… Afin de préserver la paix, l’Union Galactique des Fonctions Segmentées a réparti l’humanité sur 7 systèmes planétaires complémentaires. En fonction des traits de caractère qui définissent le mieux votre personnalité à l’âge de 6 ans, 7 sages immortels vous envoient ainsi vivre soit sur : Stakan (planète du travail, de la production de biens, de services, de l’agriculture), Lexipolis (secteur de l’ordre, police, justice, administration), Muse (secteur de la créativité, des arts, de la culture, des sciences), Psyche (secteur de la spiritualité, religions, sectes, philosophie), Voluptide (secteur de la jouissance : sexe, drogues et jeux), Mercante (secteur du commerce, de la finance et des banques) ou Neo-Sparte (secteur de la guerre et des conquêtes extérieures à lUnion). Un grain de sable se profile néanmoins dans cette organisation : une épidémie de stérilité. Dans ce contexte inquiétant, le jeune Loth passe son test d’Armaguedon. Son profil bi-fonctionnel, allié à une incroyable insolence, lui vaut une affectation sur Neo-Sparte. 14 ans plus tard, après avoir suivi une formation adéquate, il est l’heure pour lui de rejoindre sa navette pour le grand départ. Mais il s’endort dans les bras de sa fiancée et se réveille super en retard. Alors qu’il file pied au plancher à bord de son véhicule, il est intercepté par les droïdes patrouilleurs, en super infraction d’excès de vitesse. Il est arrêté et emprisonné pour désertion et outrage. Lors de son jugement, les juges ont accès à son profil sulfureux… Ils le condamnent avec une sévérité « exemplaire » à 40 années de relégation génétique…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
En bandes dessinées, Richard Malka empruntait jusqu’ici le créneau de l’humour politique (La face karchée de Sarkozy) ou du thriller juridique (L’ordre Cicéron, Section financière). Rien d’étonnant, quand on sait que son premier métier est avocat et qu’en la matière, il a du pain sur la planche en cet automne 2011 (il s’occupe de DSK et de Charlie Hebdo…). Aurait-il eu soudainement envie de se frotter à un récit « de genre » en écrivant, en l’occurrence, un space opéra ? En tous cas, l’organisation « civilisationnelle » qui sert de contexte à Segments est avant tout le fruit de réflexions anthropologiques, philosophiques et sociales poussées. Elles s’inspirent à la fois de divers travaux psycho-sociaux (Jung, Dumezil, Myers et Briggs), mais aussi de récentes propositions de loi (le fichage dès le plus jeune âge) ou de tendances biologiques inquiétantes (l’accroissement de la stérilité chez l’homme est déjà une réalité). Organisé en 7 systèmes planétaires, comme autant de tendances caractérielles humaines (et de péchés capitaux ?), le contexte d’anticipation est effectivement très intéressant, quoiqu’en proie à une problématique de taille : l’extinction annoncée de l’humanité. A l’aune d’un remède pétri de bon sens, Loth, un jeune rebelle, bouleverse cette belle organisation… Le scénario de Malka résulte d’une longue maturation – il en a écrit une première version à l’âge de 27 ans – et de réflexions palpitantes sur la destiné de l’homme, ses passions, ses travers, les solutions d’avenir qui s’offrent à lui… Le ton s’inspire vaguement des œuvres de Jodorowski, par le pragmatisme de sa narration. Ou peut-être est-ce une impression due à l’écriture graphique qu’en a faite Juan Gimenez (dessinateur de la Caste des méta-barons aux côtés de Jodo). Ce dessinateur rompu à la science-fiction n’a pas à forcer son talent pour livrer des vues dantesques de cet avenir peu enviable, imprégné de nouvelles technologies et d’un gigantisme de bon aloi. Cette série dotée d’un fort potentiel renouvelle enfin un genre particulièrement délaissé, ces derniers temps…
