L'histoire :
Au milieu des années 1860, la construction de la première ligne de chemin de fer transcontinentale arrive à son terme. Derrière ce projet colossal, côté Ouest, il y a le magnat et ancien gouverneur de Californie, Leland Stanford. C’est un homme connu pour sa voracité en affaires, qui ne vit que par et pour ses chevaux – qu’il garde près de lui dans son manoir de California Hill. Un beau jour, son partenaire et rival, Mr Durant, lui fait part de la question qui agite les milieux hippiques de l’époque : est-ce qu’un cheval lancé au galop garde, ou non, toujours un sabot en contact avec le sol ? Les deux hommes d’affaires se lancent alors un pari insensé : celui qui parviendra à répondre à cette question et à le prouver gagnera 10 % de l’entreprise de l’autre. Galvanisé par ce nouveau défi et farouchement décidé à battre à pleine couture son rival, Stanford prend attache avec Eadweard Muybridge, un photographe talentueux mais psychologiquement instable. Avec les moyens quasi illimités offerts par Stanford, Muybridge entreprend donc de photographier, un à un, les mouvements d’un cheval au galop, qu’importe que la technologie du moment ne le permette pas encore. Petit-à-petit, débute ainsi une collaboration funeste où se rencontrent avidité et démesure, mais qui révolutionnera la photographie et posera les bases du cinéma…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Parfois, les belles inventions comme le cinéma ne naissent pas toujours du fait d’une noble cause ! Et c’est à partir de ce constat-là que le scénariste Laurent-Frédéric Bollée reprend l’expérience menée par Eadweard Muybridge, engagé par le richissime Leland Stanford, pour capturer le mouvement des chevaux au galop… Expérience qui a posé les bases du cinéma avec l’invention du zoopraxiscope dès 1880. En effet, LF Bollée développe son récit au travers de la volonté de Stanford de prouver scientifiquement son intuition, quitte à miser de l’argent et utiliser tous les moyens possibles pour parvenir à ses fins. Le récit met aussi en avant l’aspect obsessionnel et imprévisible d’Eadweard Muybridge afin de renforcer l’idée de folie et de démesure qui animent les deux compères, unis pour le meilleur et même pour le pire. De son côté, le dessinateur Georges Van Linthout délivre des traits fins et superbement travaillés qui permettent une lecture fluide. On sent que l’artiste a fait des recherches historiques pour proposer des dessins qui collent à merveille à la technologie et les décors de l’époque. Du bel ouvrage ! En fin de compte, voilà une bande-dessinée sympathique qui, sous des aspects romancés, revient sur les travaux de Muybridge. Mine de rien on comprend mieux comment son travail a révolutionné la perception du mouvement et inspiré les précurseurs du cinéma, à l’instar des frères Lumière.
