L'histoire :
Sur les terres enneigées de Savernaïa, au milieu de bâtiments presque tous désaffectés, il ne reste qu'une patrouille de militaires et un ours blanc intrigué par leur jeep. Affecté à la surveillance de l'archipel de la Nouvelle Zemble, qui fut le terrain d'expériences nucléaires soviétiques dans les années 60 à 90, le petit groupe trompe son ennui par des blagues de potache et de l'alcool bon marché. La plus jeune recrue du groupe sert de sujet de moquerie à la troupe, lors des sorties en extérieur ou lors des retours dans les bâtiments. Mais lorsqu'un soir d'ennui, un appel à peine audible crépite à la radio, c'est le jeune Durak qui en comprend l'importance en premier. Le sergent Voronine prend le relais et confirme qu'il s'agit d'un appel au secours, en provenance de la station 16. Le problème est que cette station a été abandonnée à la mort de Staline, il y a un demi-siècle de cela. Rien ne permet d'accréditer la véracité du message, mais une reconnaissance s'impose. Le lendemain, le sergent et sa patrouille embarquent à bord d'un hélicoptère pour une mission de routine a priori de courte durée. Sans grande surprise, à leur arrivée sur place, ils découvrent des bâtiments déserts, des paysages glacés, des pièces vides ornées de vieux portraits de Staline abandonnés sur place. Mais au moment où ils s'apprêtent à remonter à bord de l'hélico, un phénomène surprenant se produit...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Le duo familial Hermann, père et fils, est de retour pour un récit plein de suspense et magnifiquement illustré, qui devrait faire oublier le récent Retour au Congo. Le pitch initial de la station militaire, terrain d'essais nucléaires, abandonnée par l'URSS, est suffisamment accrocheur pour s'accommoder d'une intrigue simple mais prenante. Yves H a bien construit sa progression, nous amenant par étape vers une montée de la violence et d'une certaine forme de folie sur cette île a priori déserte. Centré autour d'un petit groupe de militaires, puisant dans le sentiment d'isolement qui s'empare d'eux face aux phénomènes dont ils vont être les témoins, l'album est addictif, servi par des dialogues sans fioriture, appropriés. Le travail d'Hermann au dessin et aux couleurs est une nouvelle fois épatant, que ce soit sous les tempêtes de neige ou en pleine aurore boréale. C'est toujours un bonheur de découvrir une nouvelle facette du travail de cet artiste exigeant, intransigeant avec lui-même, qui déploie son art avec une constante excellence. Il faut aller voir sur Youtube® les vidéos mises en ligne sous le nom hermannhuppencom pour réaliser comment l'artiste réalise par petites touches des cases aux couleurs lumineuses, uniques. Hermann est par ailleurs un des rares dessinateurs « à gueules », c'est à dire dont le style des personnages ou des paysages montre une patte aussi reconnaissable. Dans la lignée de François Boucq ou de Jean Giraud himself, il trace sa route avec constance, renouvelant sans cesse ses approfondissements techniques, mais reproduisant toujours sa vision personnelle d'un visage d'homme. Même le sommier en métal d'un lit de camp a une « gueule à la Hermann » ! Ce nouvel album sera donc un plaisir retrouvé pour les fans, sans grande surprise, mais très bien réalisé.