L'histoire :
Dans le futur proche, Aldis, étudiant en psycho, ressent des bouffées d’empathie avec les autres, lorsque leurs émotions sont borderline : il pressent les bagarres, les suicides… Lorsqu’il est trop puissant, ce bouillonnement intérieur le pousse à extérioriser sa rage avec une force inouïe : il explose une bouteille de coca en verre ou défonce un container en acier… sans le moindre bobo. Il en parle au psychiatre qui le suit régulièrement, le célèbre docteur Laplante. Celui-ci lui fait passer un scan cérébral. Les résultats révèlent qu’il a un cerveau hors du commun, avec une communication neuronale exceptionnelle, qui le classe parmi les « autistes de haut niveau », ou souffrant du syndrome d’Asperger. Laplante est bien placé pour comprendre son patrimoine génétique : il a jadis bien connu ses parents. A l’époque, son père Darren était mort subitement, très jeune, juste après avoir enfanté sa mère… de triplés ! Aujourd’hui, Aldis se sent notamment en empathie avec le médiatique Razal, une sorte de gourou politique qui prône la révolution sociale. Il ignore encore qu’en marge de ses talents d’orateur, Razal dispose lui aussi de capacités psy hors du commun…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Dans ce second opus, l’auteur David Sala entretient savamment les énigmes posées au premier tome, en révélant juste quelques infos sur la pathologie dont souffre le héros, ainsi que son hérédité. Pour rappel, Aldis perçoit la souffrance et la rage intérieure d’autrui et il en est psychologiquement perturbé, au point de devoir la reporter violemment ailleurs. Si les « autistes de haut niveau » et le syndrome d’Asperger existent bel et bien et suscitent la curiosité des chercheurs, les pouvoirs psy ici mis en scène sont largement exacerbés. A l’instar du propos d’Akira, le chef d’œuvre d’Otomo, on sent planer l’ombre de l’expérience génétique et psychique qui a mal tourné et qui découle progressivement sur des conséquences démesurées. Celles-ci trouvent d’ailleurs également un singulier écho dans la révolte sociale ambiante. Plus opportuniste, cette société borderline se personnalise d’une part en Razal, sorte de gourou à la fois charismatique et dangereux (l’énigme perdure quant à son origine…), et se conclue d’autre part à travers un succédané du drame de l’université de Columbia (deux étudiants font un carnage au fusil à pompe). S’appuyant sur des teintes culottées – voire saturées – des effets infographiques en pagaille et un trait acéré, le dessin moderne aura du mal à séduire les amateurs de « BD classique ». Il est pourtant de très haut niveau, régulier et précis dans tous les domaines, montrant une parfaite maîtrise des proportions, des cadrages, des angles de prises de vues, avec une finesse dans les détails appréciable. Cet excellent thriller fantastique d’anticipation conserve le gros de ses mystères pour le prochain (et dernier ?) tome…