L'histoire :
Dans les prairies avoisinant la riche et prospère cité de Troie, le temps est venu de tondre les moutons. A cette tâche, beaucoup d’hommes participent, dont Hector, le fils du roi Priam. Soudain, l’alerte est donnée : ordre à tous les guerriers valides de s’armer, car une flotte importante de navires approche par le sud. Le prince rejoint alors en hâte la tête d’une escouade de chars et gagne la baie. Déjà sur la plage, l’armée est amassée et accueille froidement les visiteurs. Un homme magnifiquement vêtu salue ses amis qui visiblement l’ont tous oublié : Pâris, prince de Troie. Il ramène avec lui les trésors de Sidon et d’Egypte. Les retrouvailles sont si heureuses que ce retour n’était plus espéré. Cependant, le véritable joyau de l’expédition n’est point d’argent mais de chair, car le jeune écervelé rapporte aussi dans ses bagages Hélène, l’épouse du roi Ménélas. Une offense impardonnable qui ne semble pas ravir Priam. Pâris a échoué dans sa mission et violé la concorde avec les Achéens. Du moins sera-t-il possible de réparer l’affront en échangeant la belle contre Hésioné, parente du roi autrefois enlevé par Hercule…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Chante, ô Muse, la colère du divin Achille ! Comment, venue de Grèce, l'armée des Achéens conduite par l'Atride Agamemnon, mit le siège sous les murs de Troie, la fière cité du roi Priam. Comment Pâris, adoré d'Aphrodite, enlevant Hélène aux bras blancs, provoqua une guerre si fameuse que la joute d'Hector et du fils de Pélée continue de faire rêver. Le colossal projet d'Eric Shanower n'est encore qu'une esquisse (2 tomes parus sur 7 prévus), mais sa réalisation impressionne déjà. Le scénario tant de fois réécrit présente pourtant ici une saveur incomparable. Une documentation scrupuleuse, une fidélité à la légende et aux sources (écrites et archéologiques) parfaite, et cependant... une narration impeccable ! Bref, la profondeur de récit et d'analyse ne gêne en rien la représentation théâtrale donnée par nos héros. De surcroît, la tension omniprésente engendre une intensité rarement atteinte en bande dessinée lors du sacrifice d’Iphigénie par son père. Le trait classique, sculptural, et le choix (judicieux !) du noir et blanc, suggèrent une affinité de prestige (!) avec le Grand Pouvoir du Chinkel (Van Hamme, Rosinski), c'est dire... Valérie Mangin a choisi de transposer dans l'espace, le combat entre les Huns d'Attila et la Rome antique : un « space-opéra » audacieux (et réussi) qui lui permet néanmoins de prendre des libertés avec l'Histoire. Dufaux et Delaby (Murena) ont dressé un portrait au vitriol de l’empereur Néron. Eric Shanower fait (beaucoup ?) plus fort encore : il rejoint le mythe. LA référence en matière d'épopée antique. Seul bémol, paradoxalement : qu'après cette interprétation magistrale de l'Iliade et ses alentours, une autre version des chants homériques ne paraisse presque sacrilège...