L'histoire :
Être heureux ne signifie pas forcément avoir tout dans sa vie. Riley Richards en est la preuve la plus flagrante. Il a une épouse divinement sexy, des amis qui l'adorent et de l'argent. Il a certes contracté quelques dettes ici et là et a aussi appris que sa femme le trompait avec un type originaire de Brookview, sa ville natale. Cela fait un moment qu'il ne s'y est pas rendu, d'ailleurs et c'est à l'occasion de l'hospitalisation de son père qu'il y retourne. Il recroise là-bas Lizzie Gordon, une amie d'enfance avec qui il est sorti très jeune et avec qui il est toujours en très bons termes, mais aussi Déglingue, le type avec qui il a fait les 400 coups et qui vient de fêter sa première année de sevrage à une quelconque drogue. Riley prend plaisir à les revoir mais le lendemain de son arrivée, alors qu'il n'a vu son père que brièvement la veille, il apprend son décès. Son épouse le rejoint le lendemain pour les obsèques. Alors qu'il est dans la ville de son enfance, Riley se remémore son passé et regrette le chemin qu'a pris sa vie. Il s'imagine même ce qu'elle aurait pu être sans cette femme vénéneuse et infidèle...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Ed Brubaker fait partie des scénaristes dont le talent nous illumine régulièrement au travers d’œuvres majeures aux approches variées. Capable de nous passionner pour le destin de Captain America ou de nous intriguer avec des polars au suspense parfaitement huilé, cet auteur parvient toujours à son but : nous divertir ! Avec sa série Criminal, il livre depuis déjà plusieurs albums un magnifique hommage aux polars noirs. Chaque album se lit indépendamment et possède quelques subtiles ramifications avec des personnages communs. Dans ce sixième opus, le scénariste focalise sur Riley Richards, un type assez normal qui a cependant eu beaucoup de chance dans sa vie. Il a des amis fidèles depuis son plus jeune âge, une épouse juste sublime et son beau-père a fait de lui le vice-président d'une société florissante. Pas de quoi être malheureux à première vue. Mais Riley apprend par hasard que sa femme le trompe avec un type qu'il déteste plus que tout et lorsqu'en plus son père meurt, l'envie de changer radicalement de vie prend place dans son esprit. Une solution germe alors, simple et difficile à la fois : la tuer ! Brubaker livre avec Le dernier des innocents un classique moderne du genre, comme seuls lui et Christian de Metter peuvent en proposer. Ses personnages bénéficient d'une psychologie solide et travaillée, la montée en puissance de la sombre machination de Riley est trépidante et l'on ne décroche pas une seconde avant que la dernière page ne soit tournée. Sean Phillips est lui aussi au sommet de son art avec deux approches visuelles différentes, l'une réaliste, sombre et à la limite du glauque lors des scènes actuelles et une autre plus colorée, pour présenter les séquences issues du passé des protagonistes. Il y a de quoi rester pantois devant le talent de ces deux auteurs, qui réussissent sans mal à se renouveler dans le genre, volet après volet. Criminal se présentait comme une lecture excellente dès son premier album, elle est aujourd'hui proprement indispensable à toute bibliothèque qui se respecte. Et dire qu'après Sleeper, Incognito et Criminal, le duo revient prochainement pour un nouveau concept intitulé Fatale (chez Delcourt !), il n'y a plus qu'à ronger son frein pour encaisser le genre de baffe que l'on aime prendre...