L'histoire :
Dans les arcanes du British Museum, en 1910, Thomas Carnacki, détective spécialiste de l’étrange, est assailli par des cauchemars et des visions mêlant ésotérisme et apocalypse. Il y est question « d’un enfant de lune », mystérieux objet susceptible de faire plonger le monde dans l’âge des ténèbres. Réveillé en sursaut, les autres membres de la Ligue des Gentlemen Extraordinaires le rejoignent : Mina Murray, Quatermain junior, A.J. Raffles, et Orlando. Ces rêves prémonitoires inquiètent la fine équipe remobilisée à l’occasion par Miss Murray. Les services secrets anglais, en la personne de Mycroft Holmes, confient une nouvelle mission à la ligue : retrouver le gourou de la secte occulte dont à rêvé Carnacki, et l’empêcher de mettre en œuvre son plan diabolique : anéantir l’humanité…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Si les membres de la Ligue ont changé, la mission reste identique : s’opposer au chaos et sauver la planète de ses pulsions destructrices. Le lecteur aura la joie de retrouver Mina Murray (héroïne de Dracula) et de découvrir de nouvelles têtes : Quatermain Junior, le fils de l’aventurier Allan Quatermain (Les mines du roi Salomon), Anthony Raffles, le voleur gentleman, Carnacki, le spécialiste des sciences occultes et cosmiques sans oublier Némo et sa filiation. Jack l’Eventreur, le célèbre meurtrier de Whitechapel, y est aussi évoqué (A. Moore a longtemps étudié le problème dans From Hell). Dotés chacun d’une spécialité, ces héros issus de la littérature populaire anglaise vont unir leurs compétences au service d’un idéal transcendant : la paix mondiale. En 1910, dans une Angleterre moribonde rongée par la pauvreté, l’alcoolisme et la luxure, Alan Moore invite ses personnages à maintenir à flots une morale dont l’universalité des valeurs s’est peu à peu dissipée dans des plaisirs éphémères, inutiles et déshumanisants. L’auteur se singularise une nouvelle fois par la création originale d’un univers « fin de monde », violent, implacable, où la sombre banalité du quotidien cède la place à une probable et salvatrice apocalypse, dernier sursaut d’une humanité plongée dans ses excès. Dans ce chaos menaçant et finalement cauchemardesque, nos héros se révèlent le plus souvent impuissants, jouets de forces obscures qui les dépassent. Comparés aux épisodes précédents, les personnages semblent ici privés de panache et loin de galoper vers une paix rédemptrice, ils trottent ou marchent au pas, le plus souvent. Dans cet épisode, le manque d’épaisseur et l’absence d’éclat caractérisent des personnages, il faut le reconnaître, moins charismatiques que l’homme invisible ou Némo. Malgré tout, le scénario « made by » Alan Moore et la narration parfois teintés de poésie et de lyrisme, restent de haute tenue, servis par des dessins classiques, tout en lignes droites, signés Kevin O’Neill. Un album bien sûr conseillé, comme tous ceux d’Alan Moore.