L'histoire :
Nathan a 48 heures de retard sur le coup de feu. C'était dans une petite rue écartée de Walnut Creek, à l'Est de la baie. Les journaux d'Oakland et de Frisco en ont pas mal parlé. Mais Nathan ne savait pas à ce moment-là. Il ne pouvait pas être au courant, il était à L.A. Il n'avait aucune raison de regarder la presse de San Francisco et si on devait accorder de l'importance à chaque fois qu'un type se fait buter en pleine rue... Ok, là c'était une jeune femme qui avait fait péter le caisson du gars. A visage découvert. Et en plein lotissement. Mais Nathan ne pouvait pas savoir, en réalité il était en train de se ranger des affaires. Les messages s'entassaient sur son répondeur et depuis le début de l'année, il les avait effacés consciencieusement, l'un derrière l'autre. Il prenait sa planche et passait toute la journée sur la plage. Cela faisait à peu près un an qu'il vivait au Motel Surf Inn. Il n'avait pas prévu de rester si longtemps mais il était à deux rues de la plage… Et ce soir, en rentrant, il reconnut tout de suite Francis MacLean, un type à qui il en devait une. Un type avec qui il avait traîné un moment. Alors, quand il est venu lui demander de l'aide, il savait qu'il ne pourrait pas refuser. Une histoire de nana disparue, à San Francisco…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Ed Brubaker le dit lui-même dans la postface de cet album, si on peut lire chaque volume de la série comme un one-shot, ce cinquième volume peut se rattacher au précédent, Ce fantôme en toi, dans une forme de petit arc qui mettrait totalement en avant une figure féminine et non plus Nathan. En effet, une nouvelle fois, c'est une femme qui tient le haut de l'affiche, c'est une femme qui est le/la personnage principal-e du récit. On ne peut pas vous dévoiler son histoire, il n'est pas question de piétiner le chemin narratif choisi par le scénariste, mais ce qu'on peut vous dire, c'est que le portrait de Rachel est de ceux qui restent en mémoire. On le sait, l'auteur excelle dans l'utilisation des stéréotypes du polar et là, on coche toutes les cases. Une enquête et une cavale, des flashbacks et des rebondissements, l'âpreté à toutes les pages, avec un bonhomme désabusé que la rage pousse à l'extrême violence. Mais tout cela est dans l'ombre de Rachel, tout tient autour d'elle. Et tout se casse la gueule autour de Rachel. Sean Phillips nous embarque, comme d'habitude, dans les travées de l'Amérique des déjantés des années 90. Alors si ce volume épouse les apparences d'un road-movie sanglant au rythme parfaitement maîtrisé, c'est aussi une histoire qui dénonce la violence faite aux femmes. Sean Phillips est un as quand il faut poser de l'action et c'est un maître quand il dresse des portraits. Il est accompagné de son fils, Jacob, qui se charge des couleurs depuis le début de la série et qui peut se targuer de se faire un prénom, car son boulot est rudement bien fait. Là aussi c'est un carton plein graphique, ses déclinaisons de couleurs sont tout simplement parfaites, scène après scène, de la plage au motel crasseux de nuit, les déclinaisons chromatiques nous emmènent aussi, au delà des décors, au plus profond des personnages. Un titre qui porte bien son nom, une vraie descente aux enfers…
