L'histoire :
Nous sommes 48 heures avant la fin, devant le couvent Magdalen à Baker Street. Le clerc frappe à la porte. Le père Barberini, envoyé spécial de sa Sainteté, est venu aux nouvelles, et se détendre par la même occasion. C’est que l’homme est pieu mais rustre surtout et aime les plaisirs de la chaire. Les sœurs qui l’accueillent devront le satisfaire cette nuit sous peine d’excommunication… Ailleurs, en sous-sol, la princesse Vicky chemine à bord du Clytemnestre, le métro privé royal, vers une réunion à laquelle elle a été « cordialement » invitée. Gagnant un quartier mal famé de la capitale, elle pénètre une salle à son comble. Là, une foule du commun s’est rassemblée pour écouter le prêche fiévreux d’un certain Gabriel Shelley. L’homme a du bagout, du charisme et ses mots claquent ! Socialisation, solidarité, humanité ! Nos fondations seront l’amour ! Voilà résumé son discours, révolutionnaire et séditieux par essence. La foule est conquise, la princesse troublée. Quand une bande de crânes rasés acquis à l’Empire fait irruption. Le fer blanc vole, les armes parlent et le sang coule. Hiram, reporter, et Angie son amie sont présents aussi. Vicky, d’un geste réflexe, défenestre un grenadier qui menaçait de tout faire sauter. La belle a attiré l’attention sur elle, celle de Gabriel bien sûr…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
En quatrième de couverture figure un « appel au civisme artistique », un brûlot de fait propagandiste à la gloire de l’Empire. L’article fait état de qualités réclamées : origines, discipline, perversité, talent et dévotion totale. Décalées les Aventures de Luther Arkwright l’étaient déjà, Au cœur de l’Empire l’est plus encore, plus virulent, plus retors, plus corrosif. Cette suite rock’n’roll et adulte – certaines scènes d’ébats sexuels ne sont pas à mettre entre de trop jeunes et/ou chastes mains – de l’héritage de l’extraordinaire voyageur confirme tout le bien que l’on pouvait escompter, choquante et prenante à la fois. Point besoin non plus cette fois de faire ses devoirs de relecture, on entre en ce deuxième tome comme dans du beurre… Et l’on y reste jusqu’à la dernière page ! Outre qu’y figure une explication « compréhensible » (p. 82) des différents parallèles composant l’univers d’Arkwright, la narration interdimensionnelle s’avère sage et le lecteur ne risque pas de se perdre – comme cela a pu être le cas précédemment. Dans les pas de la belle Vicky, on avance à grands pas vers « la Fin ». Bryan Talbot nous épargne des développements trop fumeux mais ne s’interdit rien. Il prend plaisir à transgresser tous les tabous sociétaux et sa jouissance s’avère communicative. Cet ovni fantasmatique fascine vraiment comme seuls quelques comics savent le faire – comme Transmetropolitan signé Warren Ellis. Avouez qu’il a pire ? Grandiloquent, pornographique, ultraviolent, purulent, visionnaire (!), Au cœur de l’Empire est tout cela à la fois et quantité d’autres qualificatifs encore…