L'histoire :
Rome, parallèle 00.72.87, sept jours avant la fin. En son appartement rue Bottoni, un moine prend du bon temps, écoutant « la force du destin » composée par G. Verdi. Au mur, des peintures abîmées figurant des scènes bibliques décorent une pièce austère. Puis vient l’orgasme, car en fait de plaisir, c’est celui de la chair, dispensé par une sœur sous sa soutane, que le moine appréciait. Une apposition des mains sur le front de la pécheresse et voici qu’elle en oublie la fellation pour donner au moine une missive, objet premier de sa visite. Après en avoir pris connaissance, le moine gagne le Vatican où il est reçu par sa sainteté demeurée alitée dans sa chambre. Le moine Barberini traîne au Vatican une sombre réputation doublée d’une puanteur sans nom ! Cependant, pour le Saint Père à l’article de la mort, il est un serviteur dévoué. Il le charge de trouver l’impératrice de l’Empire britannique, ce joyau de la chrétienté gouvernant le monde, pour, muni du sceau papal, l’enjoindre en bonne catholique de jurer obéissance à Rome, ou mieux, d’abdiquer en sa faveur ! Mission délicate et périlleuse que celle-ci, car à Londres, si quelques séditieux prospèrent et prêchent l’insurrection au nom de la Liberté, sa Majesté la reine, amante de feu Luther Arkwright dont elle a eu une fille belle et rebelle, règne avec une main de fer…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Faut-il avoir lu le magistral « pavé » intitulé les Aventures de Luther Arkwright pour commencer la lecture d’Au cœur de l’Empire ? Sans doute vaut-il mieux. Question de repères et de références incessantes (notamment la légende du défunt héros et père « indirect » de l’Empire). Cependant, cette suite signée du même Bryan Talbot présente bien des différences et qualités intrinsèques qui peuvent séduire l’audacieux et curieux néophyte. Moins bavard, plus « moderne » (en couleurs), découpé plus précisément en fonction des scènes, L’héritage de Luther Arkwright offre un côté « new wave », patchwork, rassemblant toutes les époques, tous les styles. En bande dessinée franco-belge on pense aux Eaux de Mortelune, plus récemment à Hand ; en comics, le décompte adopté (sur une semaine et non en heures) rappelle bien sûr Watchmen. Néanmoins, multiplier les références serait injuste et… inutile. Car l’univers développé par Bryan Talbot est si riche et particulier (que de protagonistes, de théâtres d’action) qu’il faut s’y aventurer pour le situer. Le graphisme ne séduira peut-être pas tout le monde (sans rebuter non plus, d’autant que le trait est soigné et juste) mais l’intérêt premier réside dans un scénario, vous l’aurez compris, ingénieux. Point trop complexe mais très ouvert, avec une héroïne et fille de l’idole au caractère bien trempé : rebelle et intelligente, dotée d’un pouvoir encore incertain, de ces femmes qui vous subjuguent et… intriguent. A suivre.
