interview Bande dessinée

Fred

©Dargaud édition 2010

Fred, de son vrai nom Fred Othon Aristidès, est un des plus grands poêtes de la BD franco-belge. Sa carrière a explosé dans les années 60, avec en autre la série Philémon. Il a été plusieurs fois récompensé au festival d'Angoulême (dont un Alph'art en 1994, pour L'Histoire du corbac aux baskets). Avec 15 albums à son actif, il devrait vraissemblablement livrer un dernier Philémon très attendu. Nous l'avons rencontré au festival d'Angoulême 2009.

Réalisée en lien avec l'album Philémon T14
Lieu de l'interview : Angoulême

interview menée
par
10 janvier 2010

Bonjour Fred ! Comment ça va ?
Fred : Ben ça va ! Ça va mieux même, j’ai eu quelques problèmes de santé au printemps. On m’a ouvert le cœur puis on l’a refermé. Depuis, je me ballade avec une canne. Mais enfin, ça va mieux, je reprends bien.

Avez-vous un projet d’album en cours ?
Fred : En fait, ça fait plusieurs années que j’ai un album de Philémon en cours. J’ai déjà fait les 28 premières pages et là, maintenant que je vais mieux au niveau santé, j’ai décidé de m’y consacrer sur l’année 2009, pour une sortie prévue – si tout va bien, bien sûr – début ou courant 2010.

Comment construisez-vous un album de bande dessinée ?
Fred : Généralement, l’histoire, je la découvre page par page au fur et mesure que j’avance dans l’album. Je n’aime pas vraiment connaître l’histoire à l’avance. Sinon, on a l’impression de faire un devoir. A la longue, cela devient ennuyeux. Quand je me mets à la table à dessins, évidemment j’ai une trame… mais avec l’expérience, je laisse se développer les choses. Il faut garder de la spontanéité. Et lorsque je reviens sur les albums précédents de Philémon, je suis toujours épaté, car j’ai l’impression que ça n’est pas moi qui les ai faits. Ce n’est pas prétentieux quand je dis ça, c’est juste que je ne sais pas si je pourrais refaire aussi bien.

Pourquoi avoir interrompu, il y a quelques années, le dernier album de Philémon ?
Fred : Dans le cas présent, je ne voulais pas être esclave du personnage. J’avais envie de faire des histoires avec des personnages qui ne servaient qu’une seule fois. J’ai fait le Corbac aux baskets et d’autres albums coup sur coup et ça m’a pris 7 à 8 ans. En moyenne, il me faut un an et demi pour faire un album. Ça prend donc du temps… Mais là, l’envie de reprendre Philémon m’est revenue, donc c’est reparti pour un tour.

Etes- vous beaucoup sollicité pour le travail ?
Fred : On me propose toujours de participer à pas mal de choses : des expositions, de l’écriture… J’écris beaucoup pour la télé, le cinéma. Là, je vais me cacher un peu, sinon je ne pourrai pas me consacrer à fond dans l’album de Philémon.

Fred, pouvez-vous nous donner une ou deux techniques sur votre façon de travailler ?
Fred : Je prends des notes, des idées qui me viennent et je les garde sur un bout de papier que j’accroche. Ça me permet d’y revenir dessus plus tard. Parfois, ça ne me sert jamais, mais l’idée est là et peut amener sur une autre idée. Plus on a d’idées et plus on en a. Moi je raisonne comme ça. J’aime le côté spectacle dans une bande dessinée, c’est pour ça que j’utilise toutes les possibilités graphiques en dessin : passer derrière une case, faire bouger les cases. Je ne fais pas ça pour épater, il faut que cela serve l’histoire. J’utilise des documents, des gravures, mais uniquement au service de l’histoire. Quand je travaille sur un album, je n’ouvre jamais la fenêtre de mon bureau, j’ai peur que les idées s’envolent. On ne sait jamais, elles pourraient arriver chez un concurrent…

Comment en êtes-vous arrivé à la bande dessinée ?
Fred : J’ai toujours dessiné. Je me souviens, j’ai commencé vers l’âge de 10 ans et depuis, je ne me suis pas arrêté. J’avais un copain d’école dont le père gardait l’immeuble, pendant la guerre, des locaux de l’imprimeur OPERA MUNDI. Une fois, il m’a emmené dans les étages des bureaux et là, j’ai découvert plein de revues de Mickey, hop-là, Mandrake. Je les ai lu, lu, relu et rerelu 25 000 fois. C’est là que je me suis mis à dessiner. Au début, je ne pensais pas du tout en faire mon métier. J’ai fait beaucoup de dessins d’humour, du dessin de presse pendant 10 ans. Alors, en revanche, je ne fais pas de dessin sur l’actualité politique, ça n’est pas mon truc. Je suis incapable de le faire. J’ai des amis qui le font très bien, mais moi, ça ne m’intéresse pas du tout. Des gens comme Cabu, Wolinski, avec qui on a débuté dans Hara-Kiri, ensemble, le font fort bien. C’est une autre façon humoristique de voir les choses.

Merci Fred et à bientôt ! Bon courage pour le prochain Philémon !