L'histoire :
Nous sommes en 50 après Astérix et Obélix. Tous les personnages de la série s’apprêtent à célébrer cet évènement comme il se doit, c'est-à-dire en réunissant la documentation de 50 ans de succès, de parodies diverses et variés, de souvenirs… mais tout d’abord, étant donné que cette poignée d’irréductibles gaulois résiste encore et toujours aux flétrissures de l’âge, imaginons ce que serait ce petit village d’Armorique, si ses habitants avaient vieilli au rythme de leurs lecteurs. Barbe blonde, ventripotent, Astérix serait grand-père de famille nombreuse ; mal rasé et couettes grisonnantes, Obélix se morfondrait de la disparition totale des sangliers (les romains ont rasé la forêt pour y construire des cités) et les artisans du village auraient transmis leurs activités à leurs progénitures. Une grosse mandale d’Obélix, à un Uderzo contemporain de passage, remet les choses d’aplomb : il est définitivement nécessaire que les héros de BD ne vieillissent jamais…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Au cas où ça vous aurait échappé, Astérix et Obélix viennent d’avoir 50 ans ! Nés en 1959 dans le journal Pilote, le couple de gaulois s’est imposé dans la seconde moitié du XXe siècle comme des icônes du 9e art franco-belge et plus généralement symboles des gaulois-français résistants et fiers de l’être. Ce succès, dû essentiellement au monstrueux talent du scénariste René Goscinny, valut à la série un succès commercial colossal, qui lui permit de vendre des millions d’albums, traduits en des dizaines de langues, de dériver sur des dessins animés, des films, des tonnes de jeux et un chouette parc d’attraction. De quoi perdre pied, lui reprochent ses détracteurs ? Depuis quelques tomes, les héros s’égarent en effet dans des aventures d’une médiocrité croissante, jusqu’au paroxysme du précédent opus, tome 33 des Dieux sont tombés sur la tête, qui frisait en effet le n’importe quoi, en marge d’un propos de fond peu glorieux. Le flop critique et public fut tel, que ce tome 34 était attendu au tournant (et que l’éditeur a volontairement « oublié » de le promouvoir auprès de la critique : et toc !). Mais attention : il ne s’agit pas du tout d’une 34e aventure, au sens stricto-sensu du terme, mais bel et bien d’un recueil d’hommages, un catalogue de clins d’œil fourre-tout, sommairement reliés par des cases et des bulles. On y découvre des tableaux de maîtres parodiés, la reprise d’un faux catalogue de voyage paru dans les années 70 dans Pilote, une projection rigolote des personnages selon leur âge réel… Elémentaire, le synopsis global de l’« histoire » permet la nébulosité nécessaire à l’exercice : à l’occasion de l’anniversaire, les seconds couteaux de la série accumulent de la documentation. Du coup, ça a beau être leur fête, les deux héros sont relativement transparents. Evidemment, différents styles visuels cohabitent, à l’instar de la couverture clinquante – ce jubilé est sous-titré Livre d’or, tout comme les 50 ans de mariage sont baptisés « noces d’or ». Si on est initialement ravi de constater que le dessin d’Albert Uderzo n’a en rien perdu de son dynamisme, lors des passages en « vraie BD », on grimace plus volontiers devant les débauches d’infographie pleines pages (les tableaux…) qui n’ont que peu à voir avec le décorum habituel, respectueux des personnages (et des lecteurs). Un album collector à posséder pour terminer honorablement son étagère mais… aura-t-on droit, un jour prochain, à une vraie aventure ?