L'histoire :
Le sergent Paco a retrouvé My Linh, la très jeune femme indochinoise, survivante de la soirée de tuerie et de l'incendie du Bar de Paris, un bordel dans lequel se trouvent nombre de soldats dans la ville de Nha Trang. Il ignore qu'elle en est responsable, sous les ordres d'un groupe Viet Minh déterminé à chasser l'occupant français. Accompagnée de son amie Amalie, elle aussi prostituée dans le bar, mais absente le soir des meurtres, elle est prise en charge par le sergent amoureux. Avec l'accord entre autres de Daguet, le jeune ingénieur en charge du support technique au train, les deux femmes sont hébergées clandestinement dans un wagon de la Rafale. Le train blindé de la légion étrangère qui descend vers le sud, pour assurer notamment le ravitaillement de places fortes détenues par les colons, prend la route à vitesse lente. Alors que le convoi s'approche d'une zone de plateau couverte d'herbes hautes, les militaires s'apprêtent à se défendre contre une attaque, dans ces lieux propices aux embuscades. Mais au lieu d'un assaut en règle, ce sont seulement deux coups de feu qui viennent toucher mortellement un légionnaire du wagon de Paco et Daguet. Pris de panique, les soldats poussent les deux femmes à quitter le train et à s'enfuir dans la forêt proche. A la grande surprise d'Amalie, les compagnons d'armes de My Linh les y attendent...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Dense et pleine de suspense, la leçon d'histoire se poursuit dans ce deuxième volume passionnant au cœur de la guerre d'Indochine. Patrice Ordas poursuit le sillon de la BD historique, qu'il creuse également avec Ambulance 13. Avec la complicité du vieux routard de la BD qu'est Patrick Cothias, il construit un récit prenant et crédible, qui bénéficie indéniablement des trois tomes prévus pour raconter cette histoire de relations humaines fortes au sein d'un conflit sans pitié. On prend le temps nécessaire pour connaître les personnages, suivre leurs personnalités se révéler, comprendre l'évolution de leur vision des évènements. Ainsi, les révélations progressives sur le rôle de My-Linh sont un des axes forts de cette série, tout comme le rapprochement des points de vue de Daguet l'antimilitariste et de ses collègues légionnaires. Les conversations entre ces hommes dans l'attente d'un assaut Viet Minh sont justes et sensibles, tout en restant empreintes de la touche d'héroïsme propre aux récits de guerre. Le trait très classique de Winoc est parfait, dans un mode efficace et discret. Pas d'effets de manche, mais une mise en page au service du récit. Sur le plan politique, ce deuxième tome n'ira pas plus loin que le premier et ne prendra pas position. Pour savoir ce que pensent intimement Cothias et Ordas de ce conflit, il faudra utiliser d'autres sources que ces albums, qui se contentent de décrire les forces en présence avec une certaine neutralité. Si l'on y ajoute un dossier en fin d'album qui contient des documents photos et des textes écrits avec la Légion Etrangère, on peut dire que ce récit pourra rebuter ceux qui auraient préféré un angle franchement anticolonialiste. Ce n'est pas le propos de La Rafale, qui s'inscrit dans la tradition des grandes aventures humaines au cœur d'une Histoire complexe.