L'histoire :
Les rois de France et de Prusse ont envahi le minuscule royaume de Rurituanie, dans l’espoir chacun de s’emparer de la pierre philosophale. Ils ignorent alors que ce joyau est en réalité un tour de passe-passe : à son contact, le plomb ne reste doré que quelques secondes, après quoi il redevient plomb. Or, lors de la confrontation entre les deux armées, le bon roi Rudolphe de Rurituanie s’interpose et se prend une balle perdue dans la poitrine. Les médecins, qui le prennent aussitôt en charge, ne se prononcent pas sur ses chances de survie. Selon l’indignation de Maud qui les enguirlande, les rois de France et de Prusse sont un peu confus de la situation, mais ils restent rivaux avant tout. Maud et Guilhem sont agacés par cette insupportable guéguerre d’egos. C’est alors que Dimitri les interpelle : il lui semble connaître la mystérieuse femme qui accompagne et conseille le roi de France, Mme Onegin. Elle fait partie du Cercle – la conjuration occulte ennemie – et il entend bien le prouver ! Dans le même temps, Killian annonce que la pierre philosophale a été volée par Apollon, le frère d’Artémis. La nuit suivante, c’est le marquis von Theinburg qui tente d’accélérer la mort du roi Rudolphe, en le poignardant dans son sommeil ! Mais Killian avait pris la place du roi blessé et il coince von Theinburg, la main dans le sac !
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Les manigances mélodramatiques et fantasmagoriques de la conjuration « le Cercle » se poursuivent dans ce 16ème épisode, dans un XVIIIème siècle romancé à outrance et à la mesure des justiciers masqués aux grands cœurs, que sont la Rose Ecarlate et le Renard. Dans sa quête d’humanisme et de justice, Maud a d’ailleurs une grande révélation au début de cet album : plutôt que de mettre sa vie en danger sous le masque de la Rose Ecarlate, afin de piller les riches et d’aider les faibles, façon Robin des bois ou Zorro, elle a l’idée de parler au roi afin… qu’il rende le peuple heureux. Hé, pas bête ! Fallait y penser ! Wow, ça c’est de la géopolitique pointue. Des répliques culminent ainsi de nouveau dans le registre cul-cul-la-praline (« – Toi seule peux arrêter la guerre ici ! – Je… Oui tu as raison. » « Nous planterons des tulipes partout sur Terre, afin de faire un monde meilleur »). Cela dit, au milieu de cet amalgame conspirationniste et doucereux, Patricia Lyfoung parvient tout de même à glisser le mythe du bon sauvage (effectivement véhiculé au XVIIIème par les « Lumières » de Diderot, Rousseau…) et l’homme de Vitruve (de Léonard de Vinci). Peut-être de quoi éveiller la curiosité des plus jeunes, à qui se destine la série, toujours mélodieusement dessinée façon manga. Nonobstant, cet épisode boucle bien des intrigues et se révèle donc riche en révélations (il y avait besoin), sans pour autant mettre fin aux pérégrinations des héros. Ce qu’il y a de plus intéressant dans cette saga, c’est peut-être l’ambivalence genrée que cultive Patricia Lyfoung quant à la schizophrénie d’un personnage. Là où l’académisme romantique voudrait que les preux chevaliers sauvent toujours les belles princesses, il se trouve un androgyne pour tenter de séduire son gentil ennemi. Cette piste se poursuivra à l’automne 2020, avec une nouvelle destination pour nos héros : la Chine !