L'histoire :
Après avoir bataillé lors de la guerre d’indépendance américaine, Ulysse McHendricks est resté à Annapolis, afin de jouer du poing et poursuivre sa vie de débauche. Son fils Mack voyage jusqu’à lui pour l’avertir que sa ville de New Itakee, où est restée sa femme Penn, est occupée par les anglais. Aussitôt, Ulysse mobilise son « équipage » (ses fidèles) et met en route son étrange moyen de transport : une caravelle sur roues, tirée par 12 chevaux. En roulant à pleine vitesse, il espère arriver chez lui par un raccourci à travers le territoire Washita, en trois semaines. Cependant, en route, ils doivent composer avec les iroquois… Une shaman indienne invoque et fabrique un « wendigo » grand de trois mètres, puissant, hirsute, dentu et décharné, avec un œil blanc et unique tatoué sur le torse. Ce monstre attaque l’équipage d’Ulysse, en décime une partie et le prend en chasse. Sa force herculéenne lui permet même de venir à bout d’Ulysse. Ulysse se retrouve ainsi crucifié sur un arbre, les poignets transpercés. Et lorsque son fils Mack tente de le délivrer, ce dernier se retrouve enfermé avec les autres, dans une profonde cavité recouverte d’un énorme rocher. La force de caractère d’Ulysse lui permet toutefois de se délivrer tout seul et de se traîner dans la boue pour sortir de cet enfer. Il se fabrique des atèles pour ses bras et prépare minutieusement un plan pour tirer ses amis de là…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Comme l’indiquent les deux composantes de son titre, Ulysse 1781 propose de transposer l’univers mythologique de l’Odyssée d’Homère à l’époque de la guerre d’indépendance américaine. Ainsi le héros est une tête-brûlée, un aventurier-guerrier peu pressé de rentrer chez lui ; ainsi son fils s’appelle Mack (au lieu de Télémaque) et sa femme Penn (pour Pénélope) ; ainsi il voyage dans un vrai bateau, mais monté sur roues et tiré par une douzaine de chevaux ; ainsi la problématique de ce (premier ?) cycle, qui se termine avec ce tome 2, l’oppose à un Cyclope. Toutefois, afin de s’éloigner des exubérances de la mythologie grecque et coller aux fondamentaux d’un univers cartésien aux frontières du fantastique, le cyclope dont il est ici question n’est pas une brute avec un œil unique au milieu du front, mais un wendigo hominidé indien avec un œil blanc tatoué sur le torse. La dimension shamanique est déjà bien connue de Dorison, qui a fait du western un de ses « genres » de prédilection. Pour être précis, on évolue ici à mi-chemin entre WEST (pour le contexte) et Long John Silver (pour l’ambiance poisseuse). Etayé par la science narrative du scénariste, le grand spectacle a lieu, ponctué par des moments de pure tension, avec ce qu’il faut d’héroïsme ultra-dopé, mais grâce aussi et surtout au dessin expert d’Eric Herenguel. Alliage de réalisme et de dynamisme, ce dernier ne se prive pas de trognes caricaturales (et inquiétantes) sur des brutes aux gabarits improbables, qui rappellent que le dessinateur a un jour réalisé la débridée saga de Krän. Ulysse affrontera t-il Calypso, Circé et les sirènes au cours de prochain diptyque ? Il y a toutes les chances, car Penn reste à New Itakee dans une sacrée mouise au terme de ce diptyque…