L'histoire :
Février 1955. Par une froide averse de neige, sur le parvis du manoir de Knightgrave, un agent immobilier britannique conclut la vente dudit manoir avec une sorte de gangster américain. Peu affable et expéditif, l’homme est à la solde du marquis di Magglio qui, lui, ne daigne pas sortir de sa Cadillac, garée dans l’allée. La transaction terminée, l’agent repart. Monsieur Choc – car c’est bien de lui qu’il s’agit – sort alors de son véhicule. Il demande à se promener seul sur la propriété qui est désormais sienne. Au gré de ses pas dans la neige, les souvenirs lui reviennent. Enfant, il a vécu ici avec sa mère, qui fut jadis pâtissière pour le puissant conte d’Essex. Sur un gisant de l’église en ruine, il avait gravé le mot « revanche ». Mais pourquoi ? Dans la fastueuse bibliothèque, il se souvient du mini globe serti de pierres précieuses qui lui valut les pires ennuis. Dans la chambre, il retrouve le petit portrait de sa maman, à moitié déchiré et tâché de sang, qu’il avait ainsi encadré. Sa maman, cette courageuse qui s’était donnée à un soldat anglais de la première guerre mondiale… et qui avait retrouvé son mari dans les années d’après-guerre, alors qu’il était revenu à la vie civile psychologiquement traumatisé, manchot et alcoolique…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Les lecteurs assidus ou occasionnels de Tif et Tondu connaissent forcément le personnage de Choc. A travers les aventures du célèbre duo durant « l’âge d’or » de la bande dessinée, cet empereur du mal, ennemi public numéro 1, chef de l’organisation mafieuse « la main blanche », systématiquement coiffé d’un heaume improbable et doté d’une puissance financière sans limite, montre une hargne contre l’humanité qui confine souvent au surnaturel. Mais pourquoi est-il si méchant ? Quatorze ans après le décès de Will (Willy Maltaite) qui a dessiné pendant près de 40 ans Tif et Tondu, c’est son propre fils, Eric Maltaite, qui offre le dessin d’une explication en deux parties. Bien qu’issu d’une veine humoristique, son trait s’approche d’un semi-réalisme parfaitement maîtrisé, dans une ambiance de thriller agréable et idoine. Il dévoile toutefois des séquences parfois rudes, qui conviendront mieux aux grands enfants d’hier, qu’aux tous jeunes d’aujourd’hui. La trajectoire narrative de son compère scénariste Stéphan Colman était surtout très étroite, car il s’agissait d’être psychologiquement cohérent, sans dénaturer l’aura et le mystère de ce super-méchant cousin germain de Fantomas. Pari réussi ! Maltaite utilise ici le levier d’un retour nostalgique de Choc sur ses origines. S’entremêlent alors différents flashbacks, mélangés en fonction des éléments qui ont fait sens dans sa vie. Et l’incroyable se produit : petit à petit, au fil des 86 planches ( ! ) de cette première partie, se dessine une logique à sa haine. On entrevoit une enfance atroce, un désir de revanche qui se cheville aux injustices subies. Des explications qui prendront assurément pleinement leur sens dans les événements à venir du tome 2. Et peut-être, sait-on jamais, verra-t-on enfin son visage…