L'histoire :
Wiggins continue sa filature et suit sans relâche Mycroft Holmes. Le frère de Sherlock arrive sur les quais de Douvres. Au milieu de la foule, un colporteur crie les titres du Times. On y annonce que le Docteur Parks est remonté contre la Justice. La seule personne qui a défendu Judy Brown témoigne de l'iniquité de la société : les pauvres gens meurent sous les lois et le capitalisme broie tout. Pendant ce temps, Miss Bannister continue à raconter à Watson son passé de servante auprès de la famille Holmes. Elle se souvient bien qu'en avril 1858, Violet Holmes était déjà constamment à l'extérieur, ce qui rendait triste son époux. Le jeune Mycroft observe souvent le désespoir de son père et tente de comprendre l'attitude de sa mère. Un jour, il n'y tient plus : il prend les vêtements de sa mère et s'enferme dans une chambre pour pouvoir enquêter sur cette affaire. Le problème, c'est que son frère l'a vu et Sherlock fait tout son possible pour rentrer avec lui dans la chambre. Il finit par obtenir gain de cause. Les deux frères observent les vêtements de leur mère et Mycroft commence à en faire un examen détaillé. Il a appris de son éducation à Pau que toute activité laissait une trace, exactement comme les animaux pouvaient laisser des marques dans la nature. Ces petits indices pouvaient en dire beaucoup sur le passé de chacun. Après une analyse attentive et poussée, Mycroft remarque deux choses : l'odeur forte de tabac, probablement un cigare, et la présence de boue rouge sur les bottes. Il en déduit donc que Violet vient rendre régulièrement visite à un homme qui semble plutôt d'une condition aisée, voire fortunée, et qu'il vit dans un quartier où l'on fait des travaux. À partir de là, Mycroft se fait un devoir de trouver ce mystérieux inconnu...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
La série Holmes se rapproche de son dénouement avec cet avant-dernier tome. Pendant longtemps, on se demandait ce que Luc Brunschwig avait en tête. Avec cet opus, de nombreuses réponses éclatent au grand jour. Et si cela est encore possible, le scénariste se surpasse et signe le meilleur tome de la série. La force littéraire reste toujours intacte et la lecture est passionnante de bout en bout. Complexe et raffinée, l'écriture joue à merveille des retours en arrière et des témoignages enchâssés, de sorte qu'on a presque l'impression de lire un roman inédit d'Arthur Conan Doyle. L'opus réserve également des surprises de taille et notamment la rencontre de grandes figures de cette époque qui n'ont pas qu'un rôle de faire-valoir. Dans le film Sherlock Holmes attaque l'Orient Express, l'éminent détective croise la route de Sigmund Freud. Ici, c'est une autre personnalité tout aussi marquante qui fait son apparition et qui va faire basculer l'histoire dans un versant politique fort et original. Hasard du calendrier, le souffle de révolte qui s'en dégage fait inévitablement écho à notre actualité sociale. Toujours est-il que Brunschwig révolutionne le mythe Sherlock en creusant en profondeur le personnage de Mycroft, le fameux frère aîné. Les actions sont également magistrales et la tension est plus forte que jamais. Pour couronner le tout, on retrouve quelques grands moments de l'univers holmésien avec les fameuses observations et déductions brillantes du génie policier. Cecil reste quant à lui égal à lui-même au dessin : il sublime cette narration intense en ressuscitant littéralement Sherlock Holmes. La beauté et la délicatesse du trait, les couleurs pastels monochrome et la science du cadrage donnent un résultat époustouflant. Vu le grand sourire que l'on éprouve à la lecture, le plaisir immense que l'on prend et la rapidité à laquelle on lit un de ces tomes, déduisons aisément que la série n'a pas fini de nous faire vibrer...