L'histoire :
En 1983, à la fin d'un discours dans l'allée des Justes à Yad Vashem à Jérusalem, Irena plante un arbre. « Un monument peut toujours être détruit mais un arbre commémoratif poussera pour toujours ». Cet arbre commémore un évènement si marquant, qu'il est important d'évoquer le passé. En 1949, elle est interrogée par les soviétiques. Ils soupçonnent alors qu'elle cache des soldats de l'armée de l'intérieur. La société change-t-elle vraiment ? Les conflits ne perdurent-ils pas encore un peu partout dans le monde ? « En regardant les actualités polonaises, j'avais l'impression que la région était à feu et à sang ». Une petite fille curieuse veut savoir ce qui lui est arrivé après le coup de couteau dans la jambe. Etonnement, Irena s'en sort. Pas sans souffrance, mais au milieu du désespoir, elle garde le silence. Elle concentre son énergie pour aider les autres. Le temps passe et après les allemands, c'est au tour des russes d'occuper Varsovie. « Des soldats sont venus nous forcer à sortir pour les acclamer ». Un mieux-vivre se fait néanmoins ressentir. L'infirmière pensait avoir tout vu jusqu'à l'arrivée d'enfants sortis du camp d'Auschwitz-Birkeneau. Les cauchemars les empêchent de se reposer. Les mots peinent à sortir. Le dessin permet de libérer la douleur. Chacun doit trouver sa façon de recouvrer la tranquillité. Aujourd'hui, les élèves qu'elle rencontre sont différents, mais ils s'entendent. L'émotion est grande et les larmes coulent. Irena est fière de voir des jeunes si libres. Elle se rappelle quand un homme est venu chercher les fiches cachées dans des bocaux, contenant les identités de 2 500 enfants sauvés. Comment se reconstruire avec une si douloureuse vérité ? Ceux qui ont vécu l'horreur peuvent-ils se relever ? Irena en est la preuve car elle a continué à vivre et à parler...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Jean-David Morvan et Séverine Tréfouël concluent leur série de brillante manière. Affirmer que le Bien peut triompher est osé et au combien important. Derrière chaque guerre se cache des courageux, des braves, des justes pour défendre les êtres injustement ciblés. L'éloquente préface de Marek Halter insiste sur l'importante du devoir de Mémoire et des Justes qui ont risqué leur vie. L'histoire débute avec un lieu d'hommage sur lequel nous étions déjà à la fin du précédent tome. On peut y voir une référence discrète au Dr Janusz Korczak, un Juste qui accompagna les enfants juifs de son orphelinat à Tréblinka pour un dernier voyage. Son histoire est racontée avec délicatesse et humilité. Comment faire autrement face à la témérité de cet homme ? Ce site particulier est aussi une manière d'évoquer le conflit israélo-palestinien toujours d'actualité. Les tensions sont palpables sur place. « Il y a beaucoup de problèmes, il ne faut pas se le cacher, mais la pulsion de vie est la plus forte ». Le conflit implique beaucoup de monde, et parfois malgré eux. Notre héroïne évoque ces allemands embrigadés dans une guerre dont ils étaient eux aussi victimes. Les victimes sont nombreuses et chacune à le droit à un porte-voix. Traduire les actions des Justes n'est sans doute pas facile. David Evrard relève ce défi. Par exemple, les séquences dessinées à la craie donnent sens à ce qu'ont vécu les enfants dans le ghetto et dans les camps. Ce biais élégant permet d'évoquer la réalité de l'horreur à des enfants, sans leur montrer des images trop violentes. Sans oublier la douceur des couleurs de Walter, qui rassurent et apaisent. Cette série révèle le courage d'une femme parmi beaucoup d'autres, avec bonté sans oublier une touche d'humour. Un travail d'équipe réfléchi, qui a mis son talent au service de l'Histoire et de la Mémoire. Merci et bravo.