L'histoire :
C’est dans un paysage montagneux et enneigé – la vallée du Piémont peut-être – que l’on découvre Alaric et ses guerriers wisigoths en chasse d’un cerf. Mais l’animal parvient à s’enfuir par le truchement d’une flèche tirée de nulle part, à laquelle est attachée un parchemin qui dit : Penetrabis ad urbem. Comme une invitation à celui à qui Rome a refusé récemment le titre de maître de cavalerie, à prendre la Ville éternelle. A des lieues de là, sur la rive droite du Danube, la future Vienne brûle déjà de la morsure d’un autre peuple barbare, les Vandales. Wisigoths et Vandales, tous deux ont décidé de piquer vers le cœur d’une puissance romaine affaiblie. L’empereur Auguste Honorius n’est en effet encore qu’un enfant. Retiré en cet hiver en son palais de Ravenne, il aime aussi les chasses. A ces dernières se presse d’ailleurs sa suite, nombreuse. Cependant, alors que le préfet de la Ville, Flavien, fraîchement converti et symbole d’une nation rassemblée derrière la nouvelle obédience chrétienne, l’a rejoint, un funeste présage survient : l’empereur est attaqué par un loup. L’animal qui presque enfanta et nourrit le peuple latin se retourne aujourd’hui contre lui. Comme pour se venger d’avoir été abandonné…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Nous sommes sans doute aux alentours de l’an 410. Les ex-mercenaires et auxiliaires armés qui firent la puissance romaine, la sachant très affaiblie, rêvent tous à présent de la faire tomber, ou mieux de se l’accaparer. Ouvrant son intrigue avec le personnage du Wisigoth Alaric – à qui l’on attribue le sac de la Ville éternelle – Giles Chaillet annonce sans détours quelle en sera la fin (...). Très longtemps attendue et finalement publiée de manière posthume, cette conclusion à l’une des plus belles séries signées du regretté passionné de la Romanité, nous replonge en une époque crépusculaire, où une certaine conception de la civilisation semble plier sous les coups de buttoirs desdits Barbares. De fait, nous sommes sans doute arrivés à la fin d’un cycle. La révolution chrétienne adoptée par Constantin a fini d’ébranler un empire devenu trop grand et que beaucoup des fidèles fanatiques de la nouvelle foi souhaitent purifier. C’est d’ailleurs l’analyse suivie ici, en filigrane, pour expliquer la chute de l’Urbs. Un événement qui fit grand bruit et qui, côté scénario, éclipse complètement l’histoire personnelle imaginée autour du personnage de Fabien. Graphiquement, le travail repris par Dominique Rousseau témoigne d’une fidélité confondante à son modèle. La mise en scène paraît, elle, moins évidente dans le détail, mais nulle trahison à l’esprit et au dessin « sibyllin » que nourrissait Gilles Chaillet. Que ce voyage au final, commencé aux Enfers et conclu par la Révélation, fut aussi rigoureux que savoureux ! Les amateurs d’Histoire apprécieront. Alors merci encore à Dominique Rousseau d’avoir offert à la Dernière prophétie son point décisif. Hommage encore à Chantal Defachelle dont les couleurs ont rarement parues si justes et appliquées.