L'histoire :
En 1920, Jos Gloaguen est désormais patron de pêche. Au milieu d’une nuit à dormir au mouillage à bord de sa chaloupe, après avoir partagé une bonne soupe de poissons avec ses compagnons, il a le sentiment d’être visité par le fantôme de son père. Celui-ci lui demande des comptes sur la pérennité de sa profession. Jos lui relate alors 8 ans de sa vie, à commencer par la veille de la Grande Guerre. A l’époque, étant donné que Denise Guilcher était désormais mariée à son borgne, Jos avait une nouvelle promise, Anna Coëdic. Hélas, lui et la grande majorité des pêcheurs de Douarnenez avaient reçu un ordre de mobilisation. Jos avait donc rejoint son affectation à bord du cuirassé Danton, en compagnie de son ex-futur-beau-frère détesté : Jean Guilcher, frère de Denise. Un sous-marin allemand allait torpiller le bâtiment militaire avant même qu’il ait pu tirer un seul coup de canon. Dans le naufrage, Jos et Jean s’étaient entraidés pour s’extirper du Danton et échapper à la noyade. Puis après une courte permission auprès de ses proches à Douarnenez, Jos avait dû rempiler à bord d’un autre cuirassé, le Mirabeau. Lorsque les Boches avaient enfin signé l’armistice, Jos n’était pas démobilisé pour autant. Son bâtiment de marine était en rade de Sébastopol où l’équipage s’organisait pour prêter main-forte à l’armée tsariste à l’assaut des bolcheviks. Or les hommes du bord ne partageaient pas franchement tous l’idéologie capitaliste…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
François Debois (au scénario) et Serge Fino (au dessin) livre là le troisième volet de cette saga artisanale, comme Glénat les affectionne, s’intéressant au destin professionnel et romanesque d’un pêcheur de sardines. Après l’apprentissage du métier (au tome 1), les amours contrariées et les premières grèves (au tome 2), la chronologie historique impose au héros d’être mobilisé pour la Grande Guerre. Il la traverse relativement épargné par son affectation en mer, mais sera paradoxalement bloqué plusieurs mois à son terme, par une affectation sur le front de la révolution bolchevik et une avarie matérielle. Au dessin, Fino poursuit sa partition graphique encrée, soignée et réaliste. Pour accorder du rythme à la linéarité d’un récit biographique, Debois utilise sans en abuser du principe du flashback et du « fantôme » réclamant des comptes. Entre deux, le scénariste appuie aussi les évènements sur un vocabulaire et moult indications didactiques sur le métier (comment retrouver le cap dans le brouillard ; comment les pêcheurs dorment parfois dans leur chaloupe ; le nom des différentes composantes de l’embarcation…), quand bien même cela se fait au prix d’une légère austérité de ton. Au sortir de l’opus, le gamin a pris de la bouteille, il est devenu un homme, un vrai patron de pêche, qui abordera sans doute des considérations plus économiques de son secteur dans les volets à venir…