L'histoire :
Karl, 10 ans, est accro à sa console de jeux, et surtout à un jeu de progression en caméra subjective dans un univers d’heroïc-fantasy : Le maître des ogres. Derrière ses manettes, il fait partie d’une bande de pirates, à la tête de laquelle un énorme ogre vert dégage le terrain, en tête, pour aller délivrer sa fille kidnappée dans une citadelle fortifiée. Or, alors qu’il était sur le point de terminer ce niveau particulièrement haletant, Helen, la belle-mère de Karl, débranche la prise : c’est l’heure de passer à table. Karl est d’autant plus vert de rage, qu’il apprend que son père part en déplacement pour un mois et qu’il va devoir cohabiter avec cette détestable belle-mère et sa fille Nicole. Puis, de retour dans sa chambre, Karl a une surprise de taille : sa télé a explosé et… les deux personnages principaux de sa console sont là, dans un coin de la chambre, sortis du jeu ! L’ogre imposant Karnos et la sexy Phaline, sa fille, l’appellent « petit maître » et attendent qu’il les dirige. Karl croit halluciner. Il se gifle, relit le mode d’emploi et conclut qu’il y a eu un gros problème technique au moment de la coupure de courant. Il attend que sa famille soit couchée et descend avec ses nouveaux amis, pour brancher sa console sur la télé du salon. Il espère alors pouvoir renvoyer par ce biais les personnages dans leur monde. Mais Karnos se sent faible : il a besoin de manger de grosses quantités de nourriture et ce ne sont pas les poissons exotiques de l’aquarium qui le rassasient…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
A l’instar de Tessa, agent intergalactique, Le maître des ogres nous fait le coup du passage régulier entre notre trop sage monde contemporain et un univers fantastique parsemé de périls. Dans le premier tome de cette série d’aventures et d’humour tout public, il est toutefois plutôt question d’univers médiéval fantastique que de science-fiction. Surtout, le jeune héros Karl éprouve des « transferts » dans les deux sens : les persos du jeu vidéo débarquent dans notre monde (ce qui donne lieu à bien des situations embarrassantes) ; et Karl bascule lui aussi dans le jeu vidéo (ce qui donne lieu à bien des aventures survoltées). Orchestré par le touche-à-tout Michel Rodrigue, le scénario est effectivement ultra-rythmé : il installe les contextes, les personnages, et il se passe déjà beaucoup de chose dans ces 46 premières planches. Or, en marge du ce déluge de péripéties, on peut aussi faire une lecture éducative du synopsis, y voir une forme d’alerte sur les méfaits des jeux vidéos, qui finissent par trop immerger les pratiquants dans un univers virtuel éloigné du notre. Heureusement, le récit n’est jamais moralisateur, préférant miser sur l’action et les rebondissements. Enfin, l’alchimie fonctionne pleinement grâce au coup de crayon de Vincenzo Cucca, qui trouve une synthèse convaincante entre les influences franco-belges, comics et disneyiennes. Aussi à l’aise sur les décors que pour le character-design, dans le monde contemporain aussi bien que médiéval, Cucca, dont on avait entraperçu le talent sur Maat ou Route des maisons rouges, accède enfin à une série dotée d’un potentiel au long cours. A suivre prochainement dans le tome 2, Le réveil des clans…