L'histoire :
Jehanne d’Arc n’est donc point morte brulée vive à Rouen. Elle a été exfiltrée au dernier moment et c’est une indigente, la Guillorée, qui s’est sacrifiée à sa place. Près de quinze ans plus tard, elle reçoit en son château de Jaulny (Duché de Lorraine), la visite d’un ancien compagnon d’armes, Jehan de Metz. Il est accompagné du jeune Louis, un écuyer discret et estropié (a priori) par un bras gauche gigantesque. Jehan demande assistance à la « pucelle » pour aller sauver un autre ancien compagnon, Bertrand de Polongy. Car ce dernier est tombé entre les mains d’un troisième ancien compagnon, qui a sacrément mal tourné, Gilles de Retz. En effet, Gilles a toujours eu des penchants pédophiles et meurtriers… qui ont encore été renforcés par l’influence néfaste d’un ecclésiaste et alchimiste démoniaque, Prélati. A grand renfort de décoctions, Prélati est en train de transformer Bertrand de Polongy en « garou », une créature bestiale et herculéenne à sa botte. Accompagnée de son époux Robert et de son frère Pierre, Jehanne reprend donc les armes pour rejoindre Tiffauges, guidée par Jehan et Louis. Il semble que des forces obscures habitent nombre d’entre eux et leur accordent un pouvoir transformiste aussi efficace qu’incontrôlable lorsque la fureur jaillit …
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Avec ces Démons d’Armoises prévus en trois tomes, Jean-Charles Gaudin et Jean-Luc Clerjeaud revisitent un double mythe : celui de Jeanne d’Arc, figure séraphique et tutélaire de la nation française, et celui inverse de son compagnon d’armes Gilles de Retz (ou de Rais), jadis condamné au bûcher pour meurtres et pédophilie. Il est sans doute l’un des pires serial-killer de l’Histoire et l’une des origines plausibles du mythe de Barbe bleue. Le premier tome était assez proche d’une réalité historique revisitée… ce second verse clairement dans le fantastique et l’effroi. En effet, les scénaristes s’appuient sur le goût authentique de Gilles Retz pour l’occultisme et la démonologie (le recrutement de Prélati est lui aussi historique), afin de le relier à un projet alchimique de grande ampleur (pour le coup fictionnel), qui expliquerait aussi le mystère des voies et des capacités belliqueuses innées chez Jeanne d’Arc. Gaudin en profite pour boucler avec la figure monstrueuse d’une autre de ses séries, Garous… On en a déjà trop dit. Cette interprétation spectaculaire serait tout à fait intéressante si sa narration n’était aussi souvent floue. On se perd en effet dans des dialogues nombreux et ampoulés (et écrits tout-petit-petit-petit…) tandis que la mise en scène graphique de Stéphane Collignon, tout soignée soit-elle dans ses jolis encrages réalistes, ne rend pas l’action explicite. Une belle intention, de vrais talents, pour un résultat décevant…