L'histoire :
Après avoir fait signer des documents à l’ogre Dieu, le chambellan s’en retourne dans son palais. Dégoûté, il souhaite se changer avant le repas. Il demande à ce que de la musique soit jouée pendant le repas, pour qu’une opération qu’il vient de lancer n’importune pas les invités. Mais la soirée est visiblement tendue. A la fin du repas, il demande à ce qu’un bain lui soit préparé et que sa mère lui soit amenée. Avec elle, il se remémore (sans tendresse) son enfance. Yori Draken est le fils de la favorite du seigneur Draken, l’une des grandes familles. Mais en tant que fils illégitime, il est considéré comme un bâtard par ses demi-frères moins beaux, moins intelligents, moins curieux et moins vifs que lui. Un jour que le plus grand de ceux-là, après une nouvelle leçon où Yori a été félicité, essaie, pour le punir, de le violer, Yori se défend en lui plantant dans l’œil sa plume et s’enfuit. Il convainc sa mère de quitter le château après que son père ait été incapable de le défendre. Il fera sa vie désormais loin, voire contre les Draken.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Deuxième épisode de ce conte bien plus horrifique que celui de Gargantua, Grandgousier et autre Pantagruel. Les géants dont on parle ici sont méchants, bêtes, anthropophages. Ce sont des ogres et ils règnent en dieux sur les hommes. Mais dans ce tome, on s’intéresse moins aux ogres, bien dépeints dans le premier opus, mais plus aux hommes. Ce n’est, vous vous en doutez, pas bien mieux. Les grandes familles se disputent les places du gouvernement des hommes, ce qui leur permet d’être régulièrement écrasés, estropiés, moqués par les ogres. De fait, ils répètent ces mesquineries et brutalités sur leurs congénères. Yori, petit bâtard ambitieux et brillant, va user de toutes ses qualités et défauts pour bousculer cette hiérarchie, se venger de tous et installer sa tyrannie. Le scénar est assez simple, mais Goscinny ! que le déroulé est vif, intéressant, brutal, terriblement humain. La violence des sentiments n’a d’égale ici que celle des coups, de préférence bas et par-derrière. Hubert s’en donne à cœur joie et, comme dans le premier tome, il émaille son récit de grands morceaux de textes qui créent une véritable mythologie. Ici, c’est l’histoire des Chambellans qui est détaillée. Les dessins et les illustrations de Gatignol, toujours en noir et blanc, sont fins, esthétiques, toujours précis et magnifiques. Le paradoxe est saisissant entre la grossièreté animale des personnages et la finesse des traits. Le deuxième opus de ce conte gothique est aussi réussi que le premier, à la fois choquant, dur, mais qui jette un miroir terrible sur notre société et ses modes de fonctionnement.
