L'histoire :
En 1946, les Allemands sont plus forts que jamais. Le débarquement en Normandie a été un véritable fiasco et le Reich laisse les épaves des bateaux et autre matériels militaires ennemis croupir sur les berges. L’objectif est de prouver la suprématie allemande dans le monde. En France, le président Laval organise un discours dans ce sens, profitant du lieu symbolique de la Normandie pour rappeler l’échec retentissant des Alliés. Laval affirme haut et fort son attachement au Reich et est prêt à tout pour détruire l’ennemi et notamment de Gaulle, traître à sa patrie. Goebbels est ravi des paroles employées par le chef de l’état français. Il prend également la parole et fait tout pour consolider les liens avec la France. Pour montrer la force de leur coopération, le ministre de la propagande nazie fait un geste fort : il promet de ramener tous les prisonniers français détenus en territoire allemand afin qu’ils retrouvent leur pays. Il rappelle également que le Reich est intouchable et surpuissant grâce à leur armée de guerre : la Wunderwaffen ! Pourtant, dans le ciel, les avions allemands sont sur les dents, car une intrusion ennemie menace le territoire et la délégation allemande…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Et si l’Allemagne n’avait pas perdu la seconde guerre mondiale ? C’est ce que propose cette série uchronique qui prolonge la guerre, alors que les faits datent de 1946. A ce titre, elle revient sur un des tournants de la guerre et apporte un éclairage particulier sur le débarquement en Normandie. En effet, si Hitler est devenu encore plus puissant à la fin de l’année 1945, c’est que les Alliés s'y sont cassé les dents. Alors que dans la réalité, le D-Day assure la victoire des forces alliées contre l’Axe, ici c’est tout le contraire : les allemands deviennent les maîtres du monde grâce à une victoire éclatante. Le titre l’indique : le D-Day devient « Disaster-Day ». Un choix osé et fort, alors que l’année 2014 fête les 70 ans de la (vraie) victoire des troupes américaines et anglaises en Normandie. L’album revient donc en arrière par rapport à la chronologie des évènements dans la série. Richard D. Nolane jongle habilement entre réalité et fiction et détourne habilement la vraie Histoire autour de références historiques pointues. On replonge dans cet évènement avec délectation : la mésentente entre De Gaulle et Churchill, la guerre d’espionnage et de contre-espionnage, les différents organismes allemands, l’intelligence stratégique de Rommel… Tous ces épisodes bien réels sont autant de leviers pour détourner l’Histoire. Le jeu de l’uchronie marche ici à plein régime et avec une subtilité rare. Les photos du dossier final attestent de cette « tricherie » historique : les photos réelles sont complètement détournées de leur sens et constituent autant de manipulations de l’esprit (Goebbels n’aurait pas fait mieux !). L’album joue aussi sur l’alternance entre la grande et la petite histoire des aventures aériennes de Murnau. On a donc quelques scènes d’action, presque indispensables à la marque de fabrique de la série, avec des raids aériens meurtriers. Le dessin efficace de Milorad Vicanovic Maza allie modernité et précision du trait, dans le ton de l’album. On regrettera pourtant quelques détails qui ternissent l’ensemble, dont la colorisation parfois sombre. Certains autres détails inventés semblent aussi grotesques, comme l’orage mystérieux qui foudroie les bateaux américains ou la façon dont les Allemands percent le secret du D-Day. Cet opus est toutefois certainement le meilleur de la série.