L'histoire :
Depuis qu’au royaume du roi Hochwald, le savant Erken a enfermé « la mort » dans un miroir, l’immortalité généralisée a atteint son horrible paroxysme. Zombifiés jusqu’à la fin des temps, les sujets espèrent tous que les petits Zorn et Dirna parviendront à leur fins en renversant le tyran, l’ignoble Dauphin qui profite de ce système pour s’adonner aux pires dépravations. Car en effet, par simple apposition de leurs mains conjointes, ces jumeaux peuvent accorder le trépas, notamment aux âmes enfermées dans des corps pourrissants. Pour mener à bien leur quête, Zorn et Dirna sont épaulés de leurs parents, Seldnör (dont l’âme est désormais enfermée dans le corps de la mercenaire Kérozinn) et Splata (dont l’âme est enfermée dans le corps d’un barbare herculéen et hirsute). La petite troupe est parvenue à enlever le « lamineur ultime », un enfant qui est le réceptacle d’une grande quantité d’âmes libérées de leur corps. Le pouvoir de Zorn et Dirna l’a immédiatement libéré de toutes les âmes, sauf une : celle de Verraten, le frère déchu du Dauphin. Ensembles, ils espèrent désormais parvenir jusqu’au roi Hochwald, enfermé au sommet de sa tour. Mais ils craignent la haine et la fureur du Dauphin. Ils passent donc par les catacombes du palais et sont interceptés par les hordes de zombies qui y pullulent. Pour le moins effrayants, tous ces monstres en décrépitude se révèlent en réalité sensés et clairvoyants. Ils proposent un tout autre plan…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Enfin ! Il aura fallu attendre 5 ans pour découvrir l’ultime épisode de cette légende de fantasy d’un genre insolite : philosophique et gore ! Car sous des allures de délires hémoglobinaux-trashs, Zorn et Dirna sait aussi être tendre et brasse de passionnants sujets éthiques – voire sociaux, si on les extrapole de leur contexte fantaisiste. L’idée de l’immortalité découle en effet sur moult réflexions de masse, comme le droit à la mort, le rapport du corps à l’âme, les conséquences psychologiques de la vieillesse ultime… Or Morvan n’a jamais craint de confronter ses héros à toutes ces questions, dans le flot de leurs aventures, par petites pincées. Néanmoins, ces concepts entrecroisés forgent à la fois la force et les limites de l’exercice. Car peut-être sont-ils trop « vastes » pour se marier idéalement à une série grand-public, pour le moins sophistiquée et un poil gore. De fait, la narration avance par accoups, entremêlant les flashbacks et les dialogues diserts – nécessaires à expliciter les situations, les humeurs, les intentions – et les scènes chocs pleines de viscères, de corps coupés en tranches et d’action – essentielles pour donner du peps au récit. Il ressort de ce tome 6 un sentiment mitigé. D’un côté, le dénouement se met en place de manière un tantinet artificielle, avec des comportements souvent trop exacerbés pour être pertinents : un déluge d’évènements et d’émotions. D’autre part, on a tout de même l’agréable sentiment du travail accompli : le scénariste a été jusqu’au bout d’un récit d’une grande complexité, en restant fidèle aux mécanismes et à la tonalité. En outre, l’humour n’est pas oublié, notamment par l’intermédiaire du dessin peaufiné de Bruno Bessadi, toujours très détaillé quand il s’agit de montrer des membres sectionnés en tranches, des intestins qui s’emmêlent par terre ou un globe oculaire qui gicle. Bref, les amateurs de la première heure peuvent être satisfaits ; les néophytes peuvent se lancer : la série de 6 tomes est désormais complète et achevée, de manière cohérente et aboutie.