L'histoire :
Joe Face est mort. C’était une petite frappe comme il y en a tant et ils sont peu à pleurer autour de sa dépouille. Il bénéficie à peine un lambeau de terre pour reposer en paix. Malgré tout, Spider-Man arrive pendant le recueillement. Beaucoup de bandits lui font un accueil glacial voire violent, certains sortent même leurs armes. Mais Spidey ne se démonte pas et laisse de l’argent pour l’enterrement de Joe. Rentré chez lui, Peter Parker va se coucher, mais il est saisi d’un cauchemar terrifiant. Dans celui-ci, un homme nu, plus fort et plus enragé qu’une bête fauve, marche sur un monceau d’insectes. Empli de fureur, il prend les insectes à pleines mains et les engloutit. Le sang noir sort de ses canines. Avant de se réveiller, Peter réalise que ce ne sont pas des insectes mais des araignées ! Le cauchemar est terminé mais il a reconnu qui était ce fameux dément bourré de colère : il s’agit de Kraven, le Chasseur !
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
De tous les récits de Spider-Man, celui sur son ennemi juré le chasseur Kraven est rapidement devenu culte. Il était donc logique de le retrouver dans ce tome 4 qui célèbre les 60 ans de l’Homme Araignée. A mi-chemin entre le ton macabre des Creepshow et l’univers sombre d’un Frank Miller, ce récit glaçant est un incroyable témoignage de la libération de la censure et de l’audace folle des auteurs de la fin des années 1980. Première bombe : la mort de Spider-Man. Jamais un récit de super-héros n’aura autant abordé la fin de vie avec ce leitmotiv d’un fossoyeur qui creuse de plus en plus profond une tombe. L’aspect morbide amène à une vertigineuse introspection de chacun des personnages et c’est la deuxième claque que l’on subit. Les voix off miment parfaitement les pensés de Kraven, Mary Jane ou la Vermine sans oublier Spidey, terrible victime de sa double voix intérieure qui lui donne des conseils contradictoires. J. M. De Matteis prend le temps d’analyser longuement la psychologie, suspendant le temps dans des scènes oniriques déstabilisantes. On ne sait parfois plus si l’on est dans la tête d’un des protagonistes, dans un cauchemar ou dans un au-delà après la mort. Ce qui est sûr, c’est qu’on est dans un comics pas comme les autres. Le ton se fait parfois nostalgique, avec des pointes de lyrisme, comme si une musique puissante accompagnait chacune des scènes. Ce voyage dans la psyché de Spider-Man vaut aussi le détour en raison du dessin de Mike Zeck. Tout aussi novateur que l’écriture, le graphisme devient parfois psychédélique avec des audaces visuelles folles qui surprennent et bouleversent. Le style se situe entre un classicisme puissant à la Romita Sr et un futur trait nerveux à la McFarlane. Vous ne sortirez pas indemne de cette dernière chasse de Kraven.