interview Manga

Nagabe

©Komikku éditions édition 2018

Nagabe est un auteur au style particulier, tant graphiquement avec son trait aux allures de gravure rappelant les dessins des anciens contes, que scénaristiquement avec un récit sortant totalement du cadre de la production de masse habituelle. Lorsque son manga L’enfant et le maudit - Siúil, a Rún débarque en France, il se fait remarquer et a même droit à une nomination dans la sélection officielle du Festival international de la BD d’Angoulême en 2018. D’abord illustrateur, cet amateur de Tasha Tudor, Tove Jansson (Les Moomins) ou encore Edward Gorey est à l’université lorsqu’un éditeur le remarque sur Internet et lui propose de réaliser des mangas à partir de ses dessins. Un mangaka atypique au parcours atypique donc, que nous nous sommes fait une joie d’aller rencontrer lors de sa visite en France au salon Livre Paris 2018.

Réalisée en lien avec l'album L'enfant et le maudit T1
Lieu de l'interview : Livre Paris

interview menée
par
18 octobre 2018

Comment êtes-vous devenu mangaka ?
Nagabe : J'étais encore étudiant à l'université lorsque j'ai envoyé une de mes illustrations à un site spécialisé. Un éditeur a remarqué mes dessins et m'a contacté pour me demander, si par hasard, je n'aimerais pas devenir mangaka professionnel. C'est ainsi que j'ai commencé ma carrière, alors que j'étais encore à l'université. Lorsque mon premier manga professionnel est paru en livre relié, j'ai été très ému et à la fois un peu frustré parce que je voyais tous les petits défauts. Je me suis dit qu'il fallait que je bosse, qu'il y avait encore des améliorations à apporter et que c'était peut-être le moment de choisir cette voie.

Nagabe L’enfant et le maudit illustration


Avez-vous eu un parcours classique ? Avez-vous été assistant ?
Nagabe : Je n'ai jamais été assistant d'un autre mangaka. J'ai commencé par un one-shot, avec neuf chapitres. J'ai publié directement dans un magazine de prépublication.


Comment est née l'idée de L'enfant et le maudit ?
Nagabe : J'ai commencé par faire des illustrations des personnages, de Sheeva, la petite fille, et du professeur. J'avais l'habitude de les dessiner sans but, sans histoire particulière. Petit à petit l'idée m'est venue que je pourrais en faire une histoire, avec deux personnages qui sont proches mais qui ne peuvent pas se toucher. C'est une histoire triste. Je ne me suis pas inspiré d'une légende ou d'un conte en particulier, l'idée m'est venue petit à petit.


Avez-vous un synopsis global ou avancez-vous au fur et à mesure ?
Nagabe : Avant de commencer la publication des premiers chapitres dans le magazine de prépublication j'avais préparé un synopsis. Je savais dès le départ comment l'histoire allait se terminer, mais au bout d'un an ou deux, j'ai eu d'autres idées et donc les anecdotes du milieu de l'histoire ont été modifiées et vont l'être encore plus, peut-être, par la suite, mais la fin est prévue et je ne pense pas que je vais la modifier.

Nagabe L’enfant et le maudit extrait


Quelles sont vos sources d'inspiration ?
Nagabe : Il y a quand même une certaine influence d'Alice au pays des merveilles d'un côté et du Magicien d'Oz de l'autre.


Vous êtes-vous inspiré du folklore irlandais ?
Nagabe : Ce n'est pas moi qui ai eu l'idée d'ajouter le nom de la comptine, c'est mon responsable éditorial. Jusqu'à ce qu'il m'en parle je ne la connaissais pas.


Y a-t-il une signification particulière ? Un rapport avec l'histoire ?
Nagabe : Il n'y a pas de lien direct, mais quand mon responsable éditorial m'a parlé de cette comptine, j'ai vérifié les paroles pour savoir de quoi il s'agissait. L'atmosphère qui émane de cette chanson colle parfaitement avec celle de mon manga. De par le lien entre la petite fille et le professeur, il y a un peu de tristesse, c'est une chanson un peu d'adieu et qui parle aussi des relations fragiles entre deux êtres. Je me suis dit que c'était la chanson qu'il fallait.

Nagabe L’enfant et le maudit illustration


Votre style graphique est très différent de ce que l'on voit habituellement. Avez-vous eu des sources, des influences particulières ?
Nagabe : J'ai toujours aimé regarder les livres d'illustrations, les livres pour enfant, et quand j'étais lycéen je suis tombé sur un livre dont l'illustration a été faite par l'auteur des Moomins (Tove Jansson, NDLR). J'ai été vraiment stupéfait par la beauté de ses illustrations et surtout par sa façon de dessiner en superposant les traits. J'ai toujours voulu faire un peu comme elle et je pense que mon style graphique vient un peu de cette illustratrice.


Dans le manga, les gens de l'intérieur et ceux de l'extérieur se méfient les uns des autres. Y a-t-il un message derrière ? Essayez-vous de dire qu'il faut aller vers l'autre ?
Nagabe : Je ne veux pas transmettre un message particulier. Mon ambition c'est que pendant que les lecteurs lisent mon manga, ils puissent plonger dans cet univers créé par Sheeva et le professeur, cet univers fait de douceur, mais aussi de fragilité.

Nagabe L’enfant et le maudit illustration


Écoutez-vous de la musique pour vous inspirer lorsque vous travaillez ?
Nagabe : Je travaille dans mon bureau et dans un silence monastique.


Si vous pouviez pénétrez l'âme d'un autre artiste, qui choisiriez-vous ?
Nagabe : J'aimerais entrer dans l'esprit de plusieurs mangakas, mais si je dois en citer un seul, ce sera Osamu Tezuka, parce que c'est quelqu'un qui a dessiné beaucoup de mangas et de genres très divers. Pour moi c'est une sorte d'encyclopédie et je voudrais savoir quelles sont ses sources d'inspiration pour chaque titre.


Merci !

Nagabe L’enfant et le maudit illustration

Nagabe L’enfant et le maudit illustration

Nagabe L’enfant et le maudit illustration


Interview réalisée le 16 mars 2018.

Merci aux éditions Komikku et notamment à Ryoko Akiyama pour la traduction, ainsi qu’à Sam Souibgui.
Merci à Laetitia De Germon pour la retranscription.

Toutes les illustrations de l'article sont tous droits réservés par leurs auteurs et éditeurs respectifs.

© Nagabe – MAG Garden