L'histoire :
En ce jour triste et morne, les cendres du commissaire à la retraite Eugène Garenni sont dispersées en famille à la surface d'un petit canal oublié. Canardo se trouve évidemment parmi les convives, lorsque la fille d'Eugène, elle-même officier de police, demande à s'entretenir avec lui. Elle est en effet persuadée que son père a été assassiné, en dépit des circonstances de foudroiement évident, un jour d'orage. Des traces de barbiturique dans son sang suffisent à lui instiller le doute. Canardo, en tant que privé blasé et expérimenté, en sait un peu plus sur la magouille dans laquelle trempait ce con d'Eugène. Sa piste le fait remonter jusqu'au Belgambourg, et sa méthode l'oblige à entrer en clandestinité, à user de méthodes peu conventionnelles. Au moment où il lance cette nouvelle phase d'investigations en compagnie de la fille Garenni, la grande duchesse du Belgambourg assiste très énervée devant son poste de télévision, à un meeting improvisé par un leader syndical devant la manufacture de cigares. L'arrivée en masse des migrants wallons n'est pas une problématique, selon ce Belanchon, mais une chance pour l'industrie nationale. La duchesse décidé de contre-attaquer sur le terrain du populisme, au moment où Canardo décide de s'approcher d'une certaine famille de pêcheurs d'anguilles...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
La mort aux yeux verts s'inscrit comme la suite directe du tome 23, Mort sur le lac... et cette enquête en diptyque ne restera pas dans les mémoires parmi les meilleurs Canardo. Le scénario de Benoît et Hugo Sokal se complaît dans des problématiques politiques entremêlées, qui se dispersent dans des périmètres trop vagues, au détriment d'un mécanisme de polar tout à fait percutant. Il est en effet question de syndicalisme, de migrants, de populisme, d'état corrompu... Et sur ce canevas multiple qui aurait mérité plusieurs intrigues séparées, se greffent un foudroyage énigmatique, une famille prolétaire de pêcheurs d'anguilles par trop caricaturale, des tueurs issus de services plus mafieux que secrets, dont une tueuse aux charmes soi-disant puissants... mais en réalité surfaits. Avec leur « Cherchez la femme », les auteurs ont visiblement souhaiter retrouver la suave et énigmatique personnalité de l'Amerzone, sans y parvenir. Autre indice flagrant de ce scénario bancale, les dialogues cherchent systématiquement les formules rustiques, au détriment de la limpidité narrative. Toujours mu par son flegme attachant, le pauvre Canardo n'est pas acteur de grand-chose et en plus, il se fait trouer les palmes à coups de revolvers. Reste le dessin de Pascal Regnauld, toujours au point pour faire vivre les personnages zoomorphiques de Sokal, malgré le peu de place accordé à l'aspect visuel en raison d'un découpage serré et de phylactères surabondants. Un polar en eaux troubles, dans tous les sens du terme...