L'histoire :
Ce jour-là, Hector Van Bollewski, un des parrains de la mafia belge, émigré depuis des lustres aux states, demande à son chauffeur de l’arrêter en pleine forêt, pour marcher un peu. Quelques minutes plus tard, un coup de feu retentit : se sachant atteint d’un cancer fatidique, Van Bollewski a préféré se tirer une balle. Quelques jours plus tard, lecture est faite chez le notaire de son testament. Celui-ci stipule, sur un ton particulièrement froid, que toute sa fortune revient à ses deux enfants jumeaux… à condition qu’ils dispersent eux-mêmes ses cendres sur sa Belgique natale, en un lieu qui leur sera indiqué par divers courriers successifs. Or, à peine cette clause a-t-elle été révélée, et le chauffeur personnel du mafieux disparaît avec son véhicule plastiqué. Marguerite, la veuve (pas franchement éplorée) se tourne donc vers son cousin belge, l’inspecteur Canardo, pour le remplacer et accompagner ses rejetons. Dès que ces derniers montent dans sa limousine à l’arrivée de l’aéroport, Canardo comprend que les deux ados, Harry et Monica, sont de véritables têtes à claques, insolents et ingrats. Il ne s’attend pas, en revanche, à participer à un véritable jeu de piste orchestré et anticipé par le mafieux, qui connaissait décidemment très bien son petit monde…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Pour sa 19e aventure, l’inspecteur Canardo n’effectue pas une enquête à proprement parler, même s’il reste dans le milieu du polar noir, cynique et déshumanisé. Le personnage de flic à tête de canard sert cette fois de chauffeur docile à sa cousine, récente veuve d’un criminel de haut rang, pour promener deux adolescents détestables à travers la Belgique. Pour hériter d’une fortune, ceux-ci doivent en effet obéir aux instructions se trouvant dans une multitude de lettres cachetées qui jonchent leur parcours. Le lecteur suit donc tout au long de l’album un jeu de piste improbable, dicté par un plan anticipé avec une perspicacité diabolique par le défunt, avant sa mort. L’extravagant de la chose participe bien entendu de l’originalité de l’aventure. L’équipe composée de l’inspecteur, des jumeaux et de leur urne, se complète également d'un ersatz de Super Nany, à forte poitrine. Ensemble, ils doivent éviter les pruneaux et moult pièges tendus par les rivaux du mafieux. Des mines de charbon de Wallonie, aux bistrots des Flandres, jusqu’à l'Atomium de Bruxelles (ils font même une halte chez des pédophiles, autre spécialité belge…), nos protagonistes sont mis en images de manière rythmée et (de plus en plus ?) soignée. La zoomorphie désabusée, de mise, des personnages se complète en effet de décors fignolés, d’une colorisation judicieusement éteinte, d’un découpage assez dense et de dialogues truffés de cynisme et de bons mots. En prime, un vague ton moralisateur insiste sur l’éducation défaillante des jeunes. Hormis sa Limousine criblée de balles, l’inspecteur Canardo ne regrettera pas d’avoir conduit cette mission à son terme, lui qui donnera doublement de sa personne…