L'histoire :
En 1857, le baron Haussmann entreprend des travaux de grande envergure dans Paris, espérant y apporter une forme de renouveau. La banque générale d'investissement flaire le coup juteux et décide d'acheter de nombreux terrains. Victor de Saint Hubert s'occupe de régler le problème des habitations à détruire. Avec son petit frère Théodore, il se rend chez les derniers propriétaires misérables du quartier et les force à quitter les lieux. Avec ses hommes de main Chafouin, La Perle, Hachoir et Crève Dieu, ils n'ont aucun mal à chasser les habitants de leur maison. Même si Théodore n'apprécie pas ces méthodes, Victor n'a aucun état d'âme et estime que les gueux ne méritent aucun traitement de faveur. Dans le même temps, Jacques Leomant, fils de Charlotte de saint Hubert, revient en France pour affaires...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Le deuxième cycle de La banque met cette fois en scène la deuxième génération de la famille Saint-Hubert. Cependant, qu’on ne s’y trompe pas : la haine entre Charlotte et Christian est loin d’être éteinte… bien au contraire ! On retrouve d’ailleurs le frère et la sœur marqués par le temps qui passe, qui orchestrent leur lutte à distance et se servent de leurs enfants comme armes et boucliers. Une nouvelle galerie de personnages apparaissent donc (déjà présentés auparavant alors qu’ils n’étaient qu’enfants) : d’un côté le violent Victor et le prudent Théodore, fils de Christian, et de l’autre, le couard Jacques et la déterminée Odile, enfants de Charlotte. Ces nouveaux personnages parviennent à faire oublier les caractères forts de leurs parents, tant les scénaristes peaufinent le trait. C’est tellement réaliste qu’on croirait vivre une vraie saga familiale avec Odile qui ressemble trait pour trait à sa mère, tandis que Victor a hérité de la rage de son père. Leur terrain d’affrontement est la ville de Paris, en pleine mutation sous le rêve pharaonique d’Haussmann. La toile de fond est passionnante et rappelle les grandes heures de l’histoire du régime de Napoléon III. Ce sont aussi les prémices de l’édification du Paris que tout le monde connaît aujourd’hui. Cependant, un tel projet ne pouvait se faire totalement dans la légalité. Pierre Boisserie et Phillipe Guillaume s’en donnent donc à cœur joie en dénonçant les rouages d’une machinerie bancaire puissante et dévastatrice. Ainsi, tous les actes les plus crasses sont bons pour la construction d’un Paris clinquant : expulsions violentes des habitants, spéculations, pactes financiers, chantages économiques et même des représailles sanglantes. Les héritiers de la terrible famille Saint Hubert se fondent dans le système aussi facilement que le faisaient leurs parents et se livrent une guerre sans merci. Rarement une œuvre aura aussi bien montré les rouages financiers de notre société en décrivant tous les niveaux d’une société capitaliste, à savoir le pouvoir, les banques et la bourse. Les annexes viennent compléter ce travail de titan et apportent des révélations fracassantes sur les dessous du projet Haussmann. Au dessin, Malo Kerfriden a la lourde tâche de reprendre l’excellent travail de Julien Maffre et le résultat est bluffant. Avec un trait aussi fin et ciselé que son prédécesseur, l’artiste apporte en plus une touche de couleur sombre et inquiétante, qui colle bien à l’univers trouble de la série. Une série forte, digne des œuvres naturalistes d’Emile Zola.