L'histoire :
Le « pilon »… Ce mot sec claque au vent et impose crainte et terreur. Il désigne une machine à broyer qui est l’angoisse de tous les auteurs de BD. Le procédé est parfois employé par l’éditeur et ressemble à une sentence : il consiste à broyer tous les exemplaires d’un album, plutôt que de les stocker, lorsque celui-ci « n’a pas trouvé son public » (quand un album ne se vend pas, quoi). Mais il n’y a pas que les auteurs qui l’abhorrent : les libraires aussi, et notamment celui de BD Boutik, qui voue un amour intime à l’objet livre. Celui-ci est toujours débordé par la surproduction, qui lui offre à peine le temps de placer les nouveautés en rayon et en vitrine… qu’elles sont déjà remplacées par d’autres. Il ne ménage pas sa peine pour orienter et conseiller des lecteurs de plus en plus compliqués… Or ses efforts ne sont pas récompensés : une grande librairie spécialisée en BD s’ouvre à deux pas de chez lui ! En plus, les usages tendent de plus en plus vers la dématérialisation de la lecture, avec les livres numériques…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Ce quatrième recueil d’Animal lecteur offre une nouvelle flopée de 92 gags verticaux tournant en dérision la vie trépidante du marché de la bande dessinée. Evidemment, vu le cœur du sujet, cela parle essentiellement aux gros lecteurs ou du moins aux connaisseurs au sens large du microcosme du 9ème art. Notre ami libraire spécialisé occupe une nouvelle fois le devant de la scène, de plus en plus stressé face aux contraintes de son métier. Le « pilon » qui compose le tire (assurément le jeu de mots vermochien le plus jubilatoire de la série) entame l’opus de quelques sujets… Mais les gags ciblent également, en vrac : le manque de place dans la librairie, la frénésie du marché, la condition athlétique nécessaire pour trimballer à longueur de journées des tonnes de bouquins, l’imagination sans cesse renouvelée pour animer le commerce (le cosplay !), la numérisation des supports de lecture, l’installation d’un concurrent écrasant, les excursions discrètes pour l’espionner, le lectorat difficile, la critique acerbe des lecteurs envers les auteurs… Et le plus dingue, c’est qu’au terme de 4 tomes (7 sont a priori au menu !), Sergio trouve encore à se renouveler et à trouver des chutes bien marrantes. Il faut dire qu’il est énormément aidé par le sens de la tronche ahurie (qui tue) de Libon, qui dessine toujours les saynètes de son trait épais caricatural et nerveux.