L'histoire :
Acte I – La fleur et le poignard. Il y a quelques années déjà, dans le sang dans les flammes, périssait le shogun Totecu Fujiwara. Sa fille, atteinte d’une difformité de naissance, s’était posé la question de le suivre. Après tout, c’est elle qui, d’un coup de poignard, avait mis fin à l’existence de son père. Désormais la « princesse Ryin » – comme l’appelait son fidèle Fudo – menait les destinées du temple dont elle acceptait l’héritage en jetant sa lame dans le gouffre béant devant elle (…). Les années ont passé et Ryin s’est rachetée une élégance, un visage. Pourtant, le souvenir de ce parricide ne cesse de la hanter. Réunis autour du foyer de l’une des maisons de la ville désertée, la vieille Jera Isegawa, la douce Meiki et le manchot Raido Caym partagent un dernier dîner. La fin de la pièce approche. Prisonnier des sceaux qui le retiennent prisonnier au palais, le Kami de la forêt aspire à retrouver sa liberté trop longtemps bafouée. La résistance du général Kenzo Kawakami est veine. Les troupes du Yama-Ikki, secondées par les loups blancs Izuna, ont pris d’assaut le château. L’ultime acte arrive : le ronin bientôt cueillera « la Fleur cachée de l’abomination »…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Il était impossible que la pièce ne finisse pas ainsi : dans la neige, les flammes et le sang. Cet ultime acte de La Légende des nuées écarlates surprend encore par sa beauté graphique et, chaque fois, on s’attache à la finesse et l’élégance d’un trait habillé d’une mise en couleur sublime. Quel est le prix de la beauté ? Symboles d’une paix mortifiée comme d’un repos salvateur, les blancs ne laisseront place aux verts revivifiés qu’en toute fin d’album, sur les dernières planches d’une scène apportant sagesse et recul au tableau dans son ensemble (…). S’inscrivant pleinement en la philosophie extrême-orientale, La Fleur cachée de l’abomination s’attache plus particulièrement au personnage de la shogunaï Ryin Fujiwara par qui tout commença et avec qui tout finit. Marquée du sceau de la difformité, cette dernière est tiraillée entre son aspiration profonde au bonheur et son manque coupable d’affection, responsable de sa folie. Le Mal n’est ainsi jamais gratuit et la meilleure – et légitime – des aspirations, peut nouer le pire des destins. Une autre célèbre tétralogie de la bande dessinée posait la même question : le Mal est-il au cœur de l’Amour ? Ou est-ce l’Amour qui est au cœur du Mal ? Saverio Tenuta semble trancher en ce sens. Samouraï libéré de toute fidélité féodale, c’est là qu’intervient le ronin Raido Caym : afin de rétablir l’ordre des choses. Le cycle de la vie reprend son cours mais le conflit – la consubstantialité – demeure entre apparence extérieure et beauté intérieure.