L'histoire :
À Chicago, une femme a oublié 20 ans de sa vie. Résultat, elle vient de buter son mari en pensant qu'un étranger tentait de s'introduire chez elle. Dans une prison de Stuttgart, un homme qui purgeait sa peine est retrouvé couvert de sang et de blessures qu'il s'est infligées. Tout porte à croire qu'il a sombré dans une totale hystérie, allant jusqu'à briser ses os sur les barreaux et parois. Il s'imaginait que les murs de sa cellule allaient le violer. L'ennui, c'est que la Justice n'en saura probablement jamais rien car il est prostré, dans un état de catatonie avancée. À Finchley, personne n'a compris pourquoi le propriétaire d'une animalerie avait étripé toutes les bêtes qui lui servaient de commerce. Lui non plus ne livrera pas d'explication, puisqu'il a avalé sa langue en souriant aux cops qui se pointaient. La Bête rôde à présent dans les rues des hommes. Invisible, sa bave écumante de la folie perlant à sa bouche comme un vin de messe noire, il étend le Mal sur Terre depuis que les portes de l'au-delà ont été ouvertes. John Constantine n'a guère le choix : pour repousser le démon, il doit réunir les plus puissants magiciens, mais il ne joue pas vraiment franc-jeu avec eux et ils le connaissent bien, entre autres pour cette caractéristique...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
On pourra toujours reprocher à Mike Carrey les quelques longueurs de son run, mais ces épisodes #189 à #205 (soit environ 400 pages) réservent bien des moments forts. Certes, le 1er chapitre (Droit dans le mur) est un tantinet longuet avec ses 5 numéros pour environ 100 pages, mais il se lit très vite. Le reproche principal qu'on lui trouvera tient à sa linéarité et à sa relative prévisibilité, son air diaboliquement déjà-vu. Ici, le pentacle est cousu d'un peu trop de fils blancs, mais le reste de cet ouvrage remonte sacrément le niveau de ce début d'album un peu poussif. Après cette histoire de Chien des Ténèbres, aux manifestations aussi horribles que classiques, comme des vagues de suicides et meurtres sur tout le globe, Mike Carey nous réserve d'autres récits qui contiennent d'authentiques perles d'horreur. La transition s'effectue en effet radicalement avec Salle 24, un chapitre solo qui campe un personnage totalement psychopathe, un de ces tueurs en série qui vous laisse un souvenir marquant. En quelque sorte, on passe du grand-guignolesque satanique à l'effrayante cruauté humaine. Après le Mal fantasme, voici le Mal incarné !Hors-saison permet de fermer ce chapitre et de lancer les bases d'une intrigue développée un peu plus tard, dont le grain de sel repose sur l'amnésie provoquée de John Constantine. Les sombres festivités continuent avec Chemin de croix, qui fait justement référence à une paroisse d'illuminés. Puis les 3 chapitres suivants, qui trouveront leur conclusion dans le tome 3, finissent par enfoncer les clous qui crucifient Hellblazer. Le voici en effet confronté à «ses» 3 rejetons maléfiques. Jamais enfants n'ont mieux mérité le surnom de petits démons ! Côté graphisme, et c'est tout sauf une surprise, Marcelo Frusin fait une nouvelle fois merveille avec les couleurs de Lee Loughridge qui renforcent le mystère et l'onirisme se dégageant de ses planches. Avec son style plus réaliste, Leonardo Manco amène un côté très «dur à cuire» aux personnages, qui fait écho à la brutalité, voire la violence des situations mises en scène. À eux deux, ils réalisent plus des 3/4 de la pagination de ce tome. Chris Brunner signe deux épisodes et son trait au couteau colle bien. Enfin, signalons quelques planches du regretté Steve Dillon. Voici donc un avant dernier volume satisfaisant dans son ensemble et qui mérite le détour... en Enfer, of course !