interview Comics

Danny Rhodes & Nathan Legend

©Hexagon Comics édition 2015

Avec deux numéros, un annual et un hors série, l'année 2014 s'est révélée un excellent cru pour le Garde Républicain. Le super-héros créé par Terry Stillborn a su divertir les lecteurs avec des aventures riches en surprises mais aussi en voyant à l'œuvre des artistes reconnus ou débutants. Dans le 4ème volet sorti dans les derniers jours de décembre, nous avons ainsi pu retrouver le rodé Nathaniel Legendre (alias Nathan Legend) présentant les origines du héros et le débutant Danny Rhodes sur une mission des plus périlleuses. Comme tous les deux ont offerts une prestation remarquable et que l'on souhaitait en apprendre plus sur leurs vies, leurs œuvres ou encore sur leurs secrets inavouables. Terry Stillborn répond même présent et nous fait même l'honneur de compléter certaines réponses de ses amis...

Réalisée en lien avec les albums Le Garde Républicain T4, Le Garde Républicain – Hors série, Le Garde Républicain – Hors série
Lieu de l'interview : Le cyber espace

interview menée
par
7 janvier 2015

Pouvez-vous vous présenter et nous dire comment vous avez débuté dans la bande dessinée ?
Danny Rhodes : Je suis Danny Rhodes, je suis dessinateur et scénariste de comics. Je suis attiré par la bande dessinée depuis tout petit. Au départ, ce sont surtout des séries comme Tintin, Spirou, Astérix, Léonard ou Gaston Lagaffe, qui occupent mes lectures, et puis mes goûts en matière de BD ont évolué, me conduisant vers des styles plus singuliers, plus mature, comme celui d'Hugo Pratt avec Corto Maltèse, ou même Jean Van Hamme sur Largo Winch. Pendant cette période je passais la quasi totalité de mon temps à dessiner, à reproduire mes héros préférés, et vers l'âge de douze ans, encouragé par mes parents, je me suis lancé dans la création de mes propres personnages, des récits au style Franco-Belge qui sont toujours restés inachevés, mais qui marquaient déjà une volonté d'expression au travers de ce support qu'est la bande dessinée. Cependant, mes débuts en tant qu'artiste de comics, je les dois à Thierry, les faisant véritablement aujourd'hui avec la parution de ce #4 du Garde Républicain !
Nathan Legend : Nathaniel Legendre alias Nathan Legend lorsque je reviens aux super-héros (et aussi parce que je suis un gros prétentieux). Legendre sur la couv’ des albums franco-belge lorsque j’en suis le scénariste et Nathaniel lorsque j’en suis le dessinateur. J’ai débuté en bande-dessinée parce que mes parents ont laissé faire. C’était la fin des années 70, il y avait encore du laxisme. Il ne faut pas leur en vouloir…

Quelles sont vos influences ?
Danny Rhodes : En ce qui concerne mes influences, il faut savoir que j'ai découvert les comics assez tard, lorsque j'étais au lycée. Bien évidemment je connaissais tous ces super-héros issus de la culture comics, mais je ne m'étais jamais réellement penché dessus. Et puis la première fois que j'ai ouvert un Spider-Man, j'ai rapidement découvert un nouvel univers, univers que j'ai tout de même survolé. Je me rappelle que je n'ai jamais réellement pris le temps de lire les numéros que j'achetais. Ce qui était important pour moi ? Les dessins, comme si la narration visuelle, le découpage du récit, devait me suffire à suivre l'histoire. C'est donc en me penchant plus intensément sur ce travail graphique, que j'ai découvert ces artistes qui deviendront mes influences principales. Je ne pourrais évidemment cacher à personne l'influence majeure qu'a Jim Lee sur mon travail, et je pense que certains de mes traits trahissent franchement cette inspiration (rire !). Bien entendu il y a d'autres artistes que j'affectionne particulièrement ─ et dont j'essai d'analyser le trait pour pouvoir construire mon propre style ─ des artistes comme Olivier Coipel, Gary Frank, Greg Capullo, ou même cet artiste qui oeuvre principalement sur le net et que je trouve exceptionnellement talentueux, Guile Sharp !
Nathan Legend : Il y a quelques années encore, j’aurais volontiers répondu, Humberto Ramos, Duncan Rouleau, Todd Nauck ou David Lafuente, mais j’ai petit à petit perdu tout attrait pour les publications US, particulièrement depuis la démultiplication des adaptations ciné. J’en suis revenus à mes premiers amours pour le franco-belges. Aujourd’hui, les auteurs que j’admire sont José-Luis Munuera, Bruno Gazzotti, Silvio Camboni, Xavier Fourquemin ou mon mentor, Philippe Luguy… Toutefois, pour les origines du Garde, j’avoue volontiers avoir voulu m’inspirer de Darwyn Cooke … en vain. J’ai très rapidement perdu le fil pour petit à petit lorgner vers le Scorpion de Marini (la virtuosité en moins) … sigh !


Le Garde Républicain Danny Rhodes Terry Stillborn


Comment avez-vous entendu parler du Garde Républicain ?
Danny Rhodes : Je dirai que ce fut "un heureux hasard". Durant l'été 2013, j'ai décidé de me remettre au dessin ─ en effet, je n'avais plus dessiné depuis 2002, déformé par mes études en infographie, privilégiant donc le travail assisté par ordinateur ─ je me suis alors équipé d'une Cintiq 24HD, qui me permettrait d'allier le dessin à mes compétences numériques, et ai entrepris de chercher un peu partout sur le net, des sources d'inspirations diverses et variées pour "me faire la main" et me remettre tranquillement au crayon (ou au stylet). Je ne sais plus exactement ce qui m'a conduit à découvrir Le Garde, mais quel qu'en soit le chemin emprunté, j'ai fini par tomber sur une page facebook "Le Garde Républicain".
Nathan Legend : Hhhmmm …. Quand je prenais un plaisir fou à réinventer les personnages Hexagon et Cie pour le compte de JM-Lo (ndla : Jean-Marc Lofficier) et le staff créa-pocket. Le Garde avait fait une brève apparition dans une histoire courte dessinée par JJ Dzialowski. Et comme Jean-Jacques est un piètre, j’ai essayé de donner à ce personnage un look un peu plus « burné ». Le fait est que ce n’est pas celui que Thierry a retenu parce que lui aussi n’a aucune goût ! lol

Qu'est-ce qui vous a plu dans le concept du Garde Républicain ?
Danny Rhodes : Dès lors que j'ai découvert le Garde sur sa page facebook, j'ai pu constater en engouement particulier autour de ce personnage. Il y avait des galeries entières de "fan arts", tous plus convaincant les uns que les autres, qui semblaient presque être des invitations à produire ma version du Garde, à participer moi aussi à l'aventure, invitation à laquelle je n'ai pas résisté bien longtemps (rire !)
Nathan Legend : En 1996, lorsque j’ai fondé Sugar Comga, l’objectif était de rassembler des auteurs autour d’un univers et de personnages communs. La sauce n’a jamais vraiment prise car la bonne recette (pourtant simple) était sensiblement différente : Il fallait définir un rôle et un titre transmissible pour un héros, afin de permettre à chaque auteur de s’exprimer sans contrainte. Thierry a eu cette intelligence et je le hais pour ça. J’ai donc décidé d’infiltrer sa team pour tenter de la détruire de l’intérieur… niark niark niark !

Étiez-vous fan du genre super héros ? Et si oui, quels sont pour vous les récits fondateurs ?
Danny Rhodes : Alors il est difficile de répondre à cette question. Oui, évidemment je suis un fan incontestable du genre super héros, j'aime ce qu'ils représentent, j'aime m'identifier à certains d'entre eux ─ les plus humains et donc vulnérables en général ─ comme Batman ou DareDevil, mais je ne saurai pas identifier un ou plusieurs récits qui pourraient m'apparaître comme fondateurs. Il y a tellement de séries, tellement d'éléments et de variantes intéressantes dans chacun des récits que j'ai pu parcourir, que j'en suis arrivé à réellement apprécier et m'amuser à comparer les différentes versions, les différentes utilisations faites par chaque scénariste, pour un même événement. C'est quelque chose que j'apprécie dans le comics, dans le modèle créatif qui s'est mis en place, c'est que tout est permis, rien n'est impossible et rien n'est surtout définitif, tout est perfectible et personne ne se prive pour donner sa vision des choses.
Nathan Legend : En juin 1979 (ndla : je suis fort vieux), un copain me fait découvrir la revue Special Strange au numéro 16. Les X-Men affrontent la garde impériale Shi’ar et Spidey combat aux côtés du Faucon. Une révélation pour le gosse qui ne lisait que des Asterix et des Scrameustache et regardait Goldorak et Albator à la télévision. Les récits fondateurs sont pléiade. Toutefois, un jour Serval est devenu Wolverine. Je reconnais que les choses ont commencé à me lasser progressivement après John Byrne au sommet de sa gloire et Perez sur Crisis. Lorsqu’un fan me dit aujourd’hui que la seule chose qu’il attend c’est de voir Civil War adapté au cinéma, je me contiens…. ^^

Terry Stillborn : Tu conjugues effectivement bien la phrase. J'ai été fan de super-héros, de Batman à l'Araignée, en passant par les Nouveaux X-Men. Je le suis beaucoup moins depuis plusieurs années, car ils ne me font plus vibrer. Je vois leurs limites en termes de récits, et les ficelles répétitives utilisées par les éditeurs US sont lassantes. Seuls les personnages les plus humains (Daredevilen tête) parviennent à susciter de l'intérêt en moi. Batman n'est plus "humain" comme il l'était dans les années 1970 / 1980. Il est devenu - sans super-pouvoirs - plus grand que nature. Trop increvable. Je continue à regarder certaines séries, à en lire certaines, parmi lesquelles on trouve Invincible qui propose une fraîcheur que je ne trouve plus dans la majorité des séries mettant en scène des "vieux" héros. Batman est un papy de 75 ans. Peter Parker est un "jeune" de 25 ans… depuis 40 ans. En revanche, pour répondre à ta question sur les récits fondateurs, je citerais - dans le genre super-héros - quelques incontournables (Attention, la liste est longue !!) : Marvel Man/ MiracleMan d'Alan Moore, les Teen Titans de Wolfman & Pérez, les premiers Astro City de Busiek & Anderson, Spider-Man (par Gerry Conway, Gil Kane & John Romita Sr, celui par Roger Stern & Ron Frenz), Power Pack, Squadron Supreme (par Mark Gruenwald), Wanted, The Utlimates, Marshal Law, Captain Britain (Alan Moore & Alan Davis), ClanDestine (Alan Davis), Marvels, La Mort de Captain Marvel, Uncanny X-Men (Wein, Claremont, Cockrum, Byrne & Smith), Common Grounds, Batman (Neal Adams), Rising Stars, Superman (Whatever Happened to the Man of Tomorrow, All Stars Superman), ThunderAgents, The American, Green Arrow / Green Lantern, Fantastic Four (Lee + Kirby), Spawn, Silver Surfer, Crisis on Infinite Earths, Hulk (Peter David), Empire, Invincible, Kingdom Come, Watchmen, Secret Wars, Savage Dragon

Pouvez-vous nous parler de vos récits respectifs ?
Danny Rhodes : Dans "Héros", écrit par Terry, il y a quelque chose qui était primordial pour moi dans la création d'une histoire de Super-Héros, c'est l'aspect humain. Comme je l'évoquais précédemment, j'aime les héros vulnérables, sombres et torturés, les héros qui ne savent pas s'extirper de toutes les situations par une pirouette tout aussi facile qu'attendue. Ce qui me plait dans l'élaboration d'un récit, c'est qu'il soit intelligent et réaliste, que l'on puisse y trouver un maximum d'éléments auxquels nous allons pouvoir nous identifier ou simplement reconnaître. Dans cet épisode "Héros" nous trouvons donc un garde ancré dans la réalité, avec ses forces, ses faiblesses et donc une émotion particulière.
Nathan Legend : Moyennant finance… ;)
Terry Stillborn : "Héros", le récit écrit pour Danny s'appuie sur nos envies respectives de montrer l'aspect vulnérable. L'Homme, faillible, plus que le super-héros, dans un contexte que l'on a souhaité rendre le plus crédible possible. J'aime échanger avec les dessinateurs qui acceptent de collaborer sur Le Garde, de manière à parvenir à mettre en place un récit et des ambiances qui leur plaisent. C'est un excellent moyen de les motiver, de les impliquer afin de faire en sorte qu'ils mettent sur la page leur meilleur travail. Et c'est plus fun. Je ne suis pas réellement scénariste. J'ai pleinement conscience de mes manquements dans ce domaine. Mais des récits prennent formes dans ma tête. Des histoires que j'ai envie de raconter et de voir mises en images. Alors, partager, échanger me semble la meilleure méthode - de loin - pour qu'une collaboration au profit de ce récit se mette en place. Que cela soit avec Chris Hénin (Le Garde #2) ou bien Danny et Nathan dans le #4, cela donne des résultats qui je l'espère plaisent aux lecteurs. En attendant, ils nous plaisent à nous, et nous donnent envie de renouveler l'expérience.

Avez-vous des influences spécifiques lors de l'élaboration de vos récits ?
Danny Rhodes : En règle générale, lors de ce genre de création, je projette dans mes personnages, beaucoup de moi et des aspects de ma psychologie. Ici, visuellement, le Garde adopte des postures, des mimiques, des comportements qui auraient pu être les miens dans une situation similaire. J'aime beaucoup projeter un maximum de ma personnalité dans les personnages que je dessine, non pas par narcissisme, mais parce que je pense que c'est le meilleurs moyen de rendre mes personnages crédibles. Je tente de faire en sorte qu'ils puissent exprimer des émotions réelles, des sensations que je connais et donc, que je suis plus susceptible de savoir retranscrire dans mon dessin.
Terry Stillborn : C'est très "basique" en ce qui me concerne : j''essaye de proposer des récits auto-conclusifs, un début, un développement, une conclusion… Même si je sème des "easter eggs" qui trouveront leur justification et leur explication dans un "meta-récit" qui court à travers l'ensemble des histoires du Garde de la période moderne (des années 60/70 à nos jours).
Nathan Legend : Comme dit plus haut, j’ai tenté d’être un peu Darwyn Cooke, un peu Bruce Tim pour ce récit à la fois comics et oldies, et je n’ai pas réussi. Il y avait une volonté de ma part d’être bien moins graphisme « gros nez » comme je dessine au quotidien actuellement, mais forcer son trait n’est pas une mince affaire… Ceci dit, chaque back-up est et sera truffé de clins d’œil, comme le Garde sur son destrier blanc cabré, tel un fameux chevalier noir…


Le Garde Républicain Nathan Legend Terry Stillborn


Comment se sont déroulés les échanges avec Thierry ? Le cadre était-il très défini ou au contraire assez ouvert ?
Terry Stillborn : C'est avant tout à eux de répondre, mais je pense laisser suffisamment de liberté pour que l'expérience ne soit pas traumatisante (rires), mais au contraire soit motivante, et leur donne - le cas échéant - l'envie de revenir pour une nouvelle collaboration.
Danny Rhodes : Tout d’abord, un élément qui m’a réellement attiré et qui a grandement facilité le travail, est le fait que, en réel amoureux des comics, Thierry à d’emblée établi les bases de la collaboration, et ce qui était important pour lui, c’était le fait que le dessinateur, moi en l’occurrence, puisse jouir d’une liberté d’expression quasi totale dans le processus créatif graphique. De plus, il tenait également à ce que le récit me corresponde, pour que je puisse être à l’aise dans la création. Il m’a alors demandé de lui proposer un ambiance, un contexte pour ce récit, qui me permettrait de m’épanouir et de donner le meilleurs de moi dans la conception de cet épisode. En ce qui concerne le travail en lui-même sur le projet, après que j’ai lu le script, Terry a encore une fois su être très à l’écoute. Nous avons un peu discuté ensemble du récit, évoqué quelques modifications pour que l’histoire sache nous satisfaire tout les deux et il a su me proposer une alternative efficace et motivante ! S’en est suivi un gros travail de découpage pour mettre en place la narration complète de l’épisode, toujours en collaboration complète, Terry me donnant ses corrections et ses propositions. Il a ce regard important d’éditeur. Il est parfaitement compétant dans ce domaine, et sait complètement guider les choses lorsque c’est nécessaire, tout en n’agissant jamais de façon intrusive dans mon processus créatif. Honnêtement, sur ce projet, c’est lui le Patron, mais il sait nous accorder la place que l’on mérite, et je dois bien l’avouer, sentir cette confiance qu’il place en moi, ça me motive, et ça me donne cette réelle envie de faire honneur à son personnage ! La collaboration se fait donc de façon assez fluide sous forme de propositions de questions, de conseils, de soutien et de réassurance. Je n’aurai pas pu rêver de meilleures conditions pour un premier « vrai » projet ! C’est un vrai plaisir de travailler sur un tel « chantier », avec un collaborateur comme Terry, soucieux du bien-être de l’artiste pour que le résultat final puisse savoir satisfaire tout le monde, que ce soit nous, les auteurs, mais surtout les lecteurs !
Nathan Legend : Avec Thierry, ça fonctionne toujours un peu de la même manière qu’à l’époque de la créa dans les pockets Semic. Une idée est lancée à partir de laquelle on échange beaucoup. Thierry sait que j’ai tendance à me disperser, alors il me recadre, me demande de faire des recherches historiques pour bien préciser tous les rouages du récit. Une fois que tout est en place, je m’isole dans mon coin, j’oublie toutes les directives de Thierry, je n’en fais qu’à ma tête et je mets Thierry devant le fait accompli une fois les pages terminées. Ensuite Thierry pleur, il me maudit. Beaucoup. Moi de mon côté, je lui réclame de l’argent et je le laisse récupérer tout ce que j’ai fait de travers. C’est plutôt bien rôdé comme système. Enfin, de mon point de vu, forcément…

Danny, ton style apparaît déjà comme très mature. Peux-tu nous expliquer comment tu réalises tes planches et ta colorisation ?
Danny Rhodes : Je ne sais pas si l'on peut déjà parler d'un style très mature, mais il est évident que mon trait s'améliore de jour en jour, du moins je l'espère et je fais tout pour. (rire !) En ce qui concerne la création en elle-même, j'obéis à un processus créatif très "rigide". Je n'aime pas beaucoup crayonner, du moins, j'aime crayonner très proprement. C'est l'une des raisons qui m'ont fait abandonner le dessin en 2002, ce perfectionnisme extrême qui m'empêchait littéralement de terminer un dessin du fait du côté "brouillon" des crayonnés, d'avoir cette impression de passer mon temps à gommer et froisser du papier. Le passage au numérique a été réellement salvateur, me permettant d'aller plus vite, de m'améliorer, et finalement de retrouver de plus en plus de plaisir à dessiner beaucoup plus proprement sur papier, parce qu'il faut bien l'avouer, travailler sur papier ça a vraiment une saveur particulière et irremplaçable ! Dans le processus créatif de mes planches, je fonctionne donc par étapes définies. Du classique storyboard, me permettant de proposer un découpage lisible et cohérent, j'attaque ensuite les crayonnés, puis l'encrage, pour terminer par la couleur. Travailler l'ensemble de ces étapes dans des phases bien distinctes, sans mélanger, me permet de conserver une certaine cohérence dans mon trait et dans ma technique, toujours susceptibles d'évoluer au cours d'un récit. Ce processus rigide m'aide à limiter l'impact de l'évolution de mon dessin qui pourrait s'opérer entre la première et la dernière planche d'une histoire.

Nathan, tu te charges de dévoiler les origines du Garde à travers un premier mini-récit. Pourquoi avoir choisi cette période bien spécifique de l'histoire ? Est-il difficile d'imbriquer le héros dans la véritable histoire ? A quoi peut-on s'attendre dans les prochains mini-récits ?
Nathan Legend : Parce que, pour moi, il existe assez peu de récits de super-héros à cette époque (comme à bien d’autres, lointaines) ou du moins, je ne les ai pas lus. J’apprécie fortement de jouer sur le tapis de l’uchronie. Ce n’est pas neuf comme engouement. Crawford chasseur de sorcières, c’était déjà une sorte de réécriture du Origin de Jenkins. Et puis, je suis un immense fan du Pacte des loups de Gans. Je tenais donc là une belle occasion de m’éclater…

Est-il difficile d'imbriquer le héros dans la véritable histoire ? A quoi peut-on s'attendre dans les prochains mini-récits ?
Nathan Legend : Le marquis de la Fayette a à la base un parcourt héroïque très diversifié (contrairement à Thierry qui est convaincu que sa seule fin était d’épater la galerie) … de là à faire de ses actes de bravoures ceux d’un super-justicier, il n’y a qu’un pas. D’autant que c’est un individu qui a vécu « à la bonne période » pour sortir du rang en constance. Il a participé à la guerre d’indépendance, il est revenus en France pour vivre la révolution française « des deux côtés » et a subit l’Empire, puis connu la restauration jusqu’aux trois glorieuses… Joli terreau, non ?

Thierry, c'est quoi la suite du Garde ?
Terry Stillborn : L'année 2015 va être dense pour Le Garde. Une production importante a été lancée depuis quelques mois, et a priori deux voire trois numéros sont programmés pour le premier semestre 2015 (les numéros 5 à 7 de la série régulière). Je suis vraiment comme une pile électrique, très excité à l'idée de présenter les récits qui sont en cours de finition au moment où je parle. C'est un truc de fou, avec des noms d'auteurs et des récits superbement mis en images, et j'espère que les lecteurs suivront =:-) 2015 verra également la publication de la première partie d'un diptyque du Garde réalisé par Jean-Yves Mitton, le papa de Mikros, Epsilon et Kronos, véritable "pape" du comics à la française. C'est une expérience vraiment hallucinante qu'enthousiasmante pour moi, qui fut nourri par ses séries et celles de Ciro Tota étant minot. D'ici la fin du mois, je vais également proposer une statuette du Garde en édition limitée ! Le Garde en 3D prend vie =:-)

Thierry, peux-tu nous parler des deux numéros spéciaux sortis en fin d'année ? Y aura t-il d'autres annuals ?
Terry Stillborn : Avec grand plaisir. Il y a tout d'abord un premier Annual / X-Mas Special concocté par Jean-Marc Lofficier, dessiné par Roberto Castro et Eduardo Garcia. J'ai une totale confiance en Jean-Marc, en tant que personne et aussi dans ses qualités d'auteurs. Il anime le Garde et Marianne (version contemporaine) dans un récit en deux parties, qui confrontent Maxime St-Clair au Prince de la Nuit et à Kit Kappa, deux personnages de l'univers Hexagone. C'est un récit qui me fait penser aux Marvel Team-Up des années 70/80, superbement exécuté. J'ai eu ensuite l'occasion d'éditer un numéro Spécial du Garde pour le compte du collectif Zef'Hir, animé par Olivier Mignen (chercheur à l'Inserm et grand fan de BD), dont l'objectif est de réunir des fonds au profit de la recherche sur la mucoviscidose. Olivier m'a donné le feu vert afin de réaliser entièrement ce numéro spécial dans le cadre de la collecte de fond qu'il organise depuis deux ans au profit de la recherche permettant de lutter contre cette sale maladie. J'ai donc écrit un récit mettant en scène - outre Le Garde - le Fox-Boy de Laurent Lefeuvre (que je remercie de m'avoir laissé utiliser dont personnage à cette occasion) et Zefman, un super-héros mascotte du collectif. Chris Hénin (dessin), Denis Maxweb (créateur de Zefman et encreur) et Bryan Wetstein (coloriste) ont accepté de se joindre à l'aventure. Leurs efforts ont permis de réaliser ce numéro Spécial dont l'intégralité du prix est reversé à la recherche. Donc, si vous souhaitez lire un récit inédit du Garde et réaliser une bonne action du même coup, n'hésitez pas à vous procurer ce numéro.


Le Garde Républicain Danny Rhodes Terry Stillborn Fox-Boy Zefman


Y aura t-il d'autres annuals ?
Terry Stillborn : C'est tout à fait possible. Les idées ne manquent pas, et elles permettent d'enrichir l'univers du Garde, d'ouvrir des portes narratives, etc.

Danny et Nathan, quels sont vos futurs projets ? Envie de revenir sur le Garde ?
Danny Rhodes : En ce qui me concerne, j'ai très envie de revenir sur le Garde. C'est un personnage avec lequel j'ai envie de m'exprimer. Thierry et moi avons déjà discuter d'un second récit qui est en bonne voie de concrétisation et qui va emmener le Garde dans des endroits qu'il n'a pas encore eu le loisir d'explorer. Je me fais une véritable joie quant à l'idée de le mettre en scène dans ces espaces particuliers et de pouvoir alimenter ce récits de connaissances profondes sur un sujet qui me passionne depuis ma plus tendre enfance. En parallèle, je travaille sur un projet plus personnel, nommé "Archives", en tant que créateur, co-scénariste et dessinateur. "Archives" c'est un comic-book dans lequel je m'attaque à la problématique "classique" du voyage temporel, mais de façon très scientifique/théorique ─ mettant à profit l'ensemble de mes connaissances relative à la physique quantique et aux sciences marginales ─ tout en conservant bien évidemment les ingrédients primordiaux à la construction d'une intrigue qui sache tenir le lecteur en haleine. "Archives" est développée un peu à la manière d'une série TV, intelligente, qui donne à réfléchir sans forcément se prendre la tête, ne perdant pas de vue qu'il s'agit avant tout d'un divertissement, mais un divertissement sérieusement pensé.
Nathan Legend : Outre défendre le financement participatif de Sanguine chez Sandawe, en tant que scénariste, un album historique (période WWII) chez un éditeur spécialisé dans l’aéronautique et un album Jeunesse (presque du super-héros uchronique en mode Disney) coécrit avec Jean-Blaise Djian. Et mon album solo, en tant que scénariste et dessinateur, qui devrait sortir au premier semestre 2015. L’envie de revenir sur le Garde Républicain, oui, de toute évidence ! Le temps... En tout cas, l’envie de revenir pour une aventure plus contemporaine cette fois et avec un dessin plus cartoony, ça c’est certain….

Si vous aviez le pouvoir cosmique de visiter le crâne d'un autre artiste, qui choisiriez-vous et pourquoi faire ?
Danny Rhodes : Hum...La question n'est pas facile. A défaut de prendre Jim Lee, dont le dessin a déjà suffisamment pénétré mon esprit, je pense que je choisirai Ryan Meinerding. C'est un artiste d'exception. Si je pouvais visiter son esprit créatif, j'essaierai de m'imprégner de sa technique de mise en couleur aussi réaliste que bluffante. J'ai toujours aimé les couvertures de comics percutantes et j'aimerai pouvoir réaliser des visuels aussi élaborés pour mes prochains travaux ! En tout cas, je promets de m'y essayer avec mon prochain épisode du Garde, sans toutefois promettre d'être aussi efficace que Ryan (rire !)
Nathan Legend : Laurent Lefeuvre… Pour comprendre ce qui s’y passe ! ^^ (ndla : le concours d’Ethan Hunt me sera sans doute nécessaire)

Merci Messieurs !

Le Garde Républicain Danny Rhodes Terry Stillborn