interview Comics

Trevor Hairsine

©Bliss Comics édition 2017

La carrière de Trevor Hairsine est particulièrement riche. L'artiste britannique a aussi bien mis en scène Judge Dredd que des super-héros américains mais aussi un Casse étonnant en bande dessinée. Travaillant ces dernières années pour le compte de Valiant Comics, il a notamment participé au lancement de Divinity, un titre étonnant qui a fait un joli carton chez Bliss Comics. L'éditeur français des séries Valiant en a profité pour inviter l'artiste lors de la dernière Comic Con...

Réalisée en lien avec l'album Divinity T1
Lieu de l'interview : Comic Con Paris

interview menée
par
31 janvier 2017

La traduction de cette interview a été réalisée par Alain Delaplace.

Trevor Hairsine


Peux-tu te présenter et nous dire comment tu as commencé à travailler dans l'industrie des comics ?
Trevor Hairsine : Je m'appelle Trevor Hairsine et j'illustre des comics depuis 1993. Comment j'ai débuté ? Très simplement: j'ai photocopié un paquet de mes dessins et j'ai envoyé tout ça à 2000AD ainsi qu'à Marvel UK et, je lendemain, j'ai reçu deux offres d'embauche ! Voilà. J'ai eu du bol.

Quelles ont été tes influences, artistiquement parlant ?
Trevor Hairsine : Je pense que ma plus grande influence première ont été Neal Adams, Alan Davis... Oui, ces deux là sont vraiment au centre de mes influences. Après, je citerais Bill Sienkiewicz, Dave Gibbons... Je pourrais continuer cette liste à l'infini... Erik Larsen aussi !

Tu as commencé sur Judge Dredd: The Megazine et 2000AD. Quel regard portes-tu sur cette période de ta carrière ?
Trevor Hairsine : C'était très amusant... J'étais un illustrateur incroyablement lent ! [rires] Je pense qu'aujourd'hui, je suis dix fois plus rapide qu'alors. Je dessinais alors de manière un peu différente. Je pense que je m'efforçais de rentrer dans le moule, le style, en quelque sorte, de 2000AD. J'essayais d'imiter Mike McMahon ou Cam Kennedy. Ça a duré un temps et puis, forcément, j'en suis revenu à Neal Adams ! [rires]

Trevor Hairsine


Tu continues à jeter un œil sur ce qui paraît au sein des pages de Judge Dredd: The Megazine ou de 2000AD ?
Trevor Hairsine : De temps à autres, oui. Pas aussi souvent que je le souhaiterais – principalement du fait que notre boutique de comics locale a fermé ses portes – [rires]. Mais oui, de temps en temps. L'an dernier, d'ailleurs, j'ai illustré une histoire de Judge Dredd. C'était coll, je n'avais pas illustré Dredd depuis un long moment.

Après ça, je crois qu'un des premiers titres que tu as illustrés et qui me vient à l'esprit, c'est Cla$$war. C'était une bonne expérience ?
Trevor Hairsine : Oui, j'en ai de très bons souvenirs. Ça m'a permis de rencontrer Rob Williams qui est, depuis, devenu un de mes meilleurs amis. Ce qu'il avait écrit, à l'époque, était tout bonnement formidable. J'ai travaillé dans l'industrie du jeu vidéo, pendant un temps, et c'est son script qui m'a ramené vers les comics – un univers que je n'ai pas quitté depuis.

Tu as aussi travaillé pour Marvel et ce sur de nombreux titres. En as-tu un préféré ?
Trevor Hairsine : Oui, Ultimate Spider-Man, avec Brian Bendis. Quand on a fait les Sinister 6, pour être exact. On s'est éclatés à le faire: Brian était un super collaborateur et notre éditeur, Ralph Macchio était génial.

Trevor Hairsine


Tu as aussi travaillé avec un auteur britannique: Warrren Ellis. C'est plus simple de travailler avec un compatriote ?
Trevor Hairsine : [rires] non, non. Ça ne fait aucune différence. En réalité, j'ai nettement plus échangé avec Brian qu'avec Warren. J'ai même rencontré Brian en personne. Ça a été plus simple, comme collaboration.

Si je ne me trompes pas, avant de travailler auprès de Valiant, tu as travaillé dans l'univers de la BD française, notamment avec Le Casse. Est-ce que ça a été une expérience foncièrement différente, pour toi ?
Trevor Hairsine : Oui, ça l'a été. On était plus proche de ce que j'avais vécu avec 2000AD, au début des années 90. Sur le plan du découpage, par exemple, on était sur un découpage aux alentours de 10 ou 11 cases par planche et il y avait, aussi, un intérêt nettement plus accentué sur les arrière-plans. C'était intéressant. J'ai dû travailler plus rapidement [rires] et j'ai dû compresser l'ensemble de mes activités pour y arriver. C'était beaucoup plus difficile qu'avec les titres américains que je trouve, comparativement, plus relax à faire. La BD, c'est un challenge.

Ça te dirait de t'y frotter à nouveau, un jour, quand même ?
Trevor Hairsine : Oh oui, sans aucun doute. Peut-être quand j'aurais fini auprès de Valiant. Mais ça risque de ne pas se produire avant quelques années par ce que j'aime vraiment bien travailler pour Valiant.

Trevor Hairsine


En parlant de Valiant, comment y es-tu entré ?
Trevor Hairsine : Oh, par l'intermédiaire de Warren Simons [NDLR: éditeur en chef de Valiant]. C'est lui qui a exprimé le désir que je les rejoigne et qui a beaucoup insisté. Il m'a montré plein de trucs et... J'ai fini par céder. [rires]

Tu as travaillé sur Harbinger ainsi que sur Bloodshot et, aujourd'hui, sur Divinity. Pourrais-tu présenter cette série à nos lecteurs ?
Trevor Hairsine : Je peux essayer ! C'est l'histoire d'un type pas ordinaire, un russe à la peau noire qui a été envoyé dans l'espace au début des années 50 pour y accomplir une mission top secret. Il finit dans les tréfonds de l'espace et, là, il rencontre une entité dénommée the Unknown qui le transforme en une forme d'être humain plutôt intéressante. Et il est renvoyé sur Terre où il débarque 50 ans après son départ. Il découvre que sa femme et leur enfant sont tous les deux morts. Il essaie de les recréer en utilisant ses pouvoirs nouvellement acquis puis il abandonne, réalisant que ce serait une erreur. Mentalement, le personnage est un peu barré ! [rires]

Une des particularités de cette série est qu'elle ne figurait pas dans les séries de la première génération Valiant, comme Bloodshot, par exemple. Tu as apprécié de pouvoir développer librement ton propre personnage ?
Trevor Hairsine : Oui, ça faisait longtemps que je n'avais pas été impliqué dans le développement d'un personnage. Il n'est pas entièrement de moi mais en partie, oui. Je me sens un peu comme à la maison, sur Divinity. En fait, en y réfléchissant bien, je pense que c'est en réalité la première fois que je me sens comme ça, avec un comics sur lequel je travaille.

Trevor Hairsine


Pourrais-tu nous annoncer un peu ce à quoi on doit s'attendre dans la suite (plus exactement la deuxième partie) de Divinity ?
Trevor Hairsine : Divinity avait été envoyé dans l'espace avec trois autres cosmonautes et, pour pouvoir retourner sur Terre, il a abandonné deux d'entre eux. Ils ont survécu et l'un d'eux est un femme qui est un peu en pétard suite à tout ça. Elle va rentrer sur Terre et commencer à mettre une dérouillée à Divinity. [rires]

Le troisième tome va bientôt sortir aux USA : est-ce que tu comptes travailler encore longtemps sur cette série ?
Trevor Hairsine : On a prévu quatre tomes prévus, depuis le départ. Après ça, on verra. Aujourd'hui, j'en suis au début du quatrième – je viens juste de finir le premier numéro –. Je sais ce qui va arriver par la suite et ça va être très marrant.

Tu as donc travaillé pour Marvel, 2000AD, DC Comics et Delcourt, même. Travailler pour eux, était-ce différent, comparé à Valiant ?
Trevor Hairsine : On m'a posé la question à un panel, là. Je n'y avais jamais vraiment réfléchi. Là, en ce moment, chez Valiant, ça me fait un peu penser à l'époque où je travaillais pour Marvel, au début des années 2000. Tu vois, je parles d'un moment où on n'avait pas encore tout l'univers cinématographique mais on avait, cela dit, tout l'univers 2099. On avait alors une grande liberté créatrice pour développer cet univers et je retrouve cette liberté, aujourd'hui, chez Valiant.

Si j'étais le génie de la lampe et que je pouvais t'offrir la possibilité de travailler avec l'auteur/artiste que tu souhaites, dans le registre que tu veux. Ce sera avec qui et sur quoi ?
Trevor Hairsine : Oh, bon sang. Elle est pas facile, celle-là ! Ok, une chose est sûre, je voudrais que Bill Sienkiewicz encre mes dessins, mais pour les auteurs... Ok, je vais faire un choix étrange, je vais dire John Wagner et sur Superman.

Si tu pouvais visiter l'esprit d'un autre artiste pour en comprendre le génie, lui emprunter des techniques ou mieux le comprendre, qui choisirais-tu et pourquoi ?
Trevor Hairsine : Bill Sienkiewicz. Ses illustrations ont toujours ce côté sauvage, expressif mais aussi un peu dingue. Je pense que j'aimerais bien aller enquêter dans sa tête, un peu.

Merci Trevor !