L'histoire :
Financée par la milliardaire Katlyn Fork, une expérience scientifique et militaire a permis de réussir une incroyable expédition dans le royaume des morts. La solution technique a consisté à utiliser un vaisseau, l'Horus-Râ, accroché au corps d'un jeune mourant, Matt Fork, le fils de la milliardaire. Cependant, en explosant dans l'au-delà, l'Horus-Râ a... détruit la mort !! Dès lors, un gigantesque maelstrom s'est créé dans le ciel de la Terre et les morts se mettent tous à ressusciter, progressivement, dans l'ordre inverse de leur trépas. Ce phénomène n'est pas sans créer de gros problèmes sociaux : litiges de propriété, surpopulation, paupérisation des individus, vengeances... Or étant donné que plus personne ne peut désormais mourir, l'ultime sentence est la torture infinie. Par exemple, lorsque les terroristes du World Tarde Center ressuscitent à proximité de Ground Zero, les new-yorkais se relaient pour les brûler sur un bûcher, afin qu'ils meurent et ressuscitent sans fin, dans d'atroces douleurs. De leur côté, les instances ecclésiastiques s'interrogent sur leur position. Assiste t-on à l'apocalypse biblique ? Dans ce contexte de chaos social et politique généralisé, madame Fork met au point une nouvelle expédition dans l'au-delà, afin de peaufiner les connaissances de ce territoire... tandis que les plus illuminés recherchent l'antéchrist...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Jusqu'alors, Expérience mort reprenait grosse-modo la trame du roman les Thanatonautes de Bernard Werber : à bord d'un vaisseau révolutionnaire, des explorateurs de la mort se confrontaient aux successives strates de l'au-delà. Le sujet avait beau être piquant – qui ne rêverait pas de savoir comment ça se passe au-delà ? – il s'accompagnait d'un léger parfum de déjà-vu. A la fin du tome 2, le coup de théâtre laissait penser à une fin en queue de poisson : en explosant, le vaisseau « cassait » universellement le mécanisme de la mort, au point de rebattre toutes les cartes du propos. Dès l'entame de ce tome 3, le couple Bajram-Mangin assume et prolonge son idée, pour le plaisir renouvelé du lecteur. Postulat de départ : puisque la mort est détruite, les défunts qu'elle emprisonnait doivent être rendus au royaume de la vie ! Les amateurs de zombies peuvent être déçus; les scénaristes ne cèdent pas à cette facilité. Ici, les morts ressuscitent dans un état « normal », mais ils provoquent logiquement tout un tas de problèmes de société, à l'instar des Zombies qui ont mangé le monde (la série BD trash déjantée de Frissen et Davis). La surpopulation inhérente au phénomène s'accompagne en effet d'une grave paupérisation... et des vengeances ultimes s'imaginent, à l'instar des terroristes du World Trade Center, ligotés sur un bûcher continu. Bizarrement, les bonnes idées de scénario s'alternent en évitant l'ésotérisme de bas-étage, mais sans qu'on sache très bien où les auteurs veulent en venir. La linéarité de l'opus suit un faux-rythme, ce qui permet certes toutes les surprises, mais aussi les séquences plus floues – les palabres entre les militaires en mission en Egypte. L'ensemble est une nouvelle fois mis en images par les palettes infographiques expertes de Jean-Michel Ponzio. Cet artiste chantre du montage photo-retouché et 3D-composé offre une belle diversité de décors et de situations, pour un rendu certes toujours un peu figé – la rançon de sa technique...