L'histoire :
Les premières victimes connues de burn-out furent des moines copistes pris au piège de leur rythme de travail effrénés, ou très assidus dans leur travail spirituel, et qui s'écroulaient soudain dans ce que leurs contemporains appelaient une indifférence. Dans le monde actuel, les entreprises ont transformé les relations du quotidien, introduisant les objectifs individuels, les entretiens d'évaluation, les relations de clients à fournisseurs entre deux services d'une même boîte. Autant de risque de se trouver en situation d'échec, de peur de décevoir, et de plonger dans un toujours plus qui se terminera mal. Une jeune femme sociologue du travail en parle avec son grand-père autour d'un verre. Ils attendent que le garçon de la famille, qui travaille en entreprise, les rejoigne. Ils parlent du passé avec nostalgie, lorsque les collectifs de travail étaient plus fort, et que l'opposition entre le patron et ses ouvriers était frontale et claire. Un mode de relation qui rendaient les ouvriers plus solidaires, et une époque où, disent-ils, on ne parlait pas de burn-out. Et paradoxalement, un mode de relation qui n'a pas été positivement modifié par la révolution sociale de 1968. Lorsque Mathias appelle finalement, c'est pour confirmer que l'entrevue s'est très mal passée. Il est à bout, et ce qu'il décrit ressemble tout à fait à ce mal nouveau qui touche de plus en plus de gens...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Si on ne connait rien de la souffrance au travail, des situations dans lesquelles peuvent se retrouver des individus poussés à bout dans leur contexte professionnel, on apprendra beaucoup de choses avec ce petit livre. L'auteure reprend les fondamentaux universitaires qui décrivent comment les conditions du monde du travail d'aujourd'hui peuvent conduire au fameux Burn-out. Malheureusement, elle le fait avec une vision extrêmement dogmatique, et présente tous les patrons d'entreprise, de start-up ou d’administration, comme de terrifiants manipulateurs qui cherchent, à travers des approches faussement séduisantes, à annihiler toute possibilité de résistance au sein de leurs équipes. Les moments de détente, le team-building, le services que certaines entreprises rendent à leurs employés, tout est passé au crible sous l'angle d'une dépendance qui s'entretient. En face de ces dirigeants manipulateurs, les ouvriers, employés et certains cadres passent pour un vaste troupeau de victimes indifférenciées, toutes promises au même destin. On ressort de cette lecture avec de bonnes bases de ce que propose la sociologie du travail, et des armes dont tentent de s'équiper les syndicats dans les entreprises d'aujourd'hui. Mais le pessimisme qui traverse ce livre donne juste envie d'éviter à tout prix tout ce qui ressemble à un boulot classique. Heureusement, le dessin énergique de Zoé Thouron donne un petit peu de recul à cet ouvrage au propos appuyé. C'est donc une lecture intéressante, mais qui, à trop vouloir dénoncer, ne parvient pas à éviter la caricature, dont sont victimes également ceux que l'ouvrage voudrait défendre.