En l'espace de quelques albums, le dessinateur Arnaud Boudoiron n'a eu de cesse de montrer une large palette de son talent. Avec Husk et Nirvana, il a su offrir des univers très riches comme les fans de science-fiction les apprécient tant. Dernièrement, il a illustré le second tome de Zombies Néchronologies, une série de spin-offs autour du titre phénomène Zombies, avec un style plus direct. Alors que l'on guettait depuis des années la possibilité de croiser cet artiste, nous n'avons pas pu attendre et l'avons contacté directement pour qu'il accepte de répondre à nos questions. C'est avec un immense plaisir qu'il a accepté...
interview Bande dessinée
Arnaud Boudoiron
Réalisée en lien avec les albums Zombies néchronologies T2, Nirvana T2, Husk T1
Bonjour Arnaud Boudoiron, est-ce que tu peux, pour commencer, nous décrire ton parcours et nous dire comment tu en es arrivé à faire de la bande dessinée ?
Arnaud Boudoiron : Autodidacte, artiste mercenaire, grand fan d'illustration mais aussi de figurine. Et oui, je suis aussi sculpteur. Je bossais dans une agence de pub sur Paris. Sur un des projets, j'ai eu l'occasion de travailler avec des artistes des éditions Delcourt. Plus tard Olivier Vatine m'appella pour me demander si j’étais intéressé par la bédé... J'ai fait 13 pages pour le tome 2 de Carmen+Travis. Après j'ai enchaîné les albums.
Quelles sont tes influences en terme de BD ?
Arnaud Boudoiron : A mes débuts, j’étais a fond Travis Charest, ou des styles très réalistes. Aujourd'hui c'est plus Mike Mignola, Mathieu Lauffray... L'artiste que je suis en ce moment c'est Nicolas Nemiri.
Après ton récit sur Carmen + Travis, nous t'avons ensuite retrouvé sur Husk. Comment as-tu élaboré ce style graphique futuriste et hybride sur ce diptyque ?
Arnaud Boudoiron : Husk c'est la rencontre avec Frédéric L'Homme. Je voulais rester chez Delcourt car les gens avaient été bien sympa avec moi, mais Fred avait déjà tous ses pieds chez Soleil. C'est un projet où on avait carte blanche, on en a fait un OVNI de la bédé ! Niveau style, tout a démarré très vite, donc c’était du fur et à mesure. Les idées venaient page par page ! Sur le tome 2, pour moi c’était déjà un plus clair, surtout la quantité de travail que demande un album entier.
Tu as travaillé avec 2 scénaristes différents sur Husk. Pourquoi ?
Arnaud Boudoiron : Frédéric L'Homme est reparti là d’où il venait, le cinéma, toujours dans l’écriture. Louis a repris rapidement le projet.
Tu as travaillé avec Stéphane Louis de nouveai pour un album de Kookaburra Universe. Cette fois-ci, tu as du adapter ton dessin à un univers existant. Quelles ont été les consignes de Louis et étais-tu familier de la série ?
Arnaud Boudoiron : Dans la foulé de Husk pour ne pas perdre de temps je suis resté pépère avec Louis, c'est très sympa de bosser avec lui. c'est un ami. Aucune consigne, à part de faire du "Boudoiron". Moi j'avais envie de changer de style, puis il fallait bosser avec un coloriste.
Husk et Kookaburra œuvrent dans le registre de la science-fiction. Es-tu un amateur du genre ? Quels sont pour toi les récits (BD, romans) marquants ?
Arnaud Boudoiron : J'aime beaucoup de genres différents, dont la SF, hard ou Pop. Gros fan de Twilight Zone. Ma femme vous dirait surtout des films d'horreur et d’épouvante, mais c'est normale avec Netflix on peut regarder beaucoup de mauvais trucs. En Bédé hard SF j'aime beaucoup le travail de Bajram sur Universal War. mais j'ai lu et vu des tonnes de trucs, la série que j'ai sûrement relu le plus c'est Gunnm, ah ! Un Manga.
Tu as ensuite collaboré avec Jean-Luc Istin sur Nirvana, un récit mêlant science-fiction et rappelant fortement les super-héros. Comment as-tu rencontré Jean-Luc et comment es né ce projet ?
Arnaud Boudoiron : Oh très vite, j'ai enchaîné tout de suite après le Kookaburra. Pas de pause, La bande dessinée était devenue ma principale activité. Jean-Luc Istin cherchait un dessinateur pour son premier projet de SF. Notre rencontre c'est faite sur des échanges de 2 ou 3 mails, qui consistait si oui ou non je partais sur le projet avec lui.
Jean-Luc nous avait confié avoir été obligé d'écourter Nirvana, qu'est-ce que cela a signifié artistiquement à ton niveau ? As-tu du changé beaucoup de choses ?
Arnaud Boudoiron : Dès le début, on savait qu'un album de SF est plutôt casse gueule. Vu les ventes du premier, il était même question de ne pas faire un tome 2. On devait y croire puisque l'on a décidé de le faire . Au moins les lecteurs pourront apprécier que les auteurs poussent leurs projets au maximum ! Au final deux beaux tomes, mais pas une seule cacahuète en retour...
Aujourd'hui, nous te retrouvons sur un des spin-offs de la série Zombies intitulé "Mort parce que bête". Comment as-tu rejoint l'aventure des morts-vivants ?
Arnaud Boudoiron : Pareil, a la fin du second tome de Nirvana, je me suis fait chopé par l’équipe de Zombies. J'avais évoqué à Jean-Luc Istin, l'envie de faire un genre horreur ou zombie, cela a du arrivé aux oreilles d'Olivier Péru. Puis Olivier Péru, je le connais depuis des années, ça aide...
De nouveau, tu fais évoluer ton style pour qu'il se rapproche de celui de Sophian Cholet. Étais-ce une consigne de départ ou au contraire une approche que tu voulais tenter ?
Arnaud Boudoiron : Non, pas de consigne. Sophian aimait bien mon travail sur Nirvana, moi j'avais mis la couleur de coté pour me consacrer qu'au noir et blanc. Toujours a la recherche d'un style dynamique , expressif et rapide à dessiner.
Sur cet album, tu collabores avec Olivier Péru, un autre scénariste de renom. Qu'as-tu appris auprès de tous les auteurs avec qui tu as travaillé et comptes-tu par la suite te mettre à l'écriture ?
Arnaud Boudoiron : Rien ;) Haha ! Avec Istin ou Péru, ils m'ont laissé travailler dans mon coin tranquillement. Ce que j'ai appris d'eux, c'est qu'ils me font énormément confiance ! Bien sûr, il y a bien eu quelques échanges pour des modifications. En revanche, j'ai appris des bons trucs sur le cadrage et la mise en scène avec Frédéric L'Homme. J'ai une mise en scène cinématographique, et si cela ne fait pas bédé "classique", alors tant mieux, je prends ! Pour l’écriture d'un album, pour le moment non. Mais Je mentirais si je disais que je n'y ai jamais pensé.
Est-ce que le fait qu'Olivier, Jean-Luc ou encore Stéphane soient aussi des dessinateurs à la base facilitent la création ?
Arnaud Boudoiron : Sûrement ! ils savent les contraintes et les inconvénients. ils sont plutôt souple du coup.
Parmi tous les albums sur lesquels tu as travaillé, lequel t'a donné le plus de plaisir et à contrario quel est celui qui t'a posé le plus de difficultés ?
Arnaud Boudoiron : J'ai pris beaucoup de plaisir sur le tome 1 de Nirvana, j'y croyais ! C'est mon album préféré d'ailleurs. les plus difficiles ont été les tomes de Husk, 2 ans pour chaque album. Trop ambitieux, J'avais mis la barre trop haute. Sinon j'ai lutté pour finir le dernier tiers du Zombies, mais pour des raisons de cumul de travaux professionnels.
Quels sont tes prochains projets ?
Arnaud Boudoiron : Aucun. je les ai tous refusé. Je mets la bédé de côté pour le moment. Je reviens vers la sculpture, digitale cette fois ci et à plein temps.
Quel genre de récits te sentirais-tu incapable de dessiner ?
Arnaud Boudoiron : Normalement à mon stade on doit tout pouvoir dessiner. Chacun a bien des trucs qu'il préfère éviter. Tout dépend du scénario, s'il est bon, rien ne me fait peur. En revanche du boulot et du stress oui, par exemple sur de l'historique qui demande beaucoup de documentations.
Si tu avais le pouvoir métaphysique de visiter le crâne d'un autre auteur pour comprendre son génie, lui piquer des techniques ou pour faire ce que tu veux... Chez qui irais-tu et pourquoi faire ?
Arnaud Boudoiron : Plein, dont Iain McCaig... Pour comprendre son génie. J'ai toujours adoré son style et c'est un maître de l'aquarelle, medium que j'apprécie beaucoup.
Merci Arnaud !