Les fans de comics ont sûrement déjà entendu parler de Cyrille Munaro. Ce dessinateur a toujours été un grand passionné de super héros et en a même créé un : Coq-Man assisté de son fidèle sidekick Poussin. Celui qui a su se faire connaître grâce à un humour ravageur a surpris son monde en explorant une facette inédite de son talent sur The French Crow. Cyrille Munaro revient cette fois-ci dans un style au croisement de Frank Miler et d'Eduardo Risso sur un récit de Terry Stillborn dans le troisième numéro du Garde Républicain. Ce super héros français offre suffisamment d'espace créatif aux artistes qui s'y essaient que le lecteur découvrira un formidable plan séquence long de plusieurs pages et à l'intensité omniprésente. Cyrille Munaro nous explose même les rétines au travers de ses décors apocalyptiques. Avec un tel parcours dans le milieu, il semblait inconcevable de ne pas interviewer ce joyeux drille, accompagné par son sympathique scénariste.
interview Comics
Cyrille Munaro et Terry Stillborn
Réalisée en lien avec les albums Le Garde Républicain T3, Le Garde Républicain T1, Le Garde Républicain T2
Bonjour, pouvez-vous vous présenter aux lecteurs ?
Cyrille Munaro : Cyrille, dessinateur de BD parodique, mais pas que. J'ai fait un French Crow assez sanglant et hargneux.
Terry Stillborn : Je suis Thierry Mornet, responsable éditorial Comics aux Editions Delcourt depuis une dizaine d'années. J'ai le plaisir d'y animer le catalogue Comics, autour d'auteurs tels que Mike Mignola, Todd McFarlane, Eric Powell, Robert Kirkman, Will Eisner, etc. Sur de nombreux titres indépendants (Walking Dead, Hellboy, Spawn...) et quelques grosses licences comme Star Wars et Snoopy. Parallèlement à cela, j'ai décidé de faire vivre - sous le pseudo de Terry Stillborn - en auto-publication les aventures d'un super-héros français appelé Le Garde Républicain, une série sur laquelle j'ai la chance de collaborer aussi bien avec de jeunes talents que des auteurs confirmés.
Comment êtes-vous arrivés sur Le Garde Républicain ?
Cyrille Munaro : Thierry faisait faire des illustrations du Garde par plusieurs autres dessinateurs, en leur demandant de s'inspirer d'une couv' ou d'un autre dessinateur. Il m'a demandé de le faire en copiant le style d'un auteur que j'apprécie beaucoup, à savoir Frank Miller. J'ai bien eu une idée, mais elle me semblait trop "facile". Je lui ai dit que je calais un peu, et m'a alors proposé exactement la même idée. Celle de la cover reprenant la silhouette de Batman sur fond de ciel d'orage dans The Dark Knight Returns. Les grands esprits se rencontrent. Il m'a aussi suggéré de faire un dessin avec ses personnages rencontrant les miens, Coq-Man & Poussin. Et dans la foulée, j'en ai fait quelques autres, notamment un ou je reprenais le style "gras" de Miller sur son The Dark Knight Strike Again, c'est ce qui l'a, m'a t-il dit, décidé à me confier plus tard son idée de récit post apocalyptique.
Terry Stillborn : C'est un projet qui remonte à une trentaine d'années, créé à l'occasion d'un concours de dessin organisé dans les pages de Mustang (un petit frère de Strange dans lequel furent publiés Ozark, Mikros et Photonik). Il y a deux ans environ j'ai eu envie de dépoussiérer ce vieux concept. J'ai décidé de l'auto-publier afin de disposer d'une entière liberté d'action. De plus, il n'y avait pas ou si peu de super-héros français dans un registre réaliste, que cela m'a semblé plus intéressant d'aller nager dans ces eaux-là. Le Garde Républicain est mon bac à sable (ré)créatif personnel.
> Cyrille, peux-tu nous parler un peu de ton parcours avant Le Garde Républicain ?
Cyrille Munaro : J'ai découvert les pockets tardivement. J'ai envoyé des dessins pour le courrier des lecteurs, qui ont été publié. Puis Thierry m'a contacté pour savoir si je voulais dessiner pour eux. J'ai accepté, et j'ai reçu un scénario de Jean-Marc, que j'ai réalisé non sans trac. Ce n'était plus du fanzine, ou du dessin perso, je bossais pour un éditeur avec des lecteurs. Mon boulot leur a plu, j'en ai fait d'autres, jusqu'à ce que la ligne des pockets s'arrête, hélas. Coq-Man & Poussin aurait dû être publié sous forme d'histoire à suivre dans Kiwi. Thierry et moi somment resté en contact, et m'a demandé plus tard de lui réaliser des strip pour la revue Aspen Comics chez Delcourt.
Tu es un grand fan de comics. La scène actuelle te plait-elle ? Quelle série ou auteurs suis-tu toujours ?
Cyrille Munaro : J'ai un peu décroché des comics actuels. Les histoires, pour moi, tournaient en rond. Je me contente des one-shots, et de certaines rééditions d'histoire que j'avais loupé. Actuellement je suis les Grant Morrisson présentent Batman, les Knightfall, les intégrales de Captain América, les histoires de Mark Millar. J'adore ce qu'il écrit. Lui au moins il sort de l'ordinaire. Ça charcle, ça change de la routine des autres super héros "clean". Je suis toujours le Savage Dragon d'Erik Larsen. Et sinon, parfois, je me ressors un vieux Lug, un vieil Arédit ou un vieux Sagédition et je me le refais avec grand plaisir. L'année dernière par exemple, une petite fringale, comme ça, de me relire les Daredevil par Ann Nocenti et John Romita Jr. Et aussi cette histoire, qui à l'époque était assez inattendue, qui mettait en scène un duel improbable entre Spider-Man et Firelord en plein New-York. Ça, à l'époque, on pouvait encore nous surprendre, tout n'avait pas été fait. Maintenant, c'est un peu plus compliqué de nous étonner. Je me relis aussi de la BD franco-Belge. Rien a voir avec les super héros, mais par exemple, Pauvre Lampil, je trouve ça excellent. J'ai relu mes exemplaires la semaine dernière.
Y a t-il une apparition de Coq-Man dans ton épisode du Garde Républicain ? >
Cyrille Munaro : Non, du tout. L'histoire est sombre, l'ambiance assez lourde et violente. Placer un personnage comique casserait un peu l'élan de lecture en distrayant le lecteur de manière inopportune. J'ai quand même failli mettre un tag sur un mur reprenant le titre d'une chanson interprété par Katie Melua, "If The Light Go Out", un peu dans le thème de l'histoire, mais je n'ai pas trouvé de place. Tout les murs sont détruit ou sale. J'aurais pu en "nettoyer" un pour l'occasion, mais je suis resté dans l'optique de montrer un Paris ravagé et crasseux, sans rien d'autre pour distraire l'œil que des cadavres et des débris. J'ai quand même placé une référence connue, ce qu'on voit à la fin du premier film La Planète des Singes et au début du premier Kamandi, et bien sa version parisienne baigne quelque part dans la double page, avec également un des fleurons de l'industrie française, que j'ai tenu à mettre dans cette élément qui n'est pas le sien. J'avais envie de m'essayer à une image forte et inhabituelle, tel ce pétrolier qui s'échoue dans les rues de Manhattan dans Le Jour d'Après, ou bien le porte avion JFK qui se retrouve en pleine montagne dans un épisode de Photonik. Alors j'ai modestement plongé un TGV dans la Seine, qui témoigne que ce qui s'est passé a été sacrement violent. La Lune fracturé en deux est aussi une référence à une autre série apocalyptique, Arok le Barbare, dessin animé diffusé en France dans les années 80, qui a bénéficié de la patte d'un certain Jack Kirby.
A quand un prochain opus de Coq-Man justement ?
Cyrille Munaro : Et bien il est prévu pour sortir après mon Gagorak, parodie de Goldorak, mais celle ci est également en retard de fabrication. Anthony Dugenest [NDR : le boss de Wanga Comics] bosse sur plusieurs maquettes d'album qui sont prévu de sortir avant les miens. Donc, on attend... Et sinon, j'ai commencé l'écriture d'un Coq-Man & Poussin 3.
Pouvez-vous respectivement nous présenter votre récit ?
Cyrille Munaro : Je pense que "La Légende" va dérouter les lecteurs déjà habitués à ce que Thierry a écrit. Là où vous lisiez les aventures d'un super héros français en pleine force de l'age, quelque soit l'époque, là, vous allez voir un jeune en souffrance dans un contexte terrible, ou il n'y a plus rien, plus de sécurité, plus de nourriture, rien ! Projetez vous dans une ville morte, la nuit, avec une meute d'enragés à vos trousse. Là, ça fait moins super héros que dans les autres histoires. Après, la suite, à vous de la découvrir.
> Terry Stillborn : En ce qui concerne "Les Quinze minutes de gloire", j'ai choisi de laisser la main à Pierrick au scénario et à Elsa au dessin. Je ne suis intervenu qu'en tant qu'éditeur pour apporter des remarques ou quelque éléments pour - je l'espère - enrichir le récit. Nous avons réfléchi ensemble à ce qui serait faisable dans le cadre de la "mythologie" du Garde (le fait notamment que chaque génération recèle un Garde différent, que le costume soit porté par une personne différente selon l'époque). Très rapidement, Pierrick & Elsa ont souhaité raconter une histoire située au cours des années 1980, qui leur parlaient mieux, et surtout qui n'avaient pas été explorées jusqu'alors. A partir du moment où je leur avais donné carte blanche, nous avons discuté du récit et... C'était parti :-) En ce qui concerne "La Légende", réalisé avec Cyrille Munaro au dessin, je traînais cette envie de récit quasiment depuis la création du personnage. Une histoire post-apocalyptique située dans Paris, qui est un décor extraordinaire à "détruire", m'amusait particulièrement. Je souhaitais, de plus, rendre hommage graphiquement au Sin City de Frank Miller, au Kamandi de Kirby, à Point de Rupture de Carlos Trillo & Eduardo Risso et à quelques films de genre qui m'ont marqué. Cyrille admirant Miller, le récit s'est transformé en exercice de style, très amusant à réaliser :-)
Quelles ont été vos influences sur vos récits, en terme de scénario et de dessin ?
Cyrille Munaro : Thierry sait que je suis un grand fan de Frank Miller, et c'est en m'inspirant de Sin City qu'il m'a demandé de visualiser son récit, ainsi qu'avec les BD d'Eduardo Risso. J'ai composé avec leur façon de faire à eux, en gardant un peu ma patte à moi. J'avais réalisé une bonne moitié de l'histoire, mais ça n'allait pas. Des cadrages étaient foireux, certaines choses importantes à l'image n'étaient pas assez bien mises en valeur, bref, j'ai tout refait. Ça me convenait mieux. Il faut se remettre en question sur un dessin. C'est expliqué dans l'ouvrage How To Draw Comics, The Marvel Way. On peut dire qu'un de leur chapitre m'inspire beaucoup, quand John Buscema montre l'exemple de scènes d'action, ou dramatique, rendues plus forte avec des cadrages différents.Pour la narration, c'est une histoire sans parole. Là encore, Thierry savait que j'arrive à me débrouiller dans ce genre-là. J'avais réalisé des récits de ce genre pour les pockets, et ça lui avait bien plu. Faire comprendre ce qui se passe sans l'expliquer avec des cases de textes, apparemment je me débrouille plutôt bien. Son histoire est muette, je convenais donc encore plus pour lui pour son choix. J'ai lu son histoire comme un story-board d'une scène d'action.
> Terry Stillborn : En fait, j'ai attendu de voir ce que Cyrille avait fait du scénario de base, qui est un long plan-séquence. J'avais deux options : soit dialoguer en off, ou bien tout laisser en muet. Le superbe travail de découpage et de narration de Cyrille n'avait pas besoin de mots ajoutés, qui auraient alourdi l'ensemble. Finalement je me suis contenté d'une seule phrase, coupée en deux en tout début et en toute fin du récit. C'est un autre clin d'œil à un auteur que j'admire énormément : Matt Wagner, sur Grendel. Nous étions dans l'exercice de style, dans les clins d'œil appuyés à Miller, Kirby et Risso. J'ajouterai aux influences évoquées ci-dessus, celles de Matt Wagner sur un épisode quasiment muet de Grendel, mais aussi Le Dernier combat (le 1er film de Luc Besson) et une série de courte durée publiée par Atlas Seabord dans les années 1970, intitulée Planet of the Vampires.
Cyrille, ton récit se déroule quant à lui en plein contexte post-apocalyptique. Pourquoi ce choix ?
Cyrille Munaro : Je suis fan de ce genre de film. New York ne Répond Plus, La Route, Mad Max, Le Livre d'Eli (à consommer avec modération, parce que ça peut vite devenir déprimant). Thierry savait déjà que j'étais un grand fan de Kamandi, et en discutant sur le projet, il s'est aperçu que je connaissais bien ces classiques, et que ça m'a bien motivé pour réaliser son histoire. Il a tenu à combiner mon style Millerien à mes goûts en matière de ciné apocalyptique.
Terry Stillborn : Oui, l'idée de débuter le récit par une pleine page suivie d'une double page est directement empruntée à Jack Kirby, notamment sur Kamandi :-)
L'apparition du Garde Républicain en caméo dans Æternum Vale a t-elle servie d'essai sur la série pour Pierrick et Elsa ?
Terry Stillborn : Je laisse Pierrick & Elsa répondre de leur côté, mais en ce qui me concerne pas vraiment. Æternum Vale était leur premier récit. En cours d'écriture, Pierrick m'a demandé s'il pouvait utiliser Le Garde dans le cadre de son récit. Nous avons discuté de la manière dont il voulait l'utiliser, et comment il pouvait jouer avec :-) En revanche, Æternum Vale étant un récit uchronique, il ne se situe pas dans la chronologie des récits des Gardes que j'ai établie, entre la fin du XVIIIe et nos jours.
> Thierry, qu'est-ce que cela fait de laisser ton personnage à un autre auteur scénariste ?
Terry Stillborn : L'ensemble du projet du Garde est un espace de liberté... Et je dispose des clefs pour y faire rentrer ceux que je souhaite. Je connais Pierrick & Elsa depuis quelques années, et à chaque projet, je les vois progresser de manière impressionnante. Nous nous sommes revus en novembre 2013. Ils étaient dispos et la possibilité de réaliser un Garde s'est imposée presque naturellement. Je leur ai proposé, ils étaient ravis de s'y atteler. Quelques jours plus tard, Pierrick est revenu vers moi avec une idée. Je lui est dit banco. C'est aussi simple que cela. Ce qui m'intéressait tient au fait JUSTEMENT qu'il allait réaliser avec Elsa quelque chose de différent de ce que j'avais en tête.
Jusqu'ici Thierry, les récits se déroulent dans des époques toujours très différentes. Est-ce une volonté propre ou un contexte imprévu ?
Terry Stillborn : C'est totalement voulu. Je pense même que c'est ce qui fait - je l'espère - l'un des intérêts du concept. Je ne souhaitais pas m'enfermer dans un seul personnage et une seule époque. L'une des raisons pour lesquelles les super-héros traditionnels américains ne "fonctionnent" plus pour moi - à quelques exceptions près - tient au fait que les mêmes sempiternels concepts sont remis sur la table ("rebootés") tous les 5 ans environ. Bruce Wayne a une trentaine d'années depuis 75 ans !! Peter Parker est un jeune homme depuis le début des années 1960 !! Ça sent sincèrement la naphtaline ;-) En partant du principe que chaque génération dispose d'un Garde différent, et EST un personnage différent, je m'aménage un espace de totale liberté sans contrainte chronologique. De plus chaque Garde s'accompagne de personnages secondaires différents. Bref, c'est sans limite :-) C'est un peu comme Le Fantôme du Bengale, mais sans le système de filiation directe :-) Dans ma petite mythologie, à chaque époque donnée, située entre la fin du XVIIIe siècle (apparition du premier Garde incarné notamment par Lafayette) et nos jours - et même au-delà comme le prouve le récit post-apocalyptique réalisé avec Cyrille - un homme de valeur incarne Le Garde.
> Peux-tu nous parler du futur du Garde Républicain et des autres récits à venir ? Quand ? Avec qui ?
Terry Stillborn : A l'heure actuelle, une grosse dizaine de récits du Garde, situés à diverses époques sont en cours de réalisation. Le quatrième et le cinquième numéro sont quasiment bouclés et le sixième est bien avancé. Dans le 4e, on retrouvera Le Garde de la fin des années 1960, introduit dans le 2e numéro avec Chris Henin au dessin. Ce 4e numéro sera également l'occasion de débuter une série de 4 back-ups (récits secondaires) consacrés aux origines du premier Garde, réalisés en collaboration avec Nathan Legendre, et aussi un jeune dessinateur belge qui va en bluffer plus d'un Anthony Wittamer (#6). Le contenu des 5e et du 6e numéro n'est pas encore fixé définitivement. Cela dépendra du délai dans lequel les récits seront complétés. En l'occurrence sont en cours de bouclage la suite et fin du récit entamé avec Chris Hénin, une histoire dessinée par Danny Rhodes (Garde contemporain), une autre par les Toto's Brothers (époque napoléonienne). Sont également en cours deux récits scénarisés par François Corteggiani et dessinés respectivement par Luciano Bernasconi et Manhko. Autre auteur BD vedette déjà annoncé, Jean-Yves Mitton - le créateur de Mikros - travaille sur un récit futuriste. J'ai le plaisir aussi d'avoir un récit d'une quinzaine de pages réalisé par Juan Roman Santacruz, dans lequel son personnage, NuclearMan, rencontre Le Garde. Du caviar !! Je dois également finaliser des récits destinés à Jim Dandy, Thierry Olivier et des gags réalisés par André Amouriq ! Et cela ne concerne que ce qui est engagé. D'autres surprises en termes de collaboration sont à venir :-) Au final, l'année à venir devrait permettre de publier au moins 4 numéros :-)
Sur quoi travailles-tu en ce moment ?
Cyrille Munaro : Je fais une BD d'horreur/fantastique, une cinquantaine de page. J'en ai fait la moitié, et... je crois que je vais tout refaire. Ça ne me convient pas du tout, mais alors pas du tout. Elle va me prendre un temps fou, mais je la terminerai. Ça fait longtemps qu'elle traîne, il faut que je m'en libère l'esprit pour passer à autre chose de plus "facile".
> Si vous aviez le pouvoir de visiter le crâne d'un autre auteur pour en comprendre son génie, qui choisiriez-vous d'aller visiter ?
Terry Stillborn : J'avais déjà répondu au cours d'une interview précédente que l'auteur qui m'impressionnait le plus était sans doute Will Eisner. Si une seconde chance m'était donnée, je pense que je choisirais Jack Kirby. Son imagination foisonnante, ses machineries improbable, sa capacité à faire avancer ses récits plus grands que nature : cela devait être incroyablement passionnant de le voir à l'œuvre !
Cyrille Munaro : Heu... j'aurais bien dit Jack Kirby, mais j'ai vu que c'était déjà pris ;-) Si je dis Frank Miller, ça va être un peu répétitif vu ce qu'on a déjà dit sur lui. Franquin, c'est pas vraiment du comics, mais dans le genre influent, il en influence encore beaucoup, et ça risque d'être répétitif aussi. Il y en a un un qui m'influence aussi beaucoup, c'est Rod Serling. Mais c'est pas du comics non plus, mais ses histoires m'ont beaucoup influencé dans l'art et la manière de montrer la chute de l'histoire au dernier moment. Balancer l'élément déclencheur au bon moment, le mot déclencheur dit au bon moment, le timing de la chute selon Rod Serling. Visiter son esprit ferait certainement peur. Visiter celui de Go Nagai ferait aussi très peur... En gros, je ne sais pas, je vais réfléchir pour n'en choisir qu'un. Je vais aller faire une sieste. Là ! 'Fait chaud. J'ai soif ! Je reviens tout à l'heure... Et donc, après avoir délibéré avec moi-même, je dis Roland Topor, pour Téléchat. Il a réussi, avec Henri Xhonneux, a écrire des histoires avec des objets qui se déroulent dans des frigos, des salles de bains, des escaliers, etc... Alors là, j'aurais aimé savoir comment il a trouvé toutes ces idées et combinaisons. La migration des parapluies, la grève des galets, la canicule sur la Sierra Moquette, la cueillette des ampoules, etc... Juste absolument génial.
Merci messieurs !
En bonus, Cyrille Munaro vous présente la façon dont il a conçu l'une des cases du récit La légende.
Cyrille Munaro : La première version ne me satisfaisait pas. Pas assez expressif, et le design du personnage devait être changé. Pour trouver une meilleure expression, je l'ai joué. J'ai fait comme Dodier (JÉROME K JÉRÔME BLOCHE, GULLY) ou bien encore Alex Ross (MARVELS, KINGDOM COME) je me suis mis en scène pour chercher le mouvement qui nous échappe un peu. Ensuite, une fois le cliché trouvé, je l'ai repris, et adapté.